Présidentielle 2017 : Emmanuel Macron, un jeune surdoué qui change les codes

L’ancien banquier cherche à bousculer le jeu politique. À 8 jours du premier tour de l’élection, il est au coude-à-coude avec Marine Le Pen dans les sondages.

Apprivoiser le système pour mieux le contourner. C’est un peu ce que fait depuis des mois Emmanuel Macron, qui pourrait bien se retrouver au second tour de l’élection présidentielle, le 23 avril prochain, à en croire les sondages qui le placent en tête avec Marine Le Pen depuis plusieurs semaines. Cet enfant chéri du système est devenu le candidat « antisystème », conformiste ou audacieux, « ni de droite ni de gauche ». Emmanuel Macron, surdoué de 39 ans animé d’une ambition immense, a fait irruption dans la campagne présidentielle en espérant s’offrir l’Élysée pour premier trophée.

Ancien banquier d’affaires chez Rothschild inconnu il y a trois ans, ministre de l’Économie deux ans durant, héritier et parricide de François Hollande, le jeune candidat, pour la première fois face à des électeurs, promet un « renouvellement » profond de la vie politique, à la tête d’un grand mouvement du centre. Parcours rectiligne, éducation bourgeoise chez les jésuites à Amiens, nez dans les livres auprès de sa grand-mère directrice de collège, c’est un élève modèle mais aussi rebelle, quand il s’agit de défier les conventions pour épouser son professeur de français au lycée, de 24 ans son aînée.

Grâce à sa tête bien faite – Sciences Po Paris, diplôme de philosophie, ENA promotion Sedar-Senghor puis Inspection générale des finances –, il a attiré l’œil de ses premiers mentors politiques : Jacques Attali, qui en fit le rapporteur adjoint de sa commission pour la libération de la croissance dès 2007 ; puis François Hollande, qui le nomma secrétaire général adjoint de l’Élysée en 2012 et le propulsa à Bercy à l’été 2014.

Faire confiance à son instinct

Ses « intuitions », alors qu’il n’a que « cinq ans de boutique en politique », selon l’expression d’un rallié de droite, suscitent l’admiration dans son premier cercle comme chez ses adversaires. « Je pense que Macron a eu l’intuition, précisément parce qu’il était extérieur à la vie politique traditionnelle, que les partis de gouvernement avaient créé leurs propres faiblesses, avaient perdu leur propre attractivité, étaient, pour reprendre un vieux mot, usés, fatigués, vieillis », confiait récemment François Hollande.

« Emmanuel, c’est le maître des horloges, il sent quand il faut y aller », confirme le sénateur socialiste François Patriat. Par exemple, « il a eu cette intuition de créer En marche ! quand il a élaboré sa loi » adoptée par 49.3 à l’été 2015, se souvient le député PS Richard Ferrand. C’est en ferraillant pour défendre ce texte fourre-tout, qui va de l’extension du travail du dimanche à la libéralisation du transport en autocar, qu’« il a constaté les scléroses du pays », souligne ce soutien de la première heure, désormais secrétaire général du mouvement lancé le 6 avril 2016.

À la tête de sa petite entreprise politique, siglée de ses initiales et qui revendique aujourd’hui quelque 250 000 adhérents, sans obligation de cotisation, Emmanuel Macron a affiché de plus en plus ostensiblement ses ambitions, avec un fervent meeting fondateur à La Mutualité le 12 juillet 2016 devant 3 000 personnes, puis en quittant le gouvernement le 31 août pour se lancer dans l’aventure présidentielle.

Jouer, mais ne pas nécessairement gagner

« Je le trouve courageux et libre. Il lui a fallu rompre tout le temps », louait il y a peu un membre du gouvernement. Emmanuel Macron veut à la fois « libérer » et « protéger », en refondant « un modèle social dépassé » tout en « réarmant les individus ». Un programme jugé flou par ses détracteurs, qui raillent sa propension à articuler dans la même phrase deux idées contradictoires, parfois teintées de jargon « techno ».

Lui vante sa volonté de « tourner la page non seulement des cinq dernières années, mais aussi des vingt dernières années », et érige la « bienveillance » en marque de fabrique. Au fur et à mesure de son ascension dans les sondages, Emmanuel Macron, regard bleu clair et sourire photogénique, s’est laissé gagner par la ferveur des réunions publiques, s’attardant sur scène, se délectant des « Macron président ! » fusant dans la salle.

Mais s’il n’est pas élu, les intentions profondes d’Emmanuel Macron, projeté sur le devant de la scène grâce à un alliage de charisme, de cordialité et de spontanéité, restent énigmatiques. « Macron, son plaisir, c’est de jouer, c’est pas de gagner. Le jour où il aura perdu, il s’en fout, il passe à autre chose », assurait à l’automne un membre du gouvernement. Lui jure qu’il gardera les commandes d’En marche ! et un œil sur l’avenir. Et en même temps qu’il ne sera « plus en politique dans 20 ans ». Paradoxal ?

(Avec AFP)

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