Retraites/France : au 7e jour de grève, l’heure de vérité pour le gouvernement

Le Premier ministre dévoile mercredi sa réforme des retraites et les compromis, voire les concessions, auxquels l’exécutif est prêt pour tenter de calmer la colère, lors d’une septième journée de grève qui engendre toujours de fortes perturbations dans les transports.

Édouard Philippe s’exprimera à 12H00 devant le Conseil économique, social et environnemental (CESE) et a promis d’y présenter "l’architecture" de la réforme visant à fondre les 42 régimes de retraite actuels (spéciaux, fonctionnaires, salariés du privé, libéraux, artisans, agriculteurs…) en un seul système universel par points.

Trains à l’arrêt, lignes de métros fermées, crèches et écoles au ralenti, blocages de raffineries… La France vit depuis une semaine au rythme de la mobilisation, qui s’est toutefois affaiblie entre la première manifestation du jeudi 5 décembre et la deuxième de mardi.

Mercredi ne fait pas exception: les conditions de déplacements restent très difficiles. La SNCF assure la circulation de trois TER sur dix, un train Intercités et un TGV sur quatre. En Île-de-France, neuf lignes de métro sur seize circulent et 40 % des liaisons en bus sont assurées.

Quatre dépôts de bus bloqués à 6H00 ont été libérés par les forces de l’ordre à 08H00, a assuré la préfecture de police.

Partie à 6H15 et après deux heures de bus pour venir de Bourg-en-Bresse, Ella, rencontrée à la gare routière de Lyon-Part-Dieu, en a "assez de la grève". "Chez moi en Russie ce n’est pas comme ça", témoigne t-elle emmitouflée dans son écharpe.

Le trafic routier restait particulièrement dense. Vers 08H30, près de 450 kilomètres de bouchon étaient enregistrés en Ile-de-France, un niveau exceptionnel, selon le site d’information routière Sytadin.

"On peut pas travailler comme ça. Ces bouchons, c’est pas possible", a commenté un chauffeur de VTC excédé.

Près de Rouen, entre 200 et 300 personnes dont des "gilets jaunes" ont installé un barrage filtrant les poids lourds au rond-point des vaches, bravant l’interdiction préfectorale et perturbant la circulation.

1975 plutôt que 1963 ?

Mardi, l’intersyndicale CGT/FO/FSU/Solidaires et quatre organisations de jeunesse ont appelé à des actions locales jeudi et samedi, puis à une journée de mobilisation interprofessionnelle mardi 17 décembre à Paris, en même temps que la manifestation des personnels hospitaliers.

Dans ce contexte, les annonces d’Édouard Philippe sont particulièrement attendues. Même si lui-même ne se fait pas d’illusions quant à leur effet immédiat. "Ce n’est pas parce que je fais un discours que les manifestations vont cesser", a averti le chef du gouvernement lors d’une réunion à huis clos avec des députés LREM.

Décalage dans l’application de la réforme, périodes de transition pour les régimes spéciaux, éventuelle revalorisation des carrières de la fonction publique, notamment des enseignants, âge pivot, pénibilité, droits familiaux… autant d’options que le Premier ministre va lever, ou non, mercredi. Il interviendra ensuite au 20 Heures de TF1.

L’idée d’une mise en oeuvre de la réforme à partir de la génération 1975, au lieu de 1963, s’est précisée au dîner de "calage" mardi à l’Élysée avec des ténors de la majorité, selon un participant.

Des gestes ont déjà été promis aux enseignants et aux policiers. Le gouvernement a également laissé entendre qu’il n’y aurait pas de mesure budgétaire supplémentaire.
Macron joue gros

Devant l’Assemblée nationale mardi, le Premier ministre a néanmoins répété mardi qu’il fallait "dire la vérité aux Français" et "cela passe progressivement par un allongement de la durée de travail, progressivement de façon à préserver les choix individuels de chacun".

Une position qui ne convainquait déjà pas le patron de la CFDT, Laurent Berger, avant la grève. Sa réaction sera particulièrement scrutée.

Des gestes clairs sont également attendus par la CFTC, l’Unsa et la CFE-CGC, dont l’adhésion même partielle au mécontentement est exceptionnelle.

Les partis d’opposition attendent le Premier ministre au tournant. A droite, on est prêt à reprocher tout recul jugé excessif. A gauche, notamment la France insoumise, on continue à réclamer le retrait pur et simple d’un projet "néfaste" voire "dangereux".

Le président de la République, qui a fait de la "transformation" du pays la raison d’être de son quinquennat, joue gros et risque de perdre des deux côtés, auprès de ses détracteurs comme de ses fidèles, en cas de recul.

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite