Venezuela: droits de l’Homme et crise au menu de la visite de la Haut-Commissaire de l’ONU

La Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, Michelle Bachelet, est arrivée mercredi au Venezuela afin de prendre la mesure de la crise qui secoue le pays, où le bras de fer entre le président Nicolas Maduro et l’opposant Juan Guaido dure depuis cinq mois.

A son arrivée à Caracas, Mme Bachelet a été reçue par le ministre des Affaires étrangères Jorge Arreaza. Elle n’a fait aucune déclaration.

Dans la soirée, le chef de l’Etat a dit dans une allocution télévisée espérer que cette visite soit "pour le meilleur" et que les "recommandations" que Michelle Bachelet formulera permettent au Venezuela d’"aller mieux".

Jusqu’à vendredi, Mme Bachelet doit notamment rencontrer Nicolas Maduro, accusé par l’opposition vénézuélienne de violations des droits de l’homme, mais aussi Juan Guaido, qu’une cinquantaine de pays reconnaissent comme président par intérim de ce pays qui affronte la pire crise de son histoire récente.

Selon les Nations unies, la crise a poussé près de quatre millions de Vénézuéliens à fuir à l’étranger depuis 2015. La récession se traduit, entre autres, par des pénuries de médicaments, d’essence, des coupures de courant à répétition, et surtout une hyperinflation qui devrait atteindre 10.000.000 % cette année, selon les prévisions du FMI.

Un quart des Vénézuéliens, soit 7 millions de personnes, a besoin d’une aide humanitaire urgente, selon l’ONU.

Au plan politique, le Venezuela est dans l’impasse, depuis que Juan Guaido s’est autoproclamé président par intérim le 23 janvier.

Il qualifie à l’envi le chef de l’Etat socialiste d’"usurpateur", réélu en 2018 à l’occasion d’un scrutin présidentiel "frauduleux" lui ayant permis de se maintenir au pouvoir. Nicolas Maduro, à la tête du pays depuis 2013, continue, lui, à jouir du soutien de l’état-major de l’armée, clef de voûte du pouvoir vénézuélien.

M. Maduro affirme que la visite de Michelle Bachelet n’a été possible qu’avec son assentiment.

De son côté, Juan Guaido a estimé mercredi que sa venue prouvait combien Mme Bachelet avait pris la mesure de la "catastrophe" que vit le pays.

Le bureau de Michelle Bachelet a assuré qu’elle rencontrerait également des "victimes d’abus et de violations des droits humains ainsi que leurs proches".

A l’occasion de sa visite, plusieurs ONG ont appelé à manifester vendredi pour dénoncer ces abus. "Tous dans la rue vendredi", a lancé Juan Guaido lors d’une allocution mercredi.
"Exécutions extrajudiciaires"

Michelle Bachelet a elle-même dit avoir été mise au courant de cas d’"usage excessif de la force, d’assassinats, de détentions arbitraires et de torture" de la part des forces de l’ordre au cours des gigantesques manifestations organisées en janvier contre le pouvoir chaviste.

A l’image d’Amnesty International, certains défenseurs des droits de l’homme dénoncent aussi des "exécutions extrajudiciaires".

"Nous espérons que Michelle Bachelet sera en mesure de rencontrer les fils, les frères et les épouses de toutes ces personnes qui ont été exécutées de manière extrajudiciaire et en toute impunité", a déclaré à l’AFP Carolina Jimenez, directrice du programme Recherches pour la région des Amériques chez Amnesty.

Selon l’ONG Foro Penal, 715 personnes sont actuellement détenues pour motifs politiques au Venezuela. Les familles de ces détenus espèrent que la venue de la représentante de l’ONU permettra de contribuer à leur libération.

En prélude à sa visite, les autorités vénézuéliennes, qui nient l’existence de prisonniers politiques, ont libéré lundi soir le député d’opposition Gilber Caro, emprisonné pendant près de deux mois.

Tout en dénonçant la situation des droits de l’homme dans le pays, la Haut-Commissaire a également fustigé à plusieurs reprises les sanctions économiques qu’a prises le gouvernement américain pour mettre Nicolas Maduro sous pression.

Elle s’est ainsi montrée critique concernant l’embargo américain sur le pétrole vénézuélien, qui accentue la crise financière et, par ricochet, frappe durement la population dans ce pays dont 96 % des revenus proviennent précisément de l’exploitation du brut.

Michelle Bachelet va "faire part de son scepticisme quant aux sanctions, mais elle va aussi se faire l’écho de certaines situations qui devraient montrer le régime de Maduro sous un jour très défavorable", prédit Mariano de Alba, un juriste vénézuélien à Washington spécialisé en droit international.

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