Le ministre Emmanuel Macron en sursis après son discours « antisystème »

Le ministre français de l’Economie Emmanuel Macron semblait mercredi en sursis au lendemain de son discours « antisystème » aux accents de campagne devant des milliers de partisans, qui n’a pas épargné le président socialiste François Hollande.

Le chef de l’Etat aura l’occasion de s’exprimer sur le sort de son turbulent ministre à l’occasion de sa traditionnelle interview jeudi, jour de la fête nationale, a annoncé le porte-parole du gouvernement Stéphane Le Foll.

Le porte-parole a assuré que le sujet "n’a pas été évoqué" au conseil des ministres mercredi matin. Mais François Hollande peut difficilement ignorer le défi lancé par un pilier du gouvernement, qui lui doit sa carrière politique, à dix mois de la présidentielle.

"Il est temps que ça s’arrête", avait lâché le Premier ministre Manuel Valls mardi, quelques heures avant le meeting du trublion de son gouvernement. "On a besoin de cohérence au niveau du gouvernement", a renchéri Stéphane Le Foll.

Le quotidien régional L’Alsace estimait mercredi qu’il sera "difficile à Emmanuel Macron de rester plus longtemps dans un gouvernement dont il s’est définitivement désolidarisé", résumant l’opinion de l’ensemble des médias.

Mardi soir, devant un public plutôt jeune et éduqué, Emmanuel Macron a "remercié" François Hollande de l’avoir nommé au gouvernement en août 2014. Mais il a épinglé en creux sa conduite des affaires, décrivant un pays "usé par les promesses non tenues".

Evoquant ses deux années au gouvernement, il a regretté de ne pas avoir pu conduire toutes les réformes qu’il aurait souhaitées. "J’ai constaté à quel point le système ne voulait pas changer. Je n’ai pas réussi à faire certaines choses", a-t-il dit.

Il a affirmé sa volonté d’"écrire une nouvelle histoire" dans un monde bouleversé par les mutations technologiques.

Le mouvement qu’il a lancé, baptisé "En Marche!", "nous le porterons ensemble jusqu’à 2017 et jusqu’à la victoire", a-t-il assuré, sans toutefois franchir le Rubicon de l’annonce de sa candidature. Ses partisans l’ont fait pour lui, scandant "Macron président!".

Alors que la gauche est à bout de souffle après quatre ans de pouvoir socialiste, Emmanuel Macron a revendiqué l’héritage de cette "famille" politique mais a regretté qu’"une partie" d’entre elle ait "peur d’un monde qui change". Il a présenté les deux "piliers" d’un programme futur: "libérer le pays" de ses pesanteurs économiques et assurer des "filets de sécurité" pour sa population.

Et il a affiché son ouverture sur les questions de société (identité nationale, laïcité), se démarquant de Manuel Valls qui souhaite interdire le port du voile à l’université.

Si M. Macron bénéficie du soutien de quelques élus ou anciens ministres socialistes, sa sortie du bois irrite nombre de ses collègues. "Quand on est ministre, on parle au présent, on agit, on ne pense pas au futur", a réagi mercredi le ministre de la Justice Jean-Jacques Urvoas, un proche du chef du gouvernement.

A défaut de viser ses orientations encore en pointillé, les commentaires se concentraient mercredi sur la posture "anti-système" d’Emmanuel Macron, ancien haut fonctionnaire issu des écoles de l’élite et passé par la banque Rothschild avant d’atterrir en politique.

"J’ai trouvé un peu faciles les critiques anti-système, quand on est totalement du système", a lancé la ministre écologiste du Logement Emmanuelle Cosse. "Je vois qu’il attire des gens qui sont un peu éloignés de la politique et je pense qu’il faut regarder ça très positivement", a-t-elle toutefois estimé.

Emmanuel Macron s’est aussi attiré les foudres de la gauche de la gauche. Quelque 200 personnes étaient venues mardi soir manifester à l’entrée du meeting pour conspuer les participants aux cris de "les bourgeois, les banquiers, c’est par là".

Le ministre a bien tenté dans son discours de s’adresser à "la France qui souffre", aux couches populaires qui subissent de plein fouet les bouleversements économiques, mais "il n’a pas encore trouvé le vocabulaire ni le ton pour rallier" cette France là, remarquait mercredi l’éditorialiste du Monde.

Selon le quotidien communiste L’Humanité, "il n’aura offert qu’un médiocre spectacle de tout ce que la communication politique peut faire de pire".

(Source AFP)

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