Quand François Hollande donne des « leçons » à Emmanuel Macron

François Hollande s’invite à nouveau avec fracas dans le débat politique, en publiant mercredi un ouvrage intitulé « Les leçons du pouvoir », où il accuse notamment les réformes de son successeur, Emmanuel Macron, de « creuser les inégalités ».

Dans cet ouvrage de plus de 400 pages publié chez Stock, l’ancien chef de l’Etat revient longuement sur son bilan. Mais il lance aussi nombre de piques à Emmanuel Macron, et prend position sur plusieurs sujets d’actualité.

La sortie du livre s’accompagne d’un plan média bien chargé: interview à L’Obs, 20H00 de France 2, matinale de France Inter, C à Vous (France 5)…

"Mes gouvernements réduisaient les inégalités. Celui-là les creuse", attaque François Hollande, qui avait déjà eu l’occasion de critiquer à Angoulême au mois d’août les "sacrifices inutiles" demandés aux Français, et à Séoul en octobre la réforme de l’impôt sur la fortune.

L’ancien président de la République exprime d’autres critiques: le recours aux ordonnances, qui "traduisent l’abandon par le Parlement de ses prérogatives"; la mise à l’écart des syndicats dans les TPE "laissant les salariés seuls face à leurs employeurs"; la suppression du secrétariat d’Etat aux victimes; la définition d’un statut pour la Première dame.

"Pour ma part, j’ai toujours considéré que les Français élisaient un président et non pas un couple ni une famille", tacle-t-il.

François Hollande met aussi en garde son ancien conseiller et ministre contre un excès d’assurance, en particulier à l’international. "Pour lui, une volonté clairement affirmée et beaucoup de séduction pourvoient à tout. C’est sa méthode".

Contre la proportionnelle

Dans son interview à L’Obs, M. Hollande enfonce le clou. "Mon expérience m’a prouvé que chaque fois que j’ai pu engager une concertation et négocier, j’ai réussi à réformer. Chaque fois que j’ai voulu aller trop vite ou trop brutalement, je n’ai pas été compris. La négociation prend plus de temps, mais elle produit des résultats plus solides", souligne-t-il, alors que M. Macron doit affronter une conjonction de mouvements sociaux.

L’ancien chef de l’Etat prend aussi position dans son livre sur les réformes à venir. Ainsi se dit-il opposé à la proportionnelle, qui "priverait le chef de l’Etat d’un appui solide pour mener ses réformes" et "élargirait la place réservée aux extrêmes", tout comme à la diminution du nombre de parlementaires, qui aurait "comme conséquence d’éloigner le député de ses électeurs et de priver les territoires ruraux de la représentation que la République leur a toujours accordée".

En revanche, il se dit favorable à l’euthanasie, et à l’extension de la PMA (procréation médicale assistée) pour les couples de femmes. "La réforme de la PMA se fera", assure-t-il.

De manière plus générale, M. Hollande prend ses distances avec l’effacement du clivage droite/gauche théorisé par M. Macron. Certains pensent que la gauche "professe une idéologie dépassée, que d’autres clivages dominent, que tout se réduit finalement à une lutte entre les tenants de l’ouverture et les partisans du repli. C’est une caricature", assène-t-il.

A mots couverts, il accuse M. Macron de l’avoir trahi dans l’ombre. "J’ai toujours admis la compétition politique. Mais je pense qu’elle doit se livrer au grand jour et s’assumer franchement. Convenons que ce ne fut pas le cas".

François Hollande revendique également, dans L’Obs, le bilan de son quinquennat, avec "une économie assainie et revigorée". "Un président travaille toujours pour son successeur et il hérite de son prédécesseur", lance-t-il, assurant avoir "laissé la France à Emmanuel Macron dans une situation meilleure que celle (qu’il) avai(t) trouvée".

En quelques formules bien senties, l’ancien chef de l’Etat règle aussi ses comptes avec d’anciens ténors du PS: Martine Aubry, qui l’avait assuré de son "soutien" en juin 2016 mais est restée muette, Arnaud Montebourg et Benoît Hamon qui, en poursuivant la "chimère" d’une réécriture des traités européens, "ont fait sombrer leur famille politique". Il reproche aussi à ses deux anciens ministres d’avoir "ouvert à Jean-Luc Mélenchon un espace dans lequel il a constitué une force qui, si elle devenait dominante à gauche, interdirait le retour de la social-démocratie aux responsabilités".

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