Au Maroc, un procès exemplaire pour sanctionner les meurtriers de la route

Narjis Rerhaye (A Rabat)

C’est le procès contre l’impunité des tueurs au volant qui a tenu en haleine, cet été, les Casablancais. Un jeune automobiliste de 18 ans, qui venait tout juste d’obtenir son permis de conduire tue une femme qui faisait sa marche sur la corniche de Casablanca. Le jeune homme prend la fuite avant de percuter un camion. Ce qui met fin à sa course meurtrière.

L’affaire fait grand bruit. La marcheuse qui meurt à l’hôpital, la jambe sectionnée à cause de la violence du choc, est une figure connue de la société civile et l’épouse du défunt Mohamed Mjid. A 87 ans, Pierrette Mjid perd la vie dans des circonstances tragiques en cette première semaine d’août 2018.

Sous le choc, Soufiane Mjid, le fils de la défunte, se bat pour un procès exemplaire. Quelques minutes seulement après que Pierrette ait rendu son dernier souffle, le fils meurtri entame un long parcours du combattant où la douleur se mêle à l’incompréhension. Procès verbaux de la police, expertises, rapports médicaux, tribunaux. « Pendant 67 ans, ma mère s’est battue contre l’impunité. Pas question que je laisse tomber », annonçait Soufiane Mjid sur sa page FB.

Le fils a de qui tenir. Son père, l’ancien résistant Mohamed Mjid a consacré toute une vie à la lutte contre l’injustice, l’impunité, les privilèges.

En première instance le jeune conducteur qui était au volant d’une trop grande Range rover est condamné à 2 mois de prison et 10 000 dirhams. Pour la famille et les proches de Pierrette Mjid, l’incompréhension est totale . Le délit de fuite n’a été retenu par les juges. Pas plus que le premier accident provoqué quelques mois plus tôt par ce conducteur.

Le verdit rendu cette semaine par la cour d’appel a sonné comme la réparation à une injustice. 10 mois de prison dont 5 ferme et une amende 30 000 dhs. Les Mjid et la ténacité de leur fils ont eu raison de l’impunité ambiante. La vie est trop précieuse pour la laisser être monnayée, lâche Soufiane qui a refusé toute forme de dédommagements proposés par les parents du conducteur faucheur de vie.

Dans ce procès qui a tenu en haleine les réseaux sociaux –Soufiane en a fait un espace de mobilisation pour que justice soit faite à sa défunte mère- c’est la justice qui a été mise à l’épreuve dans son traitement des accidents de la route mortels. Le fils éploré s’est battu jusqu’au bout pour obtenir un verdict exemplaire qui ferait office de jurisprudence. Que de morts tombés sur les routes marocaines à cause de l’imprudence et l’inconséquence d’automobilistes qui ne risquent pas grand-chose. « Cela ne me rendra pas ma mère. Mais on ne tuera plus impunément sur les routes ».

En 2017, 3500 personnes sont mortes au Maroc à cause d’un accident de la circulation.

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