Sondages de l’Élysée : Claude Guéant mis en examen

Comme d’anciens conseillers de l’Élysée, l’ancien ministre de l’Intérieur a été entendu par le juge et mis en examen dans cette enquête ouverte notamment pour favoritisme.

Dans l’affaire des sondages de la présidence de la République et des contrats juteux accordés aux conseillers de Nicolas Sarkozy sous son quinquennat, l’ex-secrétaire général de l’Élysée Claude Guéant était entendu mardi par le juge. À la suite de son audition, le magistrat à décidé le mettre en examen pour "complicité de favoritisme"
Son audition au pôle financier du tribunal de grande instance de Paris avait « démarré vers 10 heures », et la décision n’est tombée qu’en début d’après-midi. Claude Guéant est donc mis en examen dans cette enquête, comme l’ont été l’ex-directrice de cabinet Emmanuelle Mignon ou d’anciens conseillers élyséens.

Un virement douteux de 500 000 euros

Le juge aurait aussi pu le placer sous le statut plus favorable de témoin assisté. Claude Guéant avait été condamné mi-novembre à deux ans de prison avec sursis et cinq ans d’interdiction de toute fonction publique à l’issue du procès sur les primes en liquide du ministère de l’Intérieur, alors qu’il dirigeait le cabinet de Nicolas Sarkozy (2002-2004). Il a fait appel.

Il est aussi mis en examen pour faux et blanchiment de fraude fiscale dans l’affaire des soupçons de financement libyen de la campagne Sarkozy en 2007. En cause, la vente alléguée de tableaux pour expliquer un virement de 500 000 euros sur son compte.
Une plainte d’Anticor

Au coeur du dossier des sondages, les contrats passés sans appel d’offres à partir de 2007 avec les sociétés de Patrick Buisson (Publifact puis Publiopinion) et de Pierre Giacometti, tous deux mis en examen pour recel de favoritisme. Avec des soupçons supplémentaires d’avoir détourné des fonds publics pour le premier, ex-patron du journal d’extrême droite Minute qui s’était imposé comme l’un des conseillers les plus influents du président.
La convention signée par Patrick Buisson avec l’Élysée prévoyait d’une part du conseil rémunéré 10 000 euros par mois et octroyait d’autre part à Publifact « l’exécution de sondages », à sa liberté d’appréciation et avec les instituts de son choix. Dans un rapport de 2009, qui allait conduire l’association Anticor à porter plainte, la Cour des comptes dénonçait le caractère « exorbitant » de cette convention, l’Élysée n’ayant « ni la maîtrise ni le contrôle » des dépenses.

« L’appétence » de Sarkozy pour les sondages

Au final, les enquêteurs ont retrouvé la trace de 235 sondages achetés par le cabinet de Patrick Buisson et revendus à la présidence entre 2007 et 2009, avec une marge d’environ 1,4 million d’euros, soit entre 65 % et 70 %. Le juge l’a mis en examen pour le détournement de ces fonds publics. Certains des sondages revendus avaient déjà été diffusés dans la presse.
« Mon rôle a plutôt été de freiner la dépense » par rapport à l’« appétence en matière de sondages » de Nicolas Sarkozy, s’est défendu son ancien conseiller, selon l’audition dont l’Agence France-Presse a eu connaissance.
Une note manuscrite de Guéant

Le juge, qui cherche à déterminer qui a décidé cette convention signée par Emmanuelle Mignon et Patrick Buisson, a demandé à ce dernier s’il l’avait rédigée lui-même. Réponse affirmative. Nicolas Sarkozy lui aurait dit : « Pour les modalités, vois avec Claude (Guéant) », qui lui aurait répondu : « Puisque vous voulez une convention, proposez-moi un projet. »
De son côté, Emmanuelle Mignon a assuré en garde à vue avoir reçu la convention déjà signée par Patrick Buisson, avec une note manuscrite de Claude Guéant, qu’elle a remise aux enquêteurs, lui demandant de « mettre le contrat à la signature ».

7,5 millions d’euros de sondage

Lors de sa garde à vue, Claude Guéant avait assuré ne pas avoir négocié le contrat. De plus, à ses yeux, « l’Élysée n’est pas un ministère mais un pouvoir constitutionnel qui échappe à la règle commune des administrations », donc aux appels d’offres. À la suite du rapport de la Cour des comptes, l’Élysée avait procédé à une régularisation pour les sondages en lançant une procédure d’appel d’offres. Les enquêteurs s’interrogent aussi sur l’utilité pour la présidence de commander certains sondages.
Parmi les cas les plus litigieux, des questions sur la candidature de Jean Sarkozy à la tête de l’établissement public de La Défense en 2009, sur la relation du président avec Carla Bruni, ou des études visant des adversaires ou rivaux potentiels de Nicolas Sarkozy, comme Dominique Strauss-Kahn ou Jean-Louis Borloo. D’après l’enquête, l’Élysée a payé environ 7,5 millions d’euros en sondages et conseils lors du quinquennat 2007-2012.

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