Maroc : Du théâtre de rue devant le parlement pour réclamer l’abolition de la peine de mort

Narjis Rerhaye (A Rabat)

« Du bruit et de la musique pour dire non à la peine de mort ». La section marocaine d’Amnesty international est pied d’œuvre pour préparer un sit in pas comme les autres, devant le parlement, à Rabat. Jeudi 12 avril, à 17h, de jeunes artistes vont se produire pour dire à leur manière, en danse et en musique, leur rejet du châtiment suprême et réclamer à « corps et à cri » l’abolition de la peine capitale. « C’est du théâtre de rue. Une troupe musicale sera également de la partie pour accompagner ces scènes très visuelles. C’est à travers cette expression artistique que nous disons non à la peine de mort au Maroc. Nous allons taper sur les tam tam de l’abolition de la peine de mort. Nous allons danser l’espoir. Nous allons choisir le droit fondamental à la vie », résume Salah Abdallaoui, un activiste d’Amnesty Maroc.

C’est ce jeudi 12 avril que le rapport mondial d’Amnesty international sur les condamnations à mort et les exécutions en 2017 sera présenté à Rabat lors d’une conférence de presse donnée par Mohamed Sektaoui, le directeur de la section marocaine d’Amnesty international. En 2017, si aucune exécution n’a été enregistrée en terre marocaine, la peine capitale continue par contre d’être prononcée. Depuis la dernière exécution en 1993, le Maroc est dans un entre-deux, hésitant entre un pays en avant, deux pas en arrière. En 2016, six condamnations à mort ont été recensées au Maroc par Amnesty international. « Les dernières déclarations , rapportées par la presse, du ministre des droits de l’homme, Mostafa Ramid, sont loin d’être rassurantes. Il y a quelques semaines, il disait son rejet absolu de l’abolition de la peine de mort. Cela montre bien que la question de la suppression de ce châtiment cruel est loin d’être à l’ordre du jour de l’agenda de ce gouvernement. Dans le projet de réforme du code pénal, 9 articles prévoient la peine capitale comme condamnation. Certes, le nombre d’articles prévoyant la peine de mort a été réduit, mais une telle condamnation existe bel et bien », rappelle Salah Abdellaoui.

Au Maroc, le conseil national des droits de l’homme n’a de cesse de mettre en avant le droit à la vie que consacre la constitution adoptée en 2015. Le gouvernement dirigé par le leader islamiste Saadeddine El Othmani ne semble avoir la même perception universelle des droits. « Dans les milieux conservateurs, on argue que la société marocaine ne serait pas prête à voir la peine de mort abolie. Les franges les plus religieuses brandissent la loi islamique. En même temps Rabat s’est engagé dans un moratoire en n’exécutant plus personne depuis le début des années 1990 », fait valoir cet avocat, abolitionniste convaincu.

A Amnesty Internatlonal, on le dit haut et fort : un soutien appuyé de la population à la peine de mort va souvent de pair avec l’absence d’informations fiables sur le sujet et l’idée erronée qu’elle réduira la criminalité. « De nombreux gouvernements sont enclins à promouvoir ce leurre, alors qu’aucun élément probant ne vient l’étayer. Les facteurs cruciaux qui sous-tendent l’application de la peine de mort sont souvent mal compris – notamment le risque d’exécuter un innocent, le caractère inique des procès et le caractère discriminatoire de la peine de mort.

Ces éléments contribueraient à une compréhension pleinement informée du sujet. Les gouvernements doivent s’ouvrir à cette information, tout en prônant le respect des droits humains grâce à des programmes d’éducation publique. Ce n’est qu’à ce moment-là qu’un véritable débat sur la peine de mort pourra avoir lieu, » peut-on lire dans les documents mis en ligne par Amnesty..

En septembre 2017, 105 pays avaient aboli la peine capitale pour tous les crimes. Et à ce jour, 140 pays ont aboli la peine de mort en droit ou en pratique. Bonne nouvelle, la volonté de mettre fin à la peine capitale est majoritairement partagée. «Mais la lutte doit se poursuivre pour abolir définitivement chez nous ce châtiment cruel et irréversible », conclut l’activiste S. Abdellaoui.

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