Sur Europe 1, Hakima El Haité s’exprime sur la COP21 et la COP22 au Maroc

Hakima el Haïte, ministre déléguée marocaine auprès du Ministre de l’énergie, des mines, de l’eau et de l’environnement, chargée de l’Environnement, était l’invitée d’Europe 1 pour parler de la COP21 et de la COP22. Le Maroc étant l’un des pays les plus engagés en Afrique pour le climat et qui sera hôte de la Cop 22.

Verbaim:

DAVID ABIKER: La COP 21 démarre demain mais la COP 22, c’est l’an prochain au Maroc qui accueillera la 22e conférence climat ; un enjeu pour le pays, un enjeu pour l’Afrique également. Bonjour Hakima EL HAITE., vous êtes ministre de l’Environnement du Maroc. Demain au Bourget, 150 chefs d’Etat se réuniront pour ouvrir les négociations sur le climat mais le terrorisme sera dans toutes les têtes. Est-ce que le Maroc qui a démantelé une cellule terroriste de Daesh jeudi, redoute des attaques sur son sol comme celles qui ont frappé la France et la Tunisie ?

HAKIMA EL HAITE
Cher David, permettez-moi de profiter d’abord de votre hospitalité pour réitérer les condoléances du Maroc aux familles des victimes et témoigner de la sympathie et de la solidarité de notre pays avec les événements tragiques qu’a connu la France. Aucun pays n’est épargné. Vous savez que nous assistons aujourd’hui à une mutation des formes de terrorismes. Le terrorisme aujourd’hui n’est pas localisé ailleurs, il est dans nos pays, il est en France, il a été mené par des Français, il est au Maroc peut-être, en Tunisie ; il n’y a plus de frontières pour cette nouvelle génération de terrorisme. Et donc je dis restons solidaires, concentrés sur les différents angles par lesquels nous pouvons combattre le terrorisme et à mon sens, des axes multidimensionnels devraient être abordés pour combattre ce genre de terrorisme.

DAVID ABIKER: Hakima EL HAITE, ministre de l’Environnement du Maroc, qu’est-ce qui vous fait penser que cette conférence climat – elle démarre demain, vous y serez dès ce soir avec la délégation marocaine – peut être un succès ?

HAKIMA EL HAITE
Je vais vous étonner parce que je pense que cette conférence est déjà un succès. Elle est déjà d’un succès à plus d’un titre : d’abord parce que j’ai assisté à l’évolution des négociations climatiques depuis des années et je peux vous dire que la caractéristique de cette conférence, c’est qu’elle est duelle, c’est-à-dire que nous avons les négociations traditionnelles mais par ailleurs, nous avons une mobilisation mondiale sans précédent qui est aujourd’hui marquée et je dirais prouvée par la mobilisation des chefs d’Etat – déjà en juin ou juillet, on avait 137 chefs d’Etat qui avaient confirmé leur présence – mais surtout par la mobilisation des différents acteurs de la société civile, à savoir le secteur privé qui l’a montré l’année dernière – les investissements privés dans les énergies renouvelables ont été évalués à 550 milliards de dollars, ce qui représentait 56% des investissements apportés dans l’énergie à travers le monde – les territoires, qui ont fait une déclaration et qui ont montré qu’ils ont bouger les frontières et qui sont sur des technologies et sur des pratiques durables au niveau des territoires et qui ont fait un engagement de diminuer de 15% leurs gaz à effet de serre. Et le plus innovant de toute la négociation mondiale autour du climat, c’est les contributions. Mine de rien, les contributions, c’est l’innovation ; on n’y croyait pas il y a 3 ans, il y a 4 ans, on n’y croyait pas ! Aujourd’hui, nous avons tous les Etats pratiquement, 167 Etats, qui ont déposé leurs contributions et qui couvrent 91 ou 92 % des émissions de gaz à effet de serre…

DAVID ABIKER: Donc il n’y aura pas d’échec… d’après vous, il n’y aura pas d’échec.

HAKIMA EL HAITE
Ecoutez, nous sommes sur une très bonne trajectoire, je peux vous raconter la frustration et l’horreur qu’on a ressenties quand le GIEC nous a présenté son rapport il y a 3 ans, le 4e et le 5e rapport et je peux vous dire qu’on a été alarmés et que la communauté internationale a été alarmée et que les températures, les prévisions de températures desquelles parlait le GIEC étaient juste hallucinantes, c’était du 5 degrés-6 degrés avec une période irréversible si on atteignait les 6 degrés… aujourd’hui, nous sommes sur une très bonne trajectoire, nous sommes dans une trajectoire autour de 3 degrés, 2,7 degrés et donc je pense qu’il faudrait qu’on s’active et qu’on maintienne la mobilisation, la participation citoyenne de la société civile, pour gagner un gap durant la période 2015-2020 et atteindre notre objectif.

DAVID ABIKER: Et vous, les Marocains, vous êtes mobilisés puisque vous accueillerez l’an prochain la COP 22, c’est-à-dire la conférence climat de l’année prochaine, pourquoi le Maroc est si mobilisé, comment il se mobilise sur ces questions-là ? C’est votre 2e conférence climat, ce sera la 2e que vous organiserez l’année prochaine après avoir organisé la précédente en 2001 ; pourquoi vous êtes mobilisés et mobilisés pour l’Afrique ?

HAKIMA EL HAITE
Ecoutez, je pense que nous avons grâce à la clairvoyance de notre défunt roi, le roi Hassan II et notre actuel roi et souverain, Mohammed VI, nous avons une vision et cette vision est née il y a très longtemps au Maroc, d’abord avec une politique d’adaptation qui a été initiée en 1964, mine de rien, le Maroc s’est conditionné au climat et a fait sa politique de l’eau, pour des raisons de survie, pour des raisons d’assurance et de garantie de l’accès à l’eau potable, de la sécurité alimentaire, avec la politique des barrages, etc et donc nous avons pris le rythme il y a très longtemps. Avec l’avènement de la nouvelle Constitution, nous avons constitutionnalisé le développement durable. Nous avons, suite à la demande de Sa majesté, légiféré le développement durable et c’est exceptionnel, nous avons une loi sur le développement durable qui impose une stratégie nationale de développement durable.

DAVID ABIKER: Vous venez de vous engager dans le solaire, vous êtes en train de lancer une grande usine de production d’énergie solaire, mais vous êtes dépendants de l’extérieur à 95%. Comment vous allez faire pour être autonome sur le plan énergétique, même si vous avez une des usines solaires les plus modernes au monde ?

HAKIMA EL HAITE
Vous savez, l’objectif c’est d’avoir un mix énergétique qui nous permet d’abord d’alléger la facture de l’Etat et puis d’aller vers un changement de paradigme et d’aller vers un modèle de développement durable. Nous faisons des changements climatiques, une opportunité pour prôner un nouveau modèle. C’est ce modèle qui a été prôné par notre roi en 92…

DAVID ABIKER: Hakima EL HAITE, ministre de l’Environnement du Maroc, il vous manque 45 milliards pour atteindre cet objectif de transition et pour réduire de 32% les émissions de gaz à effet de serre. Ces 45 milliards, vous allez les trouver où ?

HAKIMA EL HAITE
45 milliards, c’est beaucoup d’argent, c’est 45% du Fonds mondial vert. Mais il ne faut pas le prendre comme ça ; chaque dollar dans les mesures d’atténuation et dans le secteur des énergies renouvelables attire 3 à 4 dollars. Donc si vous refaites le calcul, il va nous manquer quelque chose comme 1,5 milliard de dollars par an à partir de 2020 et ça, ce n’est pas beaucoup par contre. Le Maroc s’est engagé ; la preuve, on a réussi des partenariats public-privé ; le privé a compris qu’il y avait une valeur ajoutée à investir dans les énergies renouvelables et je suis sûre que l’innovation va rendre ces énergies renouvelables encore plus compétitives et beaucoup beaucoup moins chères et démocratiser l’accès à ces énergies. Et voilà, donc je pense que c’est possible.

(…)

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite