Photos d’exactions de l’EI sur Twitter: Marine Le Pen renvoyée devant la justice

Marine Le Pen va devoir s’expliquer devant la justice pour des tweets datant de 2015: elle a été renvoyée devant le tribunal correctionnel de Nanterre pour avoir diffusé des photos d’exactions du groupe jihadiste Etat islamique (EI) sur Twitter.

Une juge d’instruction a signé fin mai une ordonnance de renvoi pour trois tweets, publiés en décembre 2015, quelques semaines à peine après les attentats meurtriers revendiqués par ce même groupe à Paris et en Seine-Saint-Denis.

La date du procès pour "diffusion d’images violentes" de la présidente du Rassemblement national (RN) n’est cependant pas encore fixée.

En réponse au journaliste Jean-Jacques Bourdin, qu’elle accusait d’avoir "fait un parallèle" entre l’EI et le Front national (devenu RN), Mme Le Pen avait relayé, le 16 décembre 2015, des photos d’exactions du groupe jihadiste en y ajoutant les mots: "Daech, c’est ça !"

Les photos montraient un soldat syrien écrasé vivant sous les chenilles d’un char, un pilote jordanien brûlé vif dans une cage et une photo du journaliste américain James Foley, le corps décapité et la tête posée sur le dos.

Après trois ans d’instruction, le parquet avait requis un procès en décembre sur la base de l’article 227-24 du Code pénal, qui punit la diffusion de messages violents susceptibles d’être vus par un mineur, une infraction passible de 3 ans de prison et 75.000 euros d’amende.

Le député du Gard Gilbert Collard, apparenté RN, avait relayé le même jour la photo d’un homme gisant au sol, le crâne défoncé, avec ce commentaire: "Bourdin compare le FN à Daech: le poids des mots et le choc des bobos !".

Il a lui aussi fait l’objet d’une instruction qui a abouti à son renvoi en correctionnelle fin mars, pour la même infraction que la présidente du parti d’extrême droite.

A l’époque, la publication de ces images, très violentes, avait immédiatement soulevé un tollé au sein de la classe politique et au delà: le parquet de Nanterre avait lancé le jour même deux procédures, après un signalement des clichés par le ministre de l’Intérieur.

"liberté d’expression"

"On est édifié" devant cet "acharnement", a aussitôt réagi David Dassa-Le Deist, avocat de Mme Le Pen, interrogé par l’AFP.

Selon lui, "pas un seul pays au monde n’a détourné un texte comme celui-ci (l’article 227-24, NDLR) et ne l’a utilisé pour convoquer devant un tribunal pénal son principal leader politique d’opposition, dans le but de limiter sa liberté d’expression".

Et de souligner que ce texte de loi n’a été jusque là appliqué que "pour protéger les mineurs de pervers". "Le net pullule de contenus pornographiques, pédopornographiques ou ultra violents, en accès libres pour les mineurs. Ca, ça n’a jamais intéressé le parquet de Nanterre…", a-t-il ironisé.

L’avocat de M. Collard, Jean-Marc Descoubes, avait lui aussi estimé fin mars que les poursuites contre les deux caciques du RN étaient "infondées tant juridiquement que sur le plan factuel".

Après s’être vu retirer son immunité parlementaire, d’abord en tant qu’eurodéputée puis en tant que députée, Mme Le Pen avait, elle, été mise en examen le 1er mars 2018, deux mois après M. Collard.

En septembre, elle s’était élevée contre une expertise psychiatrique ordonnée dans cette instruction – un examen cependant prévu par la procédure pénale. Dénonçant une "méthode" utilisée "dans les régimes totalitaires", elle avait déclaré qu’elle ne s’y rendrait pas.

Depuis, un expert a été commis par la justice mais aucune convocation n’est parvenue à la dirigeante du RN, selon Me Dassa-Le Deist.

A cette occasion, Mme Le Pen avait publié, à nouveau sur Twitter, le document ordonnant cette expertise, signé par la juge d’instruction: une nouvelle enquête a été ouverte, dépaysée à Versailles, la loi interdisant la publication d’un acte de procédure judiciaire avant une audience publique.

Le 5 juin, elle a à nouveau utilisé Twitter pour fustiger une convocation aux fins de mise en examen dans cette seconde enquête, évoquant une "persécution".

Mme Le Pen est par ailleurs mise en examen dans un autre dossier, celui des emplois présumés fictifs d’assistants parlementaires européens, pour "détournements de fonds publics", aux côtés de plusieurs autres responsables politiques.

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