Marine Le Pen, l’héritière qui veut faire gagner l’extrême droite française

Elle résume son projet d’un mot: « patriote ». Portée par une vague nationaliste et anti-mondialiste en Europe, encouragée par l’éclatement du paysage politique français, la chef de l’extrême droite Marine Le Pen espère une victoire historique à la présidentielle.

Après des années d’efforts pour dédiaboliser son parti Front national (FN), elle compte, à 48 ans, faire mentir les sondages qui la donnent qualifiée haut la main au premier tour le 23 avril mais battue au second tour le 7 mai du fait d’un report présumé insuffisant des voix.

Blonde, voix de stentor et verbe habile, la fille du cofondateur du parti en 1972, Jean-Marie Le Pen, a donné le ton lors de son premier meeting début février: "Contre la droite du fric et la gauche du fric, je suis la candidate de la France du peuple".

Des enquêtes sur des emplois fictifs présumés au Parlement européen – sa chef de cabinet a été inculpée le 22 février- et sur le financement des précédentes campagnes électorales du FN n’entament pas sa popularité. Sa ligne de défense : "une cabale politique".

Discrète en fin d’année dernière, elle occupe désormais l’espace médiatique et déploie méthodiquement son programme: défense de l’identité française, priorité nationale avec suppression des aides sociales aux étrangers, sortie de l’euro, distanciation avec l’UE…

"Après des décennies d’erreur et de lâchetés, après des fausses alternances faites de reniements et de laisser-aller, nous sommes à la croisée des chemins", a-t-elle tonné en lançant sa campagne à Lyon (sud-est) devant ses militants chauffés à blanc.

Ses paroles, bues par des partisans de tous âges et milieux sociaux, sont traditionnellement ponctuées par un slogan scandé à gorge déployée: "On est chez nous!".

Un "cri de xénophobie", selon ses adversaires. "Un cri d’amour" pour la France, répond-elle.

Son objectif: "remettre la France en ordre". Son combat: "le mondialisme jihadiste et le mondialisme économique" qui "menacent nos libertés".

Pour dramatiser son discours de "résistance" et "reconquête", elle va jusqu’à citer le général de Gaulle, figure historique de la résistance aux nazis que l’extrême droite n’avait jamais invoquée.

Son clip de campagne joue le registre de l’intime.

"Je suis une femme et comme femme je ressens comme une violence extrême les restrictions des libertés (…). Je suis une mère et comme des millions de parents je m’inquiète chaque jour de l’état du pays et du monde que nous laisserons en héritage à nos enfants", dit-elle.

La stratégie de dédiabolisation que mène cette mère de trois enfants, deux fois divorcée et aujourd’hui en couple avec l’un des vice-présidents du parti Louis Aliot fonctionne: le parti améliore ses scores à chaque élection depuis qu’elle en a pris la tête en 2011.

"Marine le Pen a adouci le discours par rapport à Jean-Marie, elle apporte une touche féminine. Elle a une manière délicate d’amener les choses", s’enthousiasme Dorothée, 38 ans, une militante du nord.

En quête de crédibilité internationale, elle a organisé plusieurs déplacements qui lui ont permis quelques coups d’éclat.

En janvier, elle s’est affichée dans le hall de la Trump Tower à New York, sans pour autant rencontrer le président élu. Au Liban en février, elle a refusé de porter le voile pour rencontrer le mufti de la République. Elle part voir les troupes françaises au Tchad cette semaine.

La benjamine des trois filles Le Pen n’était pas destinée à la politique. Sa soeur Marie-Caroline devait à l’origine reprendre le flambeau d’un parti dominé pendant près de quarante ans par leur père.

Mais la vie politique tumultueuse du FN et les brouilles familiales des années 90 ont ouvert la voie à cette avocate de formation au tempérament volcanique.

Elle fait surface en mai 2002, au soir du second tour de la présidentielle, pour défendre son père, défait par Jacques Chirac.

Neuf ans plus tard, elle lisse l’image du parti en écartant les cadres les plus marqués, militants antisémites, nostalgiques de l’Algérie française – voire de la collaboration avec l’Allemagne nazie- ou catholiques intégristes.

A qui téléphonerait-elle en premier si elle gagnait l’élection ? "A Jeanne d’Arc", confie-t-elle lors d’une émission télévisée cet automne.

afp

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