Macron sème le trouble à Bruxelles sur l’élargissement de l’UE

Après le Brexit, les 27 se retrouvent confrontés à un nouveau casse-tête: l’élargissement de l’Union européenne à la Macédoine du Nord et à l’Albanie, auquel s’oppose Emmanuel Macron, sous le feu des critiques de ses partenaires.

La France, les Pays-Bas et le Danemark ont émis des réserves et cela est un motif de "déception", a déclaré la chancelière Angela Merkel.

Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, s’est montré plus sévère en dénonçant "une lourde erreur historique". "Pour être crédible, l’Union européenne doit respecter ses engagements", a-t-il souligné.

"Nous avons fait des promesses à ces pays", a renchéri le président du Conseil européen, le Polonais Donald Tusk, soulignant qu’une "écrasante majorité des Etats membres étaient favorables" à l’ouverture des négociations avec les deux candidats, qui requiert l’unanimité des Etats membres.

Le chef de l’Etat français a justifié son opposition par la nécessité de réformer le fonctionnement de l’UE avant de s’ouvrir à de nouveaux membres.

"Avant tout élargissement, sachons nous réformer", a-t-il dit lors de sa conférence de presse. "Tous les progrès réclamés (aux deux candidats) n’étaient pas là", a-t-il jugé.

Pour Emmanuel Macron, il est également prioritaire de réformer le processus d’élargissement, qui "n’est plus adapté", "trop bureaucratique" et "ne parle plus aux peuples".

Blocages français

Les discussions ont duré jusque tard dans la nuit de jeudi à vendredi et plusieurs solutions de compromis ont été rejetées, selon des participants.

"Nous avons vu un duo bien réglé entre Macron et Rutte", le Premier ministre néerlandais, a confié l’un d’eux à l’AFP. "Ce qui servait l’un, servait l’autre", selon lui.

L’une des propositions rejetées était de dissocier les deux candidatures afin de permettre d’ouvrir les négociations avec la Macédoine du Nord.

Plusieurs diplomates ont estimé que le blocage français s’expliquait par des raisons de politique interne, liées aux questions d’immigration, avec la crainte d’un afflux en cas d’une plus grande ouverture des frontières, ont déploré plusieurs diplomates.

Tout en affirmant que cela n’était pas le cas, Emmanuel Macron s’est interrogé: "Comment voulez-vous que j’explique à mes concitoyens que le deuxième pays qui demande le plus l’asile (politique) en France, ce sont des gens qui viennent de l’Albanie?".

A Tirana, le journal Tema a estimé que l’intérêt du président français était "de gagner en popularité en étant le président qui n’a pas permis l’élargissement et a fait des Albanais le symbole des migrants face aux xénophobes de Marine Le Pen", la cheffe de l’extrême droite française.

Les détracteurs de l’actuel processus d’élargissement craignent aussi que se répètent les problèmes liés à la corruption et à l’indépendance de la justice, que connaissent la Roumanie et la Bulgarie, qui ont adhéré en 2007.

Les partisans d’une adhésion de ces pays soutiennent, en revanche, que le refus de nouveaux membres risque de les pousser dans les bras de la Turquie, de la Chine et de la Russie, déjà très actives dans les Balkans.

Le Premier ministre de la Macédoine du Nord, Zoran Zaev, a averti que ses concitoyens n’accepteraient pas indéfiniment d’être rejetés, alors que Skopje a mis en oeuvre les réformes réclamées par Bruxelles.

Le président de ce pays Stevo Pendarovski a cherché à apaiser les tensions. "Ce n’est pas le temps de l’apathie, des divisions ou des sentiments négatifs envers certains pays", a-t-il averti.

"Tout le monde admet que la Macédoine du Nord a fait beaucoup: elle a changé le nom du pays (afin de régler son différend avec la Grèce), elle a changé sa constitution et a tout fait pour être invitée", a souligné le président lituanien Gitanas Nauseda.

Le dossier sera à nouveau évoqué au printemps 2020 lors du prochain sommet UE-Balkans à Zagreb, a annoncé Donald Tusk. La Croatie, prochaine présidente de l’UE, compte faire de l’élargissement l’une de ses priorités.

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