« Le Maroc, l’une des meilleures destinations pour les investisseurs étrangers »

Khalid Idrissi Kaitouni, Directeur de l’Appui aux Investisseurs et de la Création d’Entreprise de la Chambre française de Commerce et d’Industrie du Maroc, analyse pour Atlasinfo l’attractivié du Maroc pour les investisseurs étrangers. Il revient également sur la place des entreprises françaises sur un marché de plus en plus concurrentiel.

Atlasinfo: L’économie marocaine a fait preuve de résistance face à la crise financière et les bouleversements régionaux liés au printemps arabe : comment l’expliquez-vous ?

Khalid Idrissi Kaitouni: D’abord, le Maroc a depuis une dizaine d’années, depuis le début des années 2000, un niveau de croissance assez important, en moyenne autour de 5%. Le Maroc a mis également en place un certain nombre de réformes, qu’elles soient financières ou au niveau de l’Office des changes, pour justement pallier et éviter cette crise. Grâce à l’Office des changes et à la Banque du Maroc, le pays a réussi à diminuer les effets de la crise et à passer entre les filets de cette crise qui a touché bon nombre de pays, dont européens. Mais aujourd’hui, on est dans une phase où on est en train de sentir les effets de la crise, bien qu’on ait évité le pire.

Constatez-vous un recul des investissements ou de projets lié à la crise en zone euro ?

Les investissements publics ne reculent pas. Au contraire, ils sont même confirmés. L’Etat marocain a mis en place un certain nombre de gros projets qui sont maintenus et qui continuent leur chemin, bien bordés financièrement. Sur ce point là, il n’y a aucun problème. Ce qu’on constate par contre, c’est un recul de l’investissement privé pour des raisons simples. Le Maroc a 60% de ses échanges avec l’Union européenne. Nos partenaires en France ou en Europe sont bien entendu en situation de difficulté actuellement. Donc ils reportent la décision d’investir. Le Maroc, par rapport aux autres pays du Sud de la Méditerranée, reste de loin une des meilleures destinations des investissements et des IDE (investissements directs étrangers).

De grands groupes, tels que Renault Nissan, Danone, EADS, Safran ou encore le groupe canadien Bombardier, sont de plus en plus nombreux à s’installer au Maroc. Pourquoi le Maroc est-il aussi attractif ?

Le Maroc est attractif parce qu’il a une politique de réglementation de l’investissement qui est l’une des plus favorables de la région ! L’investissement est libre au Maroc et l’investisseur peut détenir la totalité de son capital. C’est quelque chose d’unique et de très libéral comparé à d’autres pays de la région, même les plus développés comme les Emirats Unis, qui imposent un partenariat local aux investisseurs étrangers. Donc cela donne à réfléchir ! Les investisseurs étrangers sont réticents à aller investir dans un pays et se voir obliger de prendre un local à 50%, 30% en fonction de la réglementation du pays. Au Maroc, l’investisseur étranger est libre de détenir la totalité de son capital. Plus encore, une fois qu’il a fait des bénéfices, net d’impôts bien entendu, ces bénéfices sont transférables en France ou à l’étranger, sans limitation de montant ! Ce sont des garanties qui sont très importantes pour l’investisseur et qui lui permet d’avoir une visibilité.
A côté de ça, le choix d’investisseurs comme Renault ou Bombardier qui va venir dans le secteur aéronautique, se fait sur deux points très importants. D’abord, le premier critère de choix pour l’implantation dans un pays, c’estla qualification du personnel.Et au Maroc, on trouve en abondance des personnes qualifiées. Le deuxième critère est celui du coût dans tous les sens du terme, c’est-à-dire celui du foncier, de la fiscalité, des charges sociales et de la main-d’œuvre. Ce sont ces deux points que regarde un investisseur avant de se positionner sur un marché. Et sur ces points-là, le Maroc est très compétitif.

Le port Tanger-Med va faire du Maroc un hub régional. Quel bilan tirez-vous de ce projet ?

C’est déjà le cas ! Le port de Tanger est un hub, il l’a montré et démontré. Et c’est un projet qui s’est non seulement bien développé mais qui a entrainé avec lui toute une région.

Comment a évolué ces dernières années l’investissement français au Maroc ? Sur quels projets travaillez-vous actuellement ?

Les entreprises françaises recensées au Maroc sont autour de 900-950, mais on les estime à environ 1200. Nous travaillons sur l’accompagnement des investisseurs français au Maroc. Les projets évoluent bien. Si on regarde les 3-4 dernières années, on a une véritable demande de l’investisseur français sur le Maroc et l’implantation est réelle. Ces implantations ont accompagné de gros projets. Quand Renault s’est positionné sur Tanger, des fournisseurs français de Renault de rang 1sont venus l’accompagner. On est en train de voir la même chose pour le secteur du ferroviaire, avec la construction de la ligne TGVqui doit relier Casablanca à Tanger. Alstom est venu accompagné d’un certain nombre d’entreprises françaises qui sont dans le secteur du ferroviaire. Donc cette politique de grands projets permet de faire venir un partenaire principal, comme Renault ou Alstom, et derrière, un certain nombre d’entreprises les suivent pour réaliser ces projets. Donc il y a effectivement beaucoup d’entreprises françaises qui se positionnent sur le Maroc. La France reste le premier investisseur étranger et les relations franco-marocaines sont fortes, quelle que soit la couleur politique au pouvoir.

Les Français sont bien positionnés mais la concurrence est là aussi?

Si les Français sont bien positionnés au Maroc, il faut qu’ils soient vigilants. Ils ne doivent pas penser que le Maroc est un terrain acquis, qu’il suffise de se positionner comme investisseur français pour obtenir un marché. Il faut se battre, il y a une vraie concurrence. Elle est surtout espagnole, mais aussi italienne, allemande. Et on voit d’autres concurrents se positionner sur le Maroc comme les Turcs et d’autres économies émergentes. Le Maroc les intéresse. Les Français doivent donc être un peu plus accrocheurs, présents et vigilants par rapport à la concurrence. C’est ce qu’on leur conseille quand ils viennent nous voir.

Sous l’impulsion du roi Mohammed VI, de grands projets sont en cours actuellement au Maroc. A quels autres grands projets la France participe-t-elle ?

Les grands groupes français sont bien présents et on les voit régulièrement sur les grands chantiers marocains. EDF a remporté un grand chantier dans la région de Taza qui concerne l’énergie renouvelable, essentiellement l’éolien. Les projets dans le domaine de l’énergie renouvelable sont énormes, très importants. Que ce soit dans le secteur de l’énergie solaire à Ain Beni Mathar à la frontière algérienne ou encore du côté de Ouarzazate, de l’éolien du coté de Taza ou d’Essaouira, le Maroc a lancé sous l’impulsion de S.M le roi Mohammed VI énormément de projets. Et il y a d’autres projets qui s’annoncent dans ce secteur et les entreprises françaises ont une bonne part dans ces projets.

Pour compléter le panorama, les compagnies françaises sont également présentes dans l’agro-alimentaire et le secteur agricole. Grâce au plan Maroc Vert, beaucoup d’entreprises se sont positionnées dans le cadre de concessions de terrains agricoles pour développer des cultures avec le savoir-faire français. Au niveau du Salon de l’Agriculture de Meknès, tous les ans, nous accompagnons en tant que Chambre et en tant que délégataire des services d’Ubifrance une bonne centaine d’entreprises agricoles françaises. Donc il y a un véritable attrait du Maroc, non seulement dans les domaines de l’énergie et de l’industrie, mais également dans le secteur agricole et de l’agro-alimentaire.

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