Visite princière de Macron en Andorre, entre retraite à 65 ans, avantages fiscaux et anti-avortement

"Vive le prince !": accueilli par une foule d’enfants agitant des drapeaux andorrans, Emmanuel Macron a fait vendredi la tournée des sept paroisses d’Andorre, minuscule Etat entre la France et l’Espagne qui allie avantages fiscaux, interdiction de l’avortement et retraite à 65 ans.

"Co-prince" d’Andorre au nom d’une tradition qui remonte à Charlemagne, le chef de l’Etat a visité les paroisses (communes), encaissés au milieu des montagnes pyrénéennes auxquelles il est très attaché, savourant le plaisir de saluer longuement les centaines d’écoliers qui l’acclamaient avec ferveur. Il a passé plusieurs heures à signer leurs drapeaux et même leurs baskets ou leur avant-bras, assumant sans complexe sa "charge" princière et son histoire séculaire.

"Il y aura pendant longtemps deux visages bienveillants qui vous regardent", a-t-il lancé à l’un des maires, en référence aux portraits des deux co-princes qui ornent les mairies, le sien et celui de l’archevêque d’Urgell (Catalogne).

L’actualité française l’a rattrapé lorsqu’un couple de retraités l’a interpellé pour lui vanter le régime de retraites d’Andorre, un système à points avec un âge de départ à 65 ans.

"Le système a été créé en 1968, avec l’aide d’experts français qui sont venus en Andorre et ont dit qu’il ne fallait pas répéter les erreurs du système français. Et qu’il était préférable d’avoir un âge de départ à 65 ans et un système à points", ont-ils expliqué.

"Et vous vous en portez bien ? Et c’est lisible pour les gens ?", leur a demandé avec intérêt le Président. "Oui oui", lui a assuré le mari, "et c’est très équitable".

Ici "il y a un consensus qui s’est créé". Mais "quand on passe d’un système à l’autre, la peur parfois est là", a conclu M. Macron alors qu’au même moment en France les personnels de la RATP lançaient la première offensive syndicale contre la réforme des retraites avec une grève très suivie.

Interrogé dans l’après-midi sur cette grève, le chef de l’Etat a répondu: "Je ne parle pas des sujets non-andorrans" lors de ce déplacement qu’il a comparé à un "pèlerinage".

"Enfant des Pyrénées"

Tout en couvrant ses hôtes de louanges sur la beauté de leur territoire, le chef de l’Etat, qui se définit comme "un enfant des Pyrénées", s’est permis une critique voilée de la fiscalité très allégée que continue à appliquer Andorre, même si l’OCDE l’a rayée de sa "liste grise" des paradis fiscaux depuis 2010.

Il les a aussi encouragés à "choisir l’Europe" en menant à terme les difficiles négociations engagées depuis 2015 sur un accord d’association avec l’UE, la voie vers "un nouveau modèle, qui ne repose pas sur des exemptions et des facilités mais sur la beauté des paysages, la force du tissu économique".

"Je crois que ce choix d’ouverture est le bon. Andorre est européenne, évidemment", a-t-il lancé le soir devant plusieurs centaines d’Andorrans.

Avant lui, Nicolas Sarkozy en 2009 avait mis la pression pour que la principauté cesse son dumping fiscal, menaçant même de démissionner de sa charge de co-prince. Andorre a depuis introduit des taxes modestes sur les sociétés et les revenus et signé une convention fiscale avec l’OCDE. L’Etat a également levé le secret bancaire pour les ressortissants européens.

Quant à l’interdiction de l’avortement, qui oblige les Andorranes à se rendre en Espagne ou en France pour interrompre une grossesse, ce n’est pas au co-prince de décider pour les Andorrans, a-t-il plaidé sous les applaudissements de la population.

La députée du Val-de-Marne Albane Gaillot, qui vient de se mettre en retrait de LREM, l’avait interpellé jeudi pour lui demander d’intervenir sur ce sujet.

"J’ai toujours défendu le droit des femmes à disposer de leur corps et en tant que président français j’ai fait de l’égalité hommes-femmes une priorité", mais "en tant que co-prince, qui serais-je pour dire à votre peuple ce qu’il convient de faire, vous qui démocratiquement choisissez vos lois ? Il vous appartiendra lors d’élections d’obtenir la majorité qui vous permettra d’obtenir ces évolutions", a-t-il déclaré à l’adresse de militantes pro-avortement qu’il avait rencontrées quelques instants plus tôt.

"Nous continuerons dans les hôpitaux en France à accueillir les situations qui nécessitent cet engagement", a-t-il précisé devant la presse.

Il a enfin souhaité soutenir la langue française en Andorre et promis de rétablir des services consulaires pour les résidents français.

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite