PS : les militants quittent peu à peu le navire

De nombreuses fédérations socialistes font face à une hémorragie de militants. La politique du gouvernement, jugée par certains trop libérale, est en cause

Des sondages en berne, des défaites électorales, des fractures au sein de la majorité… En plus de toutes ces difficultés, le Parti socialiste est confronté à une lente hémorragie de ses militants. La baisse est sensible : on enregistre une diminution de 10 à 20 % des effectifs depuis 2012 dans plusieurs fédérations du Parti socialiste.

C’est le cas à Paris, où la fédération du PS revendique 7 800 adhérents, un recul de 10 % depuis 2012, en Haute-Garonne (baisse de 4 384 à 3 760 en début d’année), ou encore en Isère (2 400 à 2 000) et en Loire-Atlantique (3 311 à 2 895). Cela s’aggrave dans les régions où le PS s’est retiré pour faire barrage au Front national aux régionales. "Dans le Pas-de-Calais, on est dans l’ordre de 5 000 à 6 000 militants contre 8 000", dit un élu socialiste, sans préciser toutefois la période de référence. Mais, ajoute-t-il, "dans le département du Nord, ils sont exsangues, ils ont tout perdu, la région, etc." La fédération PS du Nord, longtemps l’orgueil du PS, revendiquait 5 500 adhérents à jour de cotisation en février, loin de la moyenne de 10 000 de ces dix dernières années. Dans les Bouches-du-Rhône, le secrétaire fédéral Jean-David Ciot attribue la baisse des effectifs "aux batailles internes au PS marseillais" aux municipales et aussi au départ de l’ex-premier secrétaire, Jean-Noël Guérini.

Processus de "mort lente"

Du côté de la rue de Solférino, on ne s’empresse pas de fournir des chiffres récents. Le Parti socialiste revendiquait en mai 2015, au moment du congrès de Poitiers, 131 000 militants "actifs", c’est-à-dire à jour de cotisation. "Il y a davantage de gens qui partent mais il y a aussi des arrivées", assure un responsable socialiste, et les départs sont essentiellement des partisans de ‘la motion B’, autrement dit appartenant à l’aile gauche, très critique de la politique gouvernementale, jugée trop libérale. Ce responsable estime d’ailleurs, sans trop cacher sa satisfaction, que cela peut "contribuer à changer le rapport de force" au sein du Conseil national, le "parlement" du parti. Quant aux arrivées, il s’agit selon lui de personnes "qui en ont marre qu’on tape sur le gouvernement".

"Je n’identifie pas de mouvements massifs", déclare Emmanuel Grégoire, le "premier fédéral" parisien, mais "on surveille cela de près". Il fait remarquer toutefois que "les formes d’actions militantes et d’organisation que proposent les partis politiques sont totalement périmées par rapport aux attentes des citoyens" et que le phénomène "touche tous les partis". "Les départs se font peu à peu. Il y en a qui sont partis sans rien dire", constate une militante parisienne. Il s’agit d’un processus de "mort lente", évoluant "à bas bruit". "Une érosion", abondent d’autres. "Vient un moment où les gens qui ne sont plus du tout d’accord s’en vont. On ne peut plus être à l’intérieur du parti en pensant à l’extérieur. Ce n’est plus possible", ajoute-t-elle.

Impossible de distribuer des tracts en 2017

Julien Jusforgues, trente ans au PS, a quitté le parti et rejoint La Nouvelle Gauche socialiste. Il déplore que "ne restent au PS que les gens qui veulent y faire carrière et qui sont dépendants économiquement, ou salariés par le PS. On a perdu ce qui faisait sa force, les militants syndicalistes, étudiants, travailleurs". "Le PS se vide totalement de ses militants. Je me demande bien comment ils vont pouvoir mettre en place la campagne (de 2017) et pouvoir, sans militants" participer aux campagnes électorales, renchérit Franck Rey, un ancien de l’aile gauche du PS.

Il y a deux lignes au PS, celle de Manuel Valls, "plus que social-libérale", et la ligne de Martine Aubry "qui arrive trop tard", analyse Sabrina Ghallal, toujours au parti. "En 2017, je ne pourrai même pas distribuer un tract pour appeler à voter pour le PS. Cela m’est impossible", ajoute-t-elle. Sabrina fulmine : "Aux régionales, des militants disaient : moi, je ne veux pas faire campagne parce qu’on m’insulte sur les marchés, dans les porte-à-porte. Et en plus, ils ont raison d’être en colère."

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