Sarkozy contre-attaque et promet de « faire triompher (son) honneur »

Nicolas Sarkozy s’est défendu avec vigueur jeudi soir sur TF1, promettant de "faire triompher (son) honneur", victime de "l’ignominie" de la "bande de Kadhafi" et de Mediapart, au lendemain de sa mise en examen dans l’enquête sur les soupçons de financement libyen de sa campagne de 2007.

"Je dois aux Français la vérité: je n’ai jamais trahi leur confiance", a déclaré au journal de 20H00 M. Sarkozy qui, ulcéré, a témoigné de "la profondeur de (son) indignation".

"Je suis accusé par des proches d’un dictateur" dont "nous avons détruit le régime de terreur" en 2011, a dit M. Sarkozy pour qui "il n’y a pas le plus petit élément, il n’y a pas le moindre élément d’une preuve" contre lui dans ce dossier.

Il n’a pas eu de mots assez durs pour les "monstruosités" proférées par Kadhafi et "sa bande", "des assassins, des criminels, des délinquants", pour le "sinistre" intermédiaire franco-libanais Ziad Takieddine -qu’il a cependant indiqué avoir rencontré deux fois- ainsi que pour le site d’informations Mediapart et son patron Edwy Plenel.

"Je pourfendrai cette bande, je ferai triompher mon honneur", même si cela doit prendre "un an, cinq ans, dix ans". "C’est la France, c’est la fonction" de chef de l’Etat qui est attaquée, a-t-il lancé.

"La politique, c’est fini", a par ailleurs ajouté l’ancien président de la République, s’exprimant pour la première fois de manière aussi catégorique sur le sujet, depuis son échec à la primaire de la droite fin 2016.

M. Sarkozy a été mis en examen pour "corruption passive", "financement illégal de campagne électorale" et "recel de détournement de fonds publics libyens" dans cette enquête ouverte en 2013.

Devant le magistrat instructeur Serge Tournaire, au terme de deux jours de garde à vue, l’ancien président avait vainement plaidé pour être placé sous le statut de témoin assisté, jugeant que les "indices graves et concordants (…) n’existaient pas".

Dans le cadre de son contrôle judiciaire, il n’a pas le droit de rencontrer neuf protagonistes de cette affaire dont deux très proches, ses anciens ministres Claude Guéant et Brice Hortefeux. Il ne peut non plus se rendre en Libye, en Egypte, en Tunisie et en Afrique du Sud, selon une source proche du dossier.

Si Claude Guéant, collaborateur "infatigable", "a des faits qui lui sont reprochés, il s’en expliquera". Même chose pour Brice Hortefeux que M. Sarkozy "aime tendrement". Pour lui-même, "il faut des preuves. C’est trop grave", a dit l’ex-chef de l’Etat.

Dans un propos liminaire publié jeudi par le Figaro, il avait expliqué vivre "l’enfer de la calomnie" depuis 2011, année des premières accusations lancées par le fils de Kadhafi, Seïf al-Islam.

Il avait aussi jugé avoir "déjà beaucoup payé pour cette affaire" sur le plan politique, avec la publication d’un document par Médiapart entre les dux tours de la présidentielle perdue face à François Hollande en 2012, puis avec les nouvelles accusations de M. Takieddine en 2016, juste avant le premier tour de la primaire de la droite lors de laquelle il avait tenté son retour.

En avril 2012, Mediapart avait publié entre les deux tours de la présidentielle un document libyen accréditant un financement d’environ 50 millions d’euros, dont M. Sarkozy et ses soutiens ont constamment affirmé qu’il s’agissait d’un faux.

Sa mise en examen dans le dossier libyen marque une vraie accélération dans cette affaire instruite par des magistrats du pôle financier depuis près de cinq ans.

"Mise en examen ne vaut pas culpabilité", s’est contenté de réagir Laurent Wauquiez, ancien ministre et successeur de Nicolas Sarkozy à la présidence du parti Les Républicains.

L’ancien Premier ministre Alain Juppé, ex-rival de M. Sarkozy lors de la primaire de la droite – tous deux furent battus par François Fillon – a dit faire "confiance à Nicolas Sarkozy pour apporter les preuves de son innocence" et lui a renouvelé son "amitié".
Les protagonistes au coeur de l’enquête sur les soupçons de financement libyen © Maryam EL HAMOUCHI AFP
Les protagonistes au coeur de l’enquête sur les soupçons de financement libyen © Maryam EL HAMOUCHI AFP

Quels sont les nouveaux éléments rassemblés par les magistrats pouvant mettre directement en cause l’ancien chef de l’Etat ? Selon Le Monde, plusieurs ex-dignitaires du régime Kadhafi auraient livré de récents témoignages confirmant les soupçons de financement illicite.

M. Takieddine a assuré avoir remis entre fin 2006 et début 2007 trois valises contenant 5 millions d’euros en provenance du régime Kadhafi à M. Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, et à son directeur de cabinet Claude Guéant.

D’autres dignitaires libyens ont démenti tout financement de la Libye de Kadhafi, que Nicolas Sarkozy avait reçu en grande pompe à l’Elysée en 2007.

Autre élément qui pourrait être compromettant pour M. Sarkozy, un rapport de l’office anticorruption pointait en septembre une circulation importante d’espèces dans son entourage durant la campagne 2007.

Interrogés, Éric Woerth, trésorier de la campagne, et l’un de ses adjoints ont assuré que l’argent provenait de dons anonymes, une justification contestée par d’autres protagonistes.

Les investigations ont aussi mis en lumière plusieurs opérations suspectes, notamment un virement de 500.000 euros perçu par M. Guéant en mars 2008. L’ex-secrétaire général de l’Élysée est également mis en examen dans cette enquête notamment pour "blanchiment de fraude fiscale en bande organisée".

Cette affaire n’est pas la seule dans laquelle M. Sarkozy est mis en cause. Il a été renvoyé en correctionnelle en février 2017 par le même juge Serge Tournaire, pour financement illégal de campagne électorale, mais cette fois pour la présidentielle de 2012. Il a fait appel.

Il est aussi menacé d’un procès dans l’affaire dite "des écoutes". Il est suspecté d’avoir tenté d’obtenir d’un magistrat à la Cour de cassation, Gilbert Azibert, des informations le concernant couvertes par le secret.

afp

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