Jean-Paul Dubois décroche le prix Goncourt

La tempête Amélie (Nothomb) n’a pas touché l’Académie Goncourt qui a choisi lundi par 6 voix contre 4 d’attribuer le plus prestigieux des prix littéraires du monde francophone à Jean-Paul Dubois.

L’auteur de "Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon" (L’Olivier) a été choisi au 2e tour par 6 voix contre 4 à Amélie Nothomb, autrice de "Soif", a annoncé le secrétaire général du Goncourt, Didier Decoin.

Le Renaudot, décerné dans la foulée du Goncourt, a été attribué à Sylvain Tesson pour "La panthère des neiges" (Gallimard). Comme l’an dernier, le jury du Renaudot a récompensé un auteur qui ne figurait pas dans sa liste de finalistes.

– "Ta vie est foutue" –

"Tout arrive! C’est adorable…", a déclaré Jean-Paul Dubois en arrivant chez Drouant, le restaurant où est décerné le Goncourt depuis 1914. "Je ne suis pas fait pour ce genre de choses, ce n’est pas mon univers. C’est assez irréel", a ajouté l’écrivain accompagné de son éditeur Olivier Cohen.

C’est la première fois de son histoire que l’éditeur (groupe Media Participations) remporte le Goncourt.

"Maintenant, ta vie est foutue", a lancé avec le sourire Didier Decoin à l’écrivain quand il a rejoint le salon Goncourt, la salle où se réunissent traditionnellement les dix jurés du Goncourt. Didier Decoin faisait allusion à la notoriété qui ne manquera pas de s’abattre sur le discret écrivain toulousain.

Pour exprimer son émotion, l’écrivain a choisi de citer une phrase du footballeur nord-irlandais George Best. "Je suis vraiment heureux, flatté d’être ici devant vous, je suis surtout heureux de me tenir debout".

"J’éprouve un étrange bonheur, une joie bizarre", a-t-il dit.

– "La chance" –

"Si les romans de Jean-Paul Dubois étaient traduits de l’anglais, il aurait en France un statut comparable à ceux de John Irving ou de William Boyd", dit de lui Bernard Pivot, le président de l’académie Goncourt.

Modeste, le romancier a estimé que sa récompense était due à "la chance". "On ne mérite jamais le prix Goncourt, on a la chance de l’avoir. Ça tombe sur la personne qui est sur un alignement de planètes cette année-là".

Le 22e titre de Jean-Paul Dubois, publié chez L’Olivier (256 pages, 19 euros) raconte l’histoire d’un homme, Paul Hansen, qui croupit depuis deux ans dans une prison de Bordeaux – qui comme son nom ne l’indique pas se trouve au Québec ! – quand le lecteur le rencontre.

Paul Hansen, le narrateur, va nous raconter comment il en est arrivé à partager une cellule avec un Hells Angel, formidable personnage, effrayant et touchant, qui ne rêve que d’"ouvrir en deux" ceux qui ne lui reviennent pas mais est terrorisé par les souris ou les ciseaux du coiffeur.

Paul Hansen est un type bien, doux et bienveillant. Le lecteur apprendra à la fin du roman pourquoi un tel homme est en prison. Entre temps, remonteront à la surface des souvenirs d’un bonheur anéanti. Ce que raconte Jean-Paul Dubois – une constance dans la plupart de ses livres -, c’est l’histoire d’un monde en train de disparaître pour être remplacé par un autre dominé par l’injustice et le mépris.

– Renaudot inattendu –

Le livre s’est écoulé à 46.000 exemplaires depuis sa sortie en août mais le Goncourt devrait accroître ses ventes considérablement.

Le prix Goncourt reste le prix littéraire le plus prescripteur pour les ventes de romans. Selon une étude de l’institut GfK pour le magazine Livres Hebdo, sur la période 2014-2018, un prix Goncourt s’écoule en moyenne à 367.100 exemplaires, devant le Goncourt des lycéens (314.000 exemplaires) et le Renaudot (219.800 exemplaires).

Jean-Paul Dubois avait reçu le prix Femina et le prix du roman Fnac en 2004 pour "Une vie française". C’est la deuxième fois qu’il figurait dans une sélection du Goncourt : en 2016, le jury avait finalement écarté son roman "La succession" lors du second tour.

Comme l’an dernier, le jury du prix Renaudot a accordé son prix à un auteur qui ne figurait pas dans sa sélection : Sylvain Tesson a été récompensé pour "La panthère des neiges", publié le 10 octobre chez Gallimard.

L’écrivain l’a emporté au 2e tour par 6 voix contre 2 pour "La part du fils" (Stock) de Jean Luc Coatalem et 2 voix à "Pourquoi tu danses quand tu marches ?" (JC Lattès) de l’écrivain franco-djiboutien Abdourahman A. Waberi.

"Je suis sorti du chapeau comme un lapin. Je me sens comme un panthère qui déboule dans un monde en ordre, un éléphant dans un magasin de porcelaine…", a confié l’écrivain à l’AFP.

Le récit de Sylvain Tesson s’est déjà écoulé à 50.000 exemplaires selon l’institut GfK cité par le magazine professionnel Livres Hebdo.

"Cher cinéma français" (Albin Michel) d’Eric Neuhoff a été récompensé par le Renaudot essai.

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