Roudani: ceux qui s’opposent au retour du Maroc au sein de l’UA visent « à paralyser la marche de l’Afrique »

Pour Cherkaoui Roudani, spécialiste des questions géostratégiques, le retour du Maroc au sein de sa famille institutionnelle africaine est nécessaire et urgent. Selon M. Roudani, la vision du Roi Mohammed VI jouera un rôle déterminant afin de rassembler et construire avec l’ensemble une politique africaine capable d’épargner au continent des émiettements et des dislocations.
La vulnérabilité économique ainsi que la fragmentation politique profitent aux groupes terroristes pour faire régner la confusion et la terreur, a-t-il souligné.

Propos recueillis par Hasna Daoudi

Le sommet de l’Union africaine s’ouvre ce lundi à Addis Abdeba. Deux pays, l’Algérie et l’Afrique du Sud essaient de torpiller ce retour via des moyens peu orthodoxes. Quel est le mobile de cette opposition que beaucoup d’analystes qualifient presque de "haineuse" ?

J’aimerai bien signaler que plus de 42 pays du continent appuient fortement le retour du Maroc à l’Union africaine et d’autres ont bien mentionné les irrégularités juridiques dans lesquelles s’engloutit l’UA. La présence d’un mouvement séparatiste, soutenu par l’Algérie et d’un courant de l’ANC d’Afrique du Sud, n’est pas en adéquation avec l’histoire et les fondements même de la loi internationale.
Aujourd’hui, la majorité des pays africains demandent l’éjection pure et simple de la pseudo « RASD » de l’UA. On doit souligner que la majorité des pays du l’UA ne reconnaissent pas ce mouvement séparatiste crée, et d’ailleurs ce n’est pas un secret, financé par l’Etat algérien. Cette opposition montre qu’il y a deux visions. Une portée par plus de 42 pays africains qui ont fait des constats sur une base imprégnée par le pragmatisme et l’ambition de créer des mécanismes économiques pour mettre en cohérence l’arrivée de l’Afrique dans la mondialisation. L’autre vision est incarnée par une minorité de pays qui cherchent à créer des Afriques soumis et manipulés. L’échec de l’agenda 2063, adopté en 2015 et censé amener les pays africains à travailler ensemble pour construire une Afrique prospère et unie, témoigne véritablement que l’obstructionnisme de certains pays contre le retour du Maroc au sein de sa famille institutionnelle, vise à paralyser la marche de l’Afrique vers l’avant, vers le progrès.

A travers de nombreuses tournées en Afrique de l’ouest et de l’Est, le Roi Mohammed VI a défendu cette réintégration. Le temps est-il venu pour que Le Maroc reprenne au plus vite sa place naturelle ?

Le retour du Maroc au sein de à sa famille institutionnelle africaine est souhaitable autant qu’il est inéluctable et naturel. Le Maroc a toujours joué un rôle très important et décisif dans le continent. Les visites de Sa Majesté dans le continent qui dépassent plus d’une quarantaine illustrent cette vocation royale de l’Afrique. Une vision royale qui se traduit aujourd’hui par des relations bilatérales qui sont significatives avec un ensemble de groupements régionaux à l’échelle du continent. Avec plusieurs pays de la CEDEAO, de la SADC, Igad, et COMESA, le Maroc entretient des échanges économiques fructueux et des relations de confiance. N’oublions pas aussi que le Royaume avait un rôle prépondérant dans la genèse de l’intégration africaine. En effet, l’histoire garde toujours dans la mémoire la conférence de Casablanca de 1961 ainsi que les résolutions qui ont été adoptées et qui furent motrices de la construction de l’ancien cadre de l’UA qui est l’OUA. Ainsi, le retour du Maroc vient dans un contexte international et continental qui nécessite un réalisme et un pragmatisme pour faire face aux changements que connait le monde. A l’échelle internationale, le continent reste à l’écart des dynamiques économiques rapides que connaissent les groupements internationaux. Ce qui n’a pas favorisé son positionnement à l’échelle des systèmes d’équations géopolitiques mondiales. Ce qui sûr est que l’Afrique semble dans l’obligation de "panser" son présent afin d’arriver à construire le devenir de toute une génération assoiffée de changements et de vivre ensemble. Nul ne peut nier que l’Afrique baigne aujourd’hui dans l’insécurité. Plusieurs pays sont pris en otage par ce facteur. La vulnérabilité économique ainsi que la fragmentation politique profitent aux groupes terroristes pour faire régner la confusion et la terreur. L’exemple de l’attaque de la ville du Gao au Mali illustre la fragilité que l’ensemble du continent doit appréhender afin de vaincre AQMI, Boko Haram, Mujao, Al Chabab, Daech ou Ansar Charia…
Outre tous ses défis économiques et politiques, les pays du continent obéissent, sans force de résistance, à la loi des changements climatiques avec ses répercussions négatives sur la stabilité et le développement. Tous ses problèmes et difficultés ont figé le temps africain, paralysé la construction et l’intégration africaine. Le Maroc apportera son expertise et son pragmatisme ainsi que sa pertinence de l’intuition des enjeux. C’est un retour pour la mémoire et la réhabilitation de l’histoire, hélas, bafoué depuis 1984. Il y a l’âge des idéologies, qui a déchiré le continent et l’a fragmenté, et l’âge du pragmatisme avec un esprit de reconstruction basé sur un espace de solidarité et de convergences stratégiques. Je pense que le retour du Maroc s’inscrit dans cette conception : un continent capable d’assumer ses responsabilités avec un fort désir de dépasser toutes ses divergences qui soient d’ordre politiques ou économiques.

Quel sera l’apport du Maroc pour dynamiser l’action de l’UA ?

Le Maroc est capable d’apporter une valeur ajoutée à l’action de l’UA. Sa façon de concevoir les choses ainsi que son pragmatisme avec son expertise dans beaucoup de domaines constituera un atout majeur aux réformes qui ont fait l’objet du rapport proposé par le Président Rwandais Paul Kagamé qui s’est chargé avec d’imminentes personnalités de décortiquer la réalité ainsi que les problèmes de l’UA. L’approche marocaine dans la gestion intégrée des enjeux du continent peut placer les défis africains au cœur des préoccupations collectives de ses pays notamment en matière de développement solidaire, sécurisé et durable. Sur le plan de plusieurs paradigmes des conflits et de l’insécurité, la vision de Sa Majesté le Roi Mohammed VI jouera un rôle déterminent afin de rassembler et construire avec l’ensemble une politique africaine capable d’épargner au continent émiettements et dislocations.
Chacun sait que sans développement économique, le continent peut manquer son rendez-vous avec l’histoire. De ce fait, les relations stratégiques qu’entretient le Maroc avec plusieurs groupements régionaux à l’échelle mondiale contribuera à attirer des investissements directs créateurs de richesses et d’emploi. La réforme des institutions de l’UA est une obligation afin d’accompagner les changements et les besoins du continent. C’est pourquoi, le modèle avant-gardiste du Maroc que ce soit au niveau économique ou politique aidera à façonner une architecture institutionnelle réaliste capable de répondre aux exigences de développement africain. Aujourd’hui, il est impératif de repenser l’action de l’UA ainsi que son rôle dans l’équation mondiale. L’agenda 2063 qui a été porté par Dlamini-Zuma, présidente de la Commission de l’UA, et à la lumière des résultats actuels, est un échec total. Le retour du Maroc au sein de l’UA est non seulement nécessaire mais urgent.

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