Six ans après l’éclatement de la bulle immobilière, on construit en Espagne

En 2008 éclatait la bulle immobilière en Espagne, précipitant le pays dans la crise. Après une longue descente aux enfers, et malgré des centaines de milliers de logements toujours vacants, le bâtiment a redémarré en 2014.

La quatrième économie de la zone euro avait été prise dans les années 2000 d’une frénésie de construction. 700.000 logements sortaient de terre chaque année, autant qu’en France, en Allemagne et en Angleterre réunies.

Les régions et les municipalités investissaient dans des infrastructures surdimensionnées, comme l’aéroport fantôme de Huesca, dans les Pyrénées, ou des lotissements construits à Seseña, près de Tolède, restés quasi-vides.

Près de 1,9 million de personnes travaillaient dans le bâtiment avant la crise. Aujourd’hui elles sont un peu moins de 700.000. Mais depuis quelques mois, les entreprises recommencent à embaucher. Elles ont créé près de 10.000 emplois en novembre selon les chiffres du ministère du Travail publiés le 2 décembre.

"C’est principalement lié à une hausse dans les travaux publics", explique une porte-parole de la Confédération nationale de la construction (CNC).

Cette tendance devrait se poursuivre en 2015, puisque le projet de budget du gouvernement prévoit une hausse de l’ordre de 6% des investissements dans les infrastructures. "Il y a beaucoup d’optimisme dans le secteur de la construction, en partie dû aux annonces faites par le ministre des Travaux publics", constate Javier Vaca, responsable du développement au sein du groupe de BTP espagnol FCC.

Mais cette légère reprise ne se limite pas aux travaux publics. "L’amélioration constatée du côté de l’investissement dans la construction depuis le début de l’année semble avoir continué ces derniers mois", constatait fin novembre la Banque d’Espagne.

De fait, la construction de logements connaît aussi un léger frémissement. "Il y a une série de facteurs qui nous font penser que nous sommes arrivés à un point d’inflexion", comme les taux d’intérêt très bas offrant un accès au crédit plus facile pour les ménages et l’augmentation des permis de construire, commente Miguel Cardoso, économiste en chef du département de recherche de la banque BBVA.

Sur les neuf premiers mois de l’année, le nombre de permis de construire de logements neufs, qui avait été divisé par plus de dix pendant la crise, a bondi de 5,7% sur un an, selon BBVA Research.

Et ce malgré un stock toujours important de logements construits avant la crise mais qui ne trouvent pas preneurs. Le problème est qu’"une bonne partie de cette offre excédentaire ne se situe pas dans les zones urbaines à fort taux de croissance", comme Madrid ou Barcelone, commente Miguel Cardoso. Il s’agit plus de résidences secondaires situées sur la côte ou dans le centre du pays.

Ces indices encourageants ne se traduiront pas encore cette année par une hausse du chiffre d’affaires du secteur. Dans l’ensemble, l’activité devrait baisser de 2,4% en 2014, avant de repartir de l’avant, prédit l’institut de prévisions spécialisé catalan Itec. Ce dernier table pour 2015 sur une progression de 1,8%, qui va ensuite s’accélérer à 5% en 2017.

C’est une bonne nouvelle pour un métier qui revient de loin. "Nous ne sommes pas descendus dans les caves, mais jusque dans les catacombes", plaisante Josep Ramon Fontana, du réseau européen de prévision Euroconstruct, pour illustrer la dégringolade. Le BTP, qui a représenté jusqu’à 20% du PIB espagnol en 2007, a vu sa part chuter à 5% aujourd’hui, selon l’institut Itec.

Les investisseurs étrangers sont aussi de retour, constate l’économiste de BBVA. L’exemple le plus récent est celui du magnat mexicain Carlos Slim. Il va investir 650 millions d’euros dans FCC pour en devenir le premier actionnaire, pariant sur l’essor de la construction.

Pas besoin que le secteur renoue avec ses niveaux d’avant-crise pour qu’il se porte bien, insistent les experts. "Par le passé, le marché immobilier anticipait la reprise économique. Cette fois-ci le secteur n’est pas à l’origine de la croissance, mais sa conséquence", se réjouit Miguel Cardoso.

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