Violences aux frontières du Venezuela pour défendre l’aide humanitaire

L’armée a répliqué avec violence samedi aux frontières du Venezuela où les partisans de l’opposant Juan Guaido s’étaient mobilisés, en vain, pour faire passer une aide humanitaire que refuse le président Nicolas Maduro, dénonçant une tentative déguisée d’intervention américaine.

Au moins deux personnes, dont un garçon de 14 ans, ont été tuées par balle, et 31 autres blessées dans des heurts à la frontière entre le Brésil et le Venezuela. Une ONG locale, Foro Pena, a accusé les militaires vénézuéliens d’avoir ouvert le feu sur la foule mobilisée pour exiger le passage des convois humanitaires.

Une femme avait déjà été tuée au même endroit vendredi.

Côté colombien, 42 manifestants ont été blessés alors qu’ils tentaient de forcer le passage d’un pont bloqué par les forces vénézuéliennes, selon les secours sur place.

camions brulés

En outre, selon les services colombiens des l’immigration deux camions d’aide et leur cargaison ont été incendiés à la frontière avec la Colombie. Une députée pro-Guaido, Gaby Arellano, a accusé les forces de l’ordre vénézuéliennes de les avoir incendiés sur ordre du président Maduro.

Juan Guaido, 35 ans, reconnu comme président par intérim par une cinquantaine de pays, avait fixé la journée de samedi comme date-butoir pour la livraison de cette aide stockée principalement en Colombie et au Brésil.

Il a lancé l’épreuve de force à la mi-journée en annonçant sur Twitter l’entrée au Venezuela d’un premier convoi via la frontière brésilienne.

"Attention Venezuela: nous annonçons officiellement QU’EST ENTRE le premier chargement d’aide humanitaire depuis notre frontière avec le Brésil. C’est un grand succès, Venezuela !" a-t-il indiqué depuis la ville frontalière de Cucuta, en Colombie.

Mais ces efforts sont restés vains et les cargaisons restent pour le moment stationnées aux portes du pays.

Des journalistes de l’AFP dans la ville frontalière de Pacaraima (nord du Brésil) ont constaté que les deux camions chargés d’aide envoyés par le Brésil avaient fait marche arrière en début de soirée et regagné la ville: "Guaido nous a donné l’ordre de préserver les produits. Nous voulons passer de manière pacifique" a expliqué par mégaphone un responsable des opérations. "Notre bien le plus précieux, c’est notre vie, nous ne voulons pas nous faire massacrer".

Alors que la tension montait sur le terrain, deux marches concurrentes se tenaient à Caracas, l’une en blanc, en soutien à M. Guaido et l’autre, en rouge, pour M. Maduro.

Plusieurs milliers de partisans de M. Guaido se sont retrouvés devant l’aéroport militaire de la Carlota pour appeler l’armée à laisser passer l’aide.

M. Maduro s’exprimant devant des milliers de ses partisans a annoncé la rupture des relations diplomatiques avec "le gouvernement fasciste de Colombie" et a donné 24 heures "à l’ambassadeur et aux consuls" pour quitter le Venezuela en lançant: "Dehors, les oligarques !".

Cependant, pour le président colombien Ivan Duque, traité de "diable" par M. Maduro, Juan Guaido est le seul chef de l’Etat vénézuélien en exercice: sur Twitter, sa vice-présidente, Marta Lucia Ramirez, a rappelé que "notre gouvernement n’a pas désigné d’ambassadeur (à Caracas) et ne reconnait pas celui de Maduro dont le mandat s’est achevé le 9 janvier" – à la veille de son deuxième mandat controversé.

Cette escalade survient après de nombreuses violences qui ont éclaté à la frontière entre les deux pays, en particulier quand quatre camions ont tenté de forcer le passage, soutenus par la foule qui exigeait la libre circulation des convois humanitaires.

Pour bloquer l’entrée des convois, Caracas a ordonné la fermeture vendredi des trois principaux ponts frontaliers. Un quatrième, celui de Tienditas, est bloqué avec des conteneurs par l’armée depuis début février.

"Bienvenue du bon côté de l’histoire"

Défiant le leader chaviste, M. Guaido a bravé vendredi un ordre judiciaire lui interdisant de quitter le territoire national et affirmé que l’armée, pilier du régime chaviste, avait "participé" à cette opération.

"L’appel aux forces armées est très clair: bienvenue du bon côté de l’histoire, bienvenus les militaires qui aujourd’hui se mettent du côté de la Constitution", a-t-il ajouté devant la presse.

Selon les services migratoires colombiens, 23 membres des services de sécurité, dont une vintagines de militaires vénézuéliens ont déserté samedi et ont rejoint Cucuta. L’un des militaires s’est présenté comme "le major Hugo Parra", en uniforme de la Force armée nationale bolivarienne.

"Je reconnais notre président Juan Guaido et je lutterai avec le peuple vénézuélien à chaque étape", a déclaré l’officier devant la presse.

Pour lancer l’opération humanitaire, M Guaido était entouré de M. Duque ainsi que des présidents du Chili, Sebastián Piñera, du Paraguay, Mario Abdo, et du secrétaire général de l’organisation des Etats américains, (OEA) Luis Almagro.

Parmi les civils massés près des ponts avec des pancartes "Entrez du bon côté de l’Histoire" pour exiger l’aide, Neyerson Cisneros, un psychologue de 29 ans a expliqué à l’AFP: "Je suis venu apporter mon grain de sable à la lutte. C’est un moment historique, les militaires vont céder, j’ai confiance".

Outre la fermeture des grands ponts avec la Colombie et celle de la frontière terrestre avec le Brésil, M. Maduro a suspendu les liaisons avec l’île néerlandaise de Curaçao, autre point de stockage de l’aide.

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