Venezuela: Maduro compte sur l’armée face au soutien international à Guaido

Le président vénézuélien Nicolas Maduro comptait jeudi sur l’appui de l’armée pour contrecarrer le soutien international apporté au président du Parlement Juan Guaido autoproclamé la veille « président » par intérim et immédiatement reconnu par les Etats-Unis et leurs alliés dans la région.

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a appelé jeudi au "dialogue" pour empêcher une "escalade menant à un conflit qui serait un désastre pour la population du pays et pour la région".

Dans la nuit de mercredi à jeudi, des foyers de protestation persistaient dans des quartiers populaires comme Petare, dans l’est de Caracas, après deux jours de manifestations meurtrières d’opposants et partisans du président socialiste Maduro.

La Commission interaméricaine des droits de l’homme a décompté 16 morts pour la seule journée de mercredi. L’Observatoire vénézuélien des conflits sociaux (OVCS) a dénombré 13 morts en deux jours depuis mardi. Les manifestations de 2017 qui ont fait 125 morts sont encore dans toutes les mémoires dans ce pays producteur de pétrole en pleine débâcle économique.

"Sauvegarde de la souveraineté"

Le gouvernement a annoncé que le ministre de la Défense, le général Vladimir Padrino Lopez, et les commandants militaires régionaux vont apporter leur "appui au président constitutionnel" et à "la sauvegarde de la souveraineté" du pays.

Mercredi, l’armée, soutien indéfectible de M. Maduro, a rejeté l’autoproclamation de Juan Guaido, 35 ans, président du Parlement contrôlé par l’opposition. "L’armée défend notre Constitution et est garante de la souveraineté nationale", a affirmé le ministre de la Défense.

Le gouvernement compte également sur la Cour suprême qui devrait se réunir jeudi. Peu avant la proclamation de M. Guaido, la plus haute juridiction du pays, composée de fidèles au régime, avait annoncé avoir ordonné une enquête pénale contre les membres du Parlement en les accusant d’usurper les prérogatives du président.

Le Parlement a approuvé mardi une promesse d’"amnistie" aux militaires qui refuseraient de reconnaître le nouveau mandat de Maduro, défiant la Cour suprême laquelle a déclaré nulles toutes ses décisions.

Mercredi, jour anniversaire de la chute de la dictature de Marcos Perez Jimenez en 1958, M. Guaido avait lancé devant des dizaines de milliers de partisans anti-Maduro à Caracas: "je jure d’assumer formellement les compétences de l’exécutif national comme président en exercice du Venezuela pour parvenir (…) à un gouvernement de transition et obtenir des élections libres".

Reconnaissance de Washington

Le président américain Donald Trump, suivi par plusieurs alliés latino-américains dont le Brésil et la Colombie, a immédiatement annoncé reconnaître officiellement M. Guaido comme "président par intérim du Venezuela". L’Union européenne a réclamé des élections "libres", sans suivre à ce stade Washington.

Jeudi, Moscou a critiqué la position des pays occidentaux en estimant qu’elle démontrait "leur attitude envers le droit international".

M. Maduro a immédiatement annoncé la rupture des relations diplomatiques avec Washington, donnant 72 heures à ses représentants diplomatiques pour quitter le pays.

Des milliers de Vénézuéliens exilés ont manifesté mercredi dans les capitales latino-américaines ainsi qu’à Madrid, New York ou Washington dans l’espoir d’une chute prochaine de M. Maduro.

Le secrétaire général de l’Organisation des Etats américains (OEA), Luis Almagro, a assuré à Juan Guaido "sa reconnaissance pour impulser le retour de la démocratie dans ce pays".

Outre le Brésil et la Colombie, neuf autres pays membres du groupe de Lima ont dit reconnaître M. Guaido: Argentine, Canada, Chili, Costa Rica, Guatemala, Honduras, Panama, Paraguay et Pérou.

Le Mexique, lui, a maintenu son soutien à M. Maduro. Cuba a fait part de son "ferme soutien" face à une "tentative de coup d’État". Et le président turc Recep Tayyip Erdogan a téléphoné à M. Maduro pour le soutenir.

M. Maduro a été investi le 10 janvier pour un deuxième mandat, contesté par l’opposition et non reconnu par les Etats-Unis, l’Union européenne et de nombreux pays d’Amérique latine.

Les manifestations de mercredi représentaient la première mobilisation d’ampleur depuis 2017. Selon M. Guaido, l’opposition se prépare à une grande marche pour la première semaine de février.

Lundi, un groupe de 27 militaires, rapidement arrêtés, s’était brièvement soulevé dans une caserne du nord de Caracas. Dans la foulée, une trentaine d’émeutes avaient été enregistrées dans des quartiers populaires de Caracas et sa banlieue.

Mardi, M. Maduro avait dénoncé un appel à "un coup d’Etat fasciste" après la solidarité affichée par le vice-président américain Mike Pence avec l’opposition.

Pour le cabinet d’analyse Eurasia Group, l’appui du haut commandement militaire est un pré-requis pour que M. Guadio puisse mener une transition et "la chute de Maduro ne semble pas imminente".

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