Maroc: la Cour des comptes fait état de contraintes liées à la mise en oeuvre de la stratégie nationale d’efficacité énergétique

La Cour des comptes a fait état, dans son rapport annuel au titre de 2018, de certaines contraintes liées à la mise en oeuvre de la stratégie nationale d’efficacité énergétique.

Dans son appréciation du processus d’élaboration, de consécration et de mise en œuvre de la stratégie nationale d’efficacité énergétique, la Cour des comptes relève que le projet de stratégie n’a pas prévu de procédures de calcul des économies d’énergie et de sa normalisation, ni de dispositif de traitement des éléments d’incertitude et des effets multiplicateurs futurs sur le marché de certaines mesures d’économie d’énergie qui ne relèvent pas systématiquement de l’intervention publique.

Ces facteurs rendent difficile l’appréciation des performances de l’efficacité énergétique réalisée, note le document, relevant par ailleurs que le rythme de parachèvement du cadre juridique avance lentement pour la mise en application de la réglementation technique.

En plus, la contrainte de financement est d’autant plus pesante devant l’insuffisance des mécanismes d’incitation financière et l’éparpillement des supports budgétaires existants qui relèvent essentiellement des actions publiques, explique la même source, ajoutant que ces incitations concernent les subventions directes, les incitations fiscales et la création d’un fonds dédié à l’efficacité énergétique.

Concernant le secteur du transport, la Cour des comptes constate que malgré l’effort engagé pour l’amélioration de l’efficacité énergétique, les mesures prises n’ont pas eu suffisamment d’effets, faisant remarquer que les actions engagées sont focalisées sur la branche d’activité des transports routiers.

Ce secteur demeure contraint par de nombreux obstacles d’ordre juridique, organisationnel et de gestion, poursuit le rapport, relevant en outre que l’insuffisance de normes dédiées au secteur du transport à même de servir des objectifs d’amélioration d’efficacité énergétique et de données relatives à la consommation énergétique dans le secteur du transport (routier, ferroviaire, aérien et maritime) et en sus de la non définition d’indicateurs techniques d’évaluation des effets et des impacts des mesures d’efficacité énergétique au niveau des sous branches d’activité.

En plus, l’absence d’une vision intégrée de gestion des déplacements urbains entraîne une forte pression sur les infrastructures et les réseaux routiers et une perturbation du trafic, indique la même source, soutenant que cette situation est aggravée par l’insuffisance d’un cadre juridique régissant l’organisation, la gestion et la planification des déplacements urbains et la définition de leurs périmètres ainsi que la régulation des modes de transport public.

S’agissant du secteur industriel, le rapport relève que les projets arrêtés par le programme d’efficacité énergétique dans l’industrie, lancé en 2011 ont été partiellement réalisés en raison des insuffisances touchant divers aspects dont notamment le développement institutionnel et réglementaire, l’appui au financement et le renforcement des capacités et des accréditations.

Par ailleurs, les mesures et les actions programmées concernant l’information et le conseil, la réglementation technique et les incitations financières n’ont pas été conçues dans un souci de ciblage et d’adaptation tenant compte de la diversité du tissu industriel et de la spécificité de ses filières ainsi que la taille des entreprises, selon le document qui fait en outre état d’une carence en matière de proposition de solutions innovantes d’économie d’énergie.

Pourtant, de nombreuses solutions innovantes d’efficacité énergétique existent pour l’industrie, insiste la Cour des comptes, ajoutant que bien que la politique énergétique nationale ait prévu la mise en œuvre des audits énergétiques obligatoires dans le secteur de l’industrie, ceux-ci ne sont pas encore généralisés et aucun calendrier prévisionnel de leur mise en œuvre n’a été arrêté.

Aussi, il est relevé qu’au niveau des entités industrielles, la mise en place d’une comptabilité et d’un tableau de bord "Energie" reste un point faible dans le processus de maîtrise de l’énergie, indique le rapport, précisant que cette faiblesse est couplée aux carences en matière de contrôle et de mesurage.

Le rapport rappelle aussi que les gains en efficacité énergétique les plus significatifs sont réalisés en adoptant une approche systémique intégrant le niveau organisationnel et opérationnel (chaîne de production).

Pour le secteur du bâtiment, le document relève que la mise en œuvre effective de la nouvelle disposition prévue par le règlement thermique de construction n’a pas été précédée par la définition des modalités d’exercice des contrôles techniques et des sanctions pour non-respect de ces dispositions.

De plus, ce règlement n’a pas fixé les performances énergétiques minimales intégrant aussi bien le bâtiment et ses équipements, sachant que ces équipements représentent plus des 2/3 de la consommation énergétique globale, explique la Cour, notant par ailleurs que malgré l’importance du parc des bâtiments existants, le règlement thermique ne s’applique qu’aux bâtiments neufs.

Si cette exclusion pose certes des contraintes de surcoût et un renforcement des capacités professionnelles métier du secteur du bâtiment, celle-ci conduirait à la consécration d’une dichotomie dans le secteur du bâtiment, estime la même source, faisant observer que pour l’application de la nouvelle réglementation thermique des bâtiments, des surcoûts à l’investissement ont été identifiés et évalués par l’AMEE à travers les projets pilotes réalisés lors de la préparation de la réglementation.

Le rapport déplore également l’absence de mesures incitatives de financement pour l’implémentation de l’efficacité énergétique dans le secteur du bâtiment, ce qui conduirait les promoteurs immobiliers à répercuter ces surcoûts sur le consommateur final, notant d’autre part que l’élaboration d’un label marocain de performance énergétique pour les bâtiments résidentiels fait encore défaut.

Ce label devrait constituer un levier pour le renforcement du développement de la politique d’efficacité énergétique dans le secteur de l’habitat, recommande la Cour des comptes.

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