Maroc: « La législation successorale inégalitaire participe à augmenter la vulnérabilité des femmes » (CNDH)

Le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) a présenté, mardi à Rabat, son rapport thématique "Etat de l’égalité et de la parité au Maroc: préserver et rendre effectifs les finalités et objectifs constitutionnels".

Ce 6eme rapport thématique validé par la 10eme plénière du CNDH en juillet dernier, se veut un bilan analytique 10 ans après la réforme du code de la famille et 4 ans après la constitution de 2011 et 20 ans après l’adoption de la plateforme de Beijing.

Le rapport se décline en trois grandes parties portant sur "la pratique conventionnelle du Maroc et dichotomie juridique", "égalité et parité en droits économiques, sociaux et culturels" et "les politiques publiques et leurs impacts sur les femmes les plus vulnérables aux violation de leurs droits".

Dans sa première partie, le rapport relève que le taux des mariages avant l’âge légal a presque doublé en une décennie, passant de 7 pc en 2004 à près de 12 pc en 2013, précisant que 99,4 pc des cas concernent les jeunes filles. Le rapport indique également qu’en dépit des efforts des autorités publiques dans la lutte contre les violences faites aux femmes, la forte prévalence (62,8 pc) des violences fondées sur le genre (VGF) qui concerne 6,2 millions de femmes, est liée en grande partie à l’acceptation sociale des VFG et à l’impunité dont bénéficient les agresseurs.

Dans la partie intitulée "égalité et parité en droits économiques, sociaux et culturels", le CNDH note que durant les dernières décennies, les femmes ont bénéficié d’un accès plus large aux services de santé, relevant que la mortalité maternelle a enregistré une baisse importante avec 112 cas pour 100.000 naissances vivantes en 2009-2010, soit un recul de 50,7 pc par rapport à 2003-2004.

Pour ce qui est du droit égalitaire et équitable à une éducation de qualité tout au long de la vie, le Conseil national des droits de l’homme indique que selon l’Enquête nationale sur l’analphabétisme (ministère de l’Education Nationale 2012), le taux d’analphabétisme serait de 28 pc (19 pc dans l’urbain et 42 pc dans le rural), précisant que les femmes sont plus touchées par l’analphabétisme (37 pc des femmes contre 25 pc pour les hommes) et les rurales encore davantage (55 pc des femmes contre 31 pc pour les hommes).

Concernant le droit à un travail salarié décent, il ressort du rapport qu’à l’échelle nationale, le taux d’activité des hommes est près de 3 fois supérieur à celui des femmes (4 fois en milieu urbain et 2,2 fois en milieu rural), soulignant que l’activité féminine enregistre une baisse continue (28,1 pc en 2000 et 25,1 pc en 2013), ce qui signifie que le taux d’emploi des femmes au niveau national a baissé durant la dernière décennie (de 25 pc en 2000 à 22,6 pc en 2014).

Dans le chapitre réservé aux femmes pauvres âgées, le rapport affirme qu’un peu plus de 8 femmes âgées sur 10 sont analphabètes, 94 pc ne perçoivent pas de pension de retraite, 83,7 pc ne bénéficient d’aucune couverture de santé et enfin, 62,8 pc n’ont pas accès aux soins de santé pour cause de ressources limitées (55,1 pc des hommes), ajoutant que le nombre de centres d’accueil pour les personnes âgées sans ressources ne dépasse point 44 centres accueillant 3504 personnes âgées dont plus de la moitié sont des femmes (2011).

Egalité et parité

Ce 6ème rapport thématique que présente le CNDH, apporte une série de recommandations visant à consacrer les principes de l’égalité et de la parité.

Dans une déclaration à la presse, le président du CNDH, Driss El Yazami, a indiqué qu’il ne pouvait y avoir de processus démocratique ni développement équitable et durable sans l’intégration et l’implication de la moitié de la société marocaine, relevant que le Conseil a toujours été convaincu, depuis son installation, de la centralité de la question de la parité et de son importance sur les chantiers de l’édification démocratique et économique au Maroc.

Dans son rapport thématique sur l’égalité et la parité au Maroc, quatre ans après l’adoption de la Constitution de 2011 qui érige ces deux questions en principes constitutionnels, le CNDH souligne les progrès réalisés dans ce domaine ainsi que les différents entraves à la consécration de l’égalité et de la parité.

"La législation successorale inégalitaire participe à augmenter la vulnérabilité des femmes à la pauvreté", recommande ainsi le CNDH qui recommande une égalité entre les hommes et les femmes en matière de conclusion et de dissolution du mariage, de tutelle des enfants et en matière successorale.

D’après les organisateurs, ce rapport thématique, le premier du genre sur l’état de l’égalité et de la parité au Maroc, entend présenter une analyse de la réalité des droits de la femme et de l’égalité au Maroc.

M. El Yazami a formulé de le vœu de voir ce rapport initier un large débat, notamment dans le sillage de la présentation au parlement courant cette année de 3 projets de loi relatif à l’instance pour l’équité, à la lutte contre toutes les formes de violences à l’égard des femmes et au conseil de la famille et de l’enfance, notant que ces projets de loi sont fondamentaux pour aller de l’avant dans ce domaine.

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite