Trump pousse Ryad à jouer un plus grand rôle militaire face à l’Iran

En annonçant des contrats d’armement d’un montant record de 110 milliards de dollars avec l’Arabie saoudite, Donald Trump pousse Ryad à jouer un plus grand rôle militaire dans la région, en premier lieu face à l’Iran.

Les Etats-Unis prévoient notamment de vendre à l’Arabie saoudite le système antimissile balistique ultra-sophistiqué THAAD, que Washington vient d’installer en Corée du Sud contre les fusées de Pyongyang. Ce système d’un prix de plusieurs milliards de dollars, produit à quelques exemplaires seulement, doit apporter à l’Arabie une protection contre les missiles balistiques iraniens. A très court terme, Washington va aussi reprendre la livraison à Ryad de bombes à guidage de précision, que l’administration Obama avait suspendue.

Autant de démonstration du soutien américain à la campagne militaire de l’Arabie saoudite au Yémen contre les rebelles Houthis soutenus par l’Iran, malgré les critiques internationales sur les morts de civils dans les bombardements saoudiens.

"Il y a un signal clair" de l’administration Trump "qu’il va y avoir un niveau différent de coopération" avec l’administration saoudienne, après les tensions de la fin de l’ère Obama, explique à l’AFP John Cappello, un expert de la Fondation pour la défense des démocraties, un cercle de réflexion plutôt conservateur de Washington.

Comme en Europe ou en Asie, l’administration Trump veut voir ses alliés assumer un rôle plus large dans leur propre sécurité, et moins compter sur le soutien de l’armée américaine, explique-t-il. C’est la logique qui est à l’oeuvre avec l’Arabie saoudite, selon lui. "En augmentant les capacités militaires saoudiennes", les Etats-Unis veulent "probablement voir les Saoudiens prendre une plus grande part du fardeau" face aux menaces régionales, et en premier lieu celle de l’Iran, explique-t-il.

Illustration de cette approche, l’accord de Ryad prévoit ainsi la livraison à la marine saoudienne de plusieurs navires de combat conçus par Lockheed Martin. Pour les Américains, il s’agit de renforcer la dissuasion face à la marine iranienne, considérée comme une menace pour la liberté de circulation dans les détroits stratégiques d’Ormuz dans le Golfe et de Bab-el-Mandeb en mer Rouge.

Une "problématique clé" pour l’administration américaine, souligne Tony Cordesman, un expert du centre de réflexion CSIS à Washington.

Pour John Cappello, Washington pousse ses armes dans tous les pays du Golfe avec l’espoir de voir ces pays augmenter leur inter-opérabilité militaire, pour pouvoir constituer une structure de défense collective face à l’Iran. L’accord de Ryad est "un pas" pour progresser vers cette alliance régionale que Washington appelle de ses voeux, a-t-il expliqué. "Il y a quelques semaines, des responsables de l’administration américaine ont évoqué la possibilité d’un Otan arabe", rappelle-t-il aussi.

Les experts relativisent toutefois la portée des décisions annoncées à Ryad, notant que le contenu de l’accord et son calendrier d’application restent encore très flou. Pour Tony Cordesman, l’accord marque en fait un retour à la normale après les tensions de la dernière année du président Barack Obama.

Un armement reste toutefois exclu des discussions américano-saoudiennes: l’avion furtif F-35, dont les Saoudiens et d’autres pays du Golfe rêveraient de pouvoir s’équiper. Israël, qui participe au programme F-35 et vient de recevoir ses premiers appareils, s’oppose à ce que les pays arabes accèdent à ce bijou de technologie.

"Il y aurait des moyens de vendre le F-35" à des pays du Golfe "qui réduiraient le danger potentiel pour Israël", note Loren Thompson, du Lexington Institute, un cercle de réflexion proche de l’industrie de défense américaine. "Mais je ne crois pas que l’administration Trump soit prête à poursuivre cette option".

Atlasinfo avec AFP

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