Joyeux Ramadan J-25: « un bac sans mention, c’est comme un passeport sans visa »
– Par Narjis Rerhaye –
Le frère de ta desk share a obtenu son bac. Il se destine probablement à de grandes études. Tu ne veux même pas le savoir. Tu t’en fous. Aujourd’hui tu es en mode Robin des bois. Tu penses aux autres. Ceux qui décrochent en cours de route, faute de moyens. Ceux qui sont condamnés à échouer, à vivoter, à tuer le temps en l’absence de perspective d’avenir. « Oh la la, que de grandes phrases ! Tu ne peux pas prendre à ton compte tous les échecs d’une politique publique », te balance ta cousine la communicante. Depuis qu’elle soutient le hirak, elle est a développé un esprit critique qui surprend toute ta tribu. « Elle va finir par être virée celle-là. A Casa, les boîtes de com’ ne font pas de politique. Ce n’est pas bon pour les affaires », prédit ta mère qui en a touché un mot à ta tante. Ta tante, cette inconsciente, n’en a cure. Pour l’heure, elle est tellement fière de voir sa fille se découvrir une conscience…
Robin des bois ou pas, tu penses toi à tous les abandons scolaires et à ces élèves qui n’apprennent rien ou si mal sur les bancs de l’école, du collège et du lycée. Tu inspires profondément et tu tapotes sur ton statut « une école délabrée ne peut que produire du savoir délabré ». Tu n’as jamais été aussi bon que lorsque tu déprimes. Et la raison de ta déprime, c’est Driss Jettou -un homme bien pourtant- qui en est responsable et son fameux rapport de la cour des comptes sur l’état de l’éducation nationale. Plus de 9000 salles délabrées servent de salles de classe. 4 élèves sur 10 sont scolarisés dans des classes de plus de 40 élèves. Tu ne veux même pas penser à ces dizaines et dizaines d’écoles sans toilettes ni à ces 200.000 élèves ont quitté l’école au cours de cette année scolaire.
La voix aigue de ta desk share annonçant au tout venant la réussite de son frère tout nouveau bachelier f’l’mica t’insupporte de plus en plus. Ta déprime crève l’écran. Tu lèves la séance, prétexte une migraine-de-folie pour aller trouver refuge chez ta mère. A la veille de la nuit du destin, il n’y a pas de risque, elle ne parlera ni de l’enseignement, ni du hirak, ni du gouvernement, ni de Jettou mais du couscous à la tfaya qu’elle compte faire demain. Les mères, y a que ça de vrai !