Mohammed VI, 20 ans de performances

Par Mustapha Tossa

Alors que les Marocains s’apprêtent à souffler la vingtième bougie de l’accession de Mohammed VI au trône, anniversaire ô combien symbolique, beaucoup a déjà été écrit sur le bilan incontestablement positif de ces années de règne. La physionomie du pays s’est radicalement métamorphosée. Une dynamique sociale et économique a pu libérer les énergies pour les rendre plus créatives. Le leadership marocain dans le concert des nations a été consolidé. Et parce que le Maroc participe activement et positivement à la grande conversation internationale, son étoile brille de mille feux.

Les marocains, parce qu’ils ont appris à tolérer leurs différences et dépasser leurs antagonismes, ont réussi à créer un vivre ensemble pacifique et harmonieux inédit dans la région. Le Maroc est devenu cette puissance régionale incontournable dans le dialogue stratégique entre deux continents aux ambitions planétaires que sont l’Europe et l’Afrique.

Comment analyser et comprendre les ressorts qui ont permis au Maroc de réaliser cette performance et d’éviter les tourbillons qui provoquent des ruptures et qui participent à créer cette légendaire exception marocaine ? De nombreux éléments de réflexion et d’analyse permettent d’expliquer et de rationaliser ce particularisme marocain sans pour autant verser dans de dithyrambiques autosatisfactions.

Le premier élément tient principalement à la qualité de la relation qu’entretient le Roi Mohammed VI avec le peuple marocain avec ses différentes strates. Depuis son accession au Trône en 1999 après le décès de Hassan II, Mohammed VI a spontanément incarné l’espoir de tout le peuple marocain d’évoluer vers une société démocratique, ouverte et tolérante, mais aussi dynamique dans son désir de vouloir se reformer et vivre avec son temps. Ce lien de confiance est d’autant plus fort que la vénération pour la personne de Mohammd VI est à la fois spontanée, sincère et ne subissant aucune sorte de contrainte.

Avec Mohammed VI, les marocains ont su préserver l’espoir d’un monde meilleur et d’un Maroc nouveau, moderne, en phase avec leurs aspirations de réforme et de changement. Leur adhésion à la monarchie et à la personne de Mohamed VI n’est ni une posture feinte ni une attitude de circonstance. Elle provient d’une profonde conviction que le souverain marocain est le symbole incontesté de leur unité et de leur stabilité.

Style Mohammed VI

Au sortir d’une séquence autoritaire assez marquante, le jeune Roi Mohammed VI avait su provoquer en douceur et avec habileté une vraie rupture avec le passé tout en maintenant les ors et les apparences de la continuité propres à une monarchie séculaire. Le style à d’abord changé. Pas de grandes messes de communication.Tout est cadré dans de grandes décisions qui marquent le temps et les esprits comme l’initiative nationale du développement humain avec l’éducation comme priorité nationale élevée au rang de doctrine politique. Les grandes objectifs de cette initiative semblent constituer les choix sociétaux du nouveau roi : Investir dans le marocain pour lui permettre de se transformer en producteur de son propre bonheur, sortir le pays d’une mentalité d’assistés qui paralyse les énergies et cumule les frustrations. Le Maroc dispose d’un inestimable capital, l’humain.

Le style Mohammed VI s’est révélé d’une grande originalité Seuls les actes forts parlent. La communication royale s’est construite autour de projets concrets. Le Roi est en perpétuel mouvement pour créer la grande dynamique dont le pays à besoin et remettre tous les leviers en action. Ses multiples apparitions agissent comme un accélérateur de projets que le gigantisme d’une part et une bureaucratie tatillonne d’une part, peuvent paralyser.

Prince héritier, Mohammed VI était déjà aimé et chéri par les marocains qui voyaient en lui l’espoir d’une transition pacifique et douce vers un monde meilleur dans une réalité incertaine et turbulente. Devenu Roi du Maroc, Mohammed VI renforce cette impression. Au fil de l’exercice du pouvoir, les marocains ont confirmé ce qu’ils ressentaient déjà à son égard. Autant son empathie à l’égard des marocains dans la nécessité et la souffrance était réellement sincère, autant sa volonté de transformer la société marocaine pour lui permettre de relever les défis économiques politiques et sécuritaires du nouveau siècle fut solides et sans concessions . Le Roi avait inscrit son action entre ses deux paramètres qui ont abouti à ce que les marocains lui vouent une admiration sans bornes.

Pendant ces vingt années , Mohammed VI a réussi à réconcilier les marocains avec leur monarchie. Son style, sa manière de communiquer avec des actes forts et remplis symboles ont profondément renforcé l’attachement des marocains à sa personne. Cette vérité fut si voyante que même dans les manifestations de colères sociales et de frustrations politiques qui ont émaillé la rue marocaine au gré des crises sociales domestiques et des turbulences politiques régionales, la personne du Roi, comme icône fédératrice fut épargnée. Ce qui a eu le don de consolider cette image de rassembleur, de symbole unificateur des marocains dans leurs grandes diversité, d’arbitre au dessus de la mêlée.

En vingt années, le Roi Mohammed VI n’a pas fait que marquer la société marocaine par ses projets politiques avant-gardistes destinés à insuffler une dynamique nouvelle. Il a aussi réussi à marquer les imaginations des marocains et des autres par un style nouveau qui tranche avec le protocole lourd et parfois engoncé qu’impose l’exercice monarchique.

Ouverture du jeu politique

Le second élément qui éclairent d’un nouveau jour cette exception marocaine est cette décision stratégique d’ouvrir le jeu politique pour permettre une vraie logique de participation à la gestion des affaires publiques. Ce qui a crée les conditions pour l’arrivée d’un parti dit "islamiste" comme le PJD au pouvoir et la nomination d’un premier ministre comme Abdelilah Benkirane, puis un autre Saad Eddine El othmani. Même si cette expérience rencontre quelques difficultés et provoquent quelques grincements de dents, elle participe malgré tout à nourrir une culture démocratique et à installer les mécanismes d’une alternance politique, la seule garante d’une bonne santé démocratique. Cette expérience unique a permis la naissance d’une société civile dynamique, d’une presse libre pertinente et d’une classe politique racée. Ce choix stratégique avait le mérite de retirer le tapis sous les pieds des populistes et de démagogues qui entendaient profiter des incertitudes des temps modernes pour faire avancer leurs agendas.

Le principale chantier auquel le Roi s’est attelé depuis son accession au trône est de construire une édifice démocratique. Avec un parlement, le reflet de la volonté populaire, qui fonctionne, des partis représentatifs des courants qui travaillent la société marocaine qui jouent leurs partitions et un gouvernement qui gouverne.

Sous la houlette du Roi Mohammed VI, commandeur des croyants , le Maroc a intelligemment su éviter les grandes orages politiques qui ont dangereusement et parfois mortellement perturbé des pays comme la Tunisie, l’Egypte, la Syrie ou la Libye. Ce qui lui vaut une distinction internationale inédite. Le Maroc est souvent cité comme l’exemple à suivre pour les transitions douces en terre africaine et musulmane.

Cette performance est d’autant plus louable qu’elle intervenait alors que le pays était toujours soumis à la pression du conflit du Sahara que nourrit avec une cécité obsessionnelle et irrationnelle son voisin algérien. Ce conflit factice continue de saigner son économie, d’obérer les chances de son décollage et de créer les condition d’une instabilité sécuritaire régionale. Et pourtant malgré tous ses facteurs handicapants, le Maroc paraît plus fort et plus déterminé que jamais à relever les défis du développement économique et de l’expérience démocratique.

Ce Maroc nouveau qui a opéré une rupture tranquille avec un passé autoritaire et sclérosant, les marocains le doivent aux chantiers stratégiques lancées par le Roi Mohammed VI. De l’initiative de développement humain qui a mis la libération du citoyen marocain des affres de la pauvreté et au besoin au cœur du projet politique, en passant par l’instauration de l’instance équité et réconciliation qui a permis de panser les blessures marocaines et de les réconcilier avec leur passé jusqu’à l’imagination d’un projet d’autonomie du Sahara marocain dans le cadre du processus de régionalisation avancée qui permet de dérouiller les grands blocages politiques été diplomatiques. Sans parler de l’institutionnalisation de la culture des droits de l’homme au sein de l’appareil de l’Etat, du nouveau concept de l’autorité, du nouveau code de la famille. Autant de choix qui ont balisé le chemin du Maroc vers la démocratie et le vivre ensemble harmonieux. Ces initiatives royales, qui ont agi comme autant de marqueurs positifs de la vie politique marocaine, ont été généreusement développées et décodées.

Commandeur des croyants

Sur le plan religieux, le Maroc a brillé par le discours de modération dont il est devenu en Europe comme en Afrique le porte emblème. Incarnant dans l’ADN de son régime politique un islam de la modération et du juste milieux, le Maroc, porté par la commanderie des croyants est devenu une grande fabrique des stratégies de lutte contre les discours radicaux, avec un savoir-faire, une expertise reconnus internationalement. Le tout nourri par une incontestable légitimité religieuse qu’incarne le Roi du Maroc. La création d’un institut pour former des imams dont le rayonnement atteint aussi bien les territoires africains qu’européen, est venue concrétiser cette volonté de lutter contre les radicalismes.

Aussi bien pour une Afrique dont une partie de la jeunesse déboussolée par les frustrations de la mondialisation pourrait être tentée par les sirènes mélodieux mais trompeurs du discours radical, qu’une Europe qui perçoit la posture islamique comme une menace pour ses croyances et son identité, le Maroc aspire à jouer un rôle modération conceptuelle qui éteint les flammes de la radicalité et des ruptures.

Parallèlement à une maîtrise du discours religieux et des mécanismes de sa fabrique et de sa diffusion, le Maroc de Mohammed VI a brillé aussi dans un domaine devenu le grand cauchemar sécuritaire de l’ensemble de la planète: la lutte contre le terrorisme. Avec une expertise incontestable, une originalité à toute épreuve, les services de sécurité marocains ont montré un savoir-faire qui su éviter au monde de monstrueux drames et déjouer des attentats meurtriers. Dans ce domaine, l’expertise des marocains s’est imposé comme un label de qualité.

Mohammed VI à d’autant plus de mérites d’avoir géré le pays dans le calme, la sérénité et une indéniable intelligence politique que pendant ces vingt années, le Maroc fut acculé, sur un plan stratégique et géographique, par trois redoutables antagonismes. Celui du Nord où l’Espagne s’échinait, concurrence oblige, à faire barrage au commerce du Maroc avec le juteux marché européen. Et celui de l’Est où le voisin algérien, encore travaillé par une pathologique et inexplicable obsession marocaine, déploya sa permanente capacité de nuisance. Ou encore dans le sud vers le Sahel où s’activaient de nombreux groupes terroristes qui menaçaient lourdement la stabilité de la région.

En réponse à ces pressions, Mohammed VI transforma le Maroc en vrai acteur régional et un passage obligé pour tous ceux qui veulent investir dans le continent africain. Ses tournées africaines laissent dans les esprits sa mémorable influence sur ce continent. Sa popularité dans le Monde arabe connaît une fulgurante ascension. Son rapport avec les grandes puissances, Europe et Amérique, fait de lui un incontournable interlocuteur.

Projets structurants

D’ailleurs des projets aussi gigantesques qu’inédite ont fait briller l’étoile du Maroc de milles feux. D’abord il y a eu le lancement du port Tanger Med dont la seconde partie vient juste d’être inauguré propulsant le Maroc au rang d’incontournable acteur Méditerranéen. Le port de Tanger Med est un des Joyaux maritimes de tout le continent africain. De part sa position stratégique et ses immenses capacités, il sera amené à jouer un rôle structurant dans l’ensemble de la chaîne de distribution du commerce mondial.

Ensuite ce fut le lancement du premier train à grande vitesse (LGV Al Borak) sur le continent africain reliant Tanger à Casablanca en un temps record. Ce projet structurant est le fruit d’une importante collaboration économique et politique entre Paris et Rabat, entre la rive Nord de la Méditerranée et sa rive Sud. Le Maroc a montré sa capacité à inscrire son action dans des projets gigantesques capables de créer d’autres destinées et à mettre la grande technologie au service de son développement. Le Maroc, premier pays arabe et africain dont les citoyens vont se familiariser avec la technologie à grande vitesse, est aussi source d’une particulière distinction.

La troisième image qui a renfloué le capital symbolique marocain est le lancement par la société Arianespace d’un satellite d’observation marocain Mohammed VI-B. Avec l’accès à l’imagerie satellite, le Maroc entre dans le club très fermé des pays qui vont domestiquer les riches informations fournis par un œil spatial et les mettre au service de son territoire pour développer ses ressources et protéger ses richesses. Il rejoindra dans l’espace son binôme le Satellite MOHAMMED VI – A, lancé par Arianespace le 7 novembre 2017. Cette aventure spatiale marocaine fait lustrer de manière éclatante l’image et la réputation du pays. Elle consolide sa crédibilité et lui donne des moyens inédits de contrôler son évolution.

Diplomatie gagnante

Ces politiques ont été portées par une diplomatie des plus intelligentes. D’ailleurs Il y a d’autres mots qui peuvent décrire les choix diplomatiques de Mohammed VI depuis son accession au Trône il y a 20 ans. Visionnaires, flamboyants, efficaces, réalistes, intransigeantes, volontaires, engagés…autant de postures qui ont donné à la diplomatie marocaine une ligne de conduite cohérente et qui ont fini par porter leurs fruits sur le terrain des réalisations et aux nues l’image du Maroc dans le monde. Le grand tournant avait débuté par la révélation d’une passion pour l’Afrique. Le Maroc a retrouvé ses racines naturels, les contours de sa profondeur géographique et stratégique. Cela s’est poursuivi par l’élaboration d’une solide alliance avec les pays arabes, notamment ceux d’un agglomérat aussi puissant qu’incontournable qu’est le conseil de coopération du golfe. Cela s’est consolidé par l’établissement d’une relation réaliste, mutuellement gagnante entre les grandes puissances du globe que sont les états unies, la Russie et la chine. Cela s’est réalisé à travers l’élaboration d’un dialogue franc et rentable avec l’Union européenne, dont la relation avec la France, ancienne puissance coloniale, demeure la principale mais pas l’unique clef de voute. Cela s’est traduit enfin par une intransigeance de conviction avec le voisinage algérien qui malgré ses relents belliqueux, a été largement contenu dans son agressivité.

Aujourd’hui , au fil des année et des projets politiques et économiques qui façonnent le nouveau Maroc, Mohammed VI a réussi à établir avec les marocains un lien d’une extrême puissance basé sur l’adhésion à ses projets et le respect pour sa personne. Dans leurs rapports avec leur Roi, les marocains ne ressentent plus cette notion de contrainte ou d’obligation. En vingt ans de règne, le Maroc est devenu un pays où il fait bon vivre, où il est opportun d’investir et de lancer des affaires. Un îlot de stabilité où la détention politique a pratiquement disparu, où la presse connaît des marges de liberté inédites, où les droits de l’homme sont respectés et encadrés. Autant de facteurs objectifs qui font que Mohammed VI soit devenu une vraie fierté marocaine.

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