Macron tend la main à Poutine juste avant le G7

Déterminé à jouer les médiateurs, Emmanuel Macron reçoit lundi Vladimir Poutine dans sa résidence de vacances de Brégançon, cinq jours avant d’accueillir à Biarritz les dirigeants du G7, une manière d’inclure à nouveau la Russie dans ce rendez-vous mondial dont elle est exclue depuis 2014.

Le président russe sera son hôte pour une séance de travail puis un dîner, pour la seconde fois depuis leur soirée sous les ors de Versailles en 2017.

Au menu devrait figurer en tête le conflit dans les régions séparatistes pro-russes de l’est de l’Ukraine, qui a valu à la Russie, avec l’annexion de la Crimée, l’exclusion du G8 et des sanctions de l’UE.

Ils aborderont également les crises internationales où la Russie joue un rôle crucial, en particulier la guerre en Syrie et les tensions entre Iran et Etats-Unis sur l’accord nucléaire.

Pour Paris, le choix de cette rencontre juste avant le G7 – convenue entre les deux hommes au G20 d’Osaka – "est significatif" de la volonté du chef de l’Etat de faire participer la Russie aux discussions multilatérales. De même, il retournera voir le président chinois cet automne.

Depuis 2017, le Français et le Russe sont restés régulièrement en contact, sans qu’Emmanuel Macron s’abstienne de critiques. "L’Europe doit dialoguer avec la Russie", laquelle doit "faire des efforts", avait-t-il résumé en juin.

"Ces derniers mois, les contacts dans le domaine politique se sont intensifiés. Les contacts dans le domaine culturel et humanitaire sont aussi très intenses. En 2020, la tenue des +Saisons russes+ est prévue quasiment dans toutes les régions de la France", a souligné un conseiller du Kremlin.

Pour éliminer un point de crispation, la justice russe vient de libérer le banquier français Philippe Delpal, détenu depuis février sous l’accusation de fraude et désormais assigné à résidence. M. Macron avait évoqué son cas à plusieurs reprises avec le président russe.

– Une chance de progrès –

Sur l’Ukraine, Paris espère "ouvrir un nouvel espace pour la négociation" et a invité Vladimir Poutine à répondre "de manière encourageante" aux gestes d’apaisement du nouveau président ukrainien Zelensky.

"Le principal sujet visiblement sera de raviver les accords de Minsk" pour la paix dans l’est de l’Ukraine, estime Alexandre Baounov, analyste au centre Carnegie. "La principale promesse du nouveau président ukrainien, c’est de mettre fin à la guerre. Vladimir Poutine est prêt à une relance (des efforts de paix) si un statut fédéral est accordé au Donbass". "Là, il y a une vraie chance de progrès. Macron serait ravi de mettre fin à la guerre dans le Donbass, pour entrer dans l’histoire comme Nicolas Sarkozy avec la Géorgie", ajoute l’analyste.

"Mais Moscou n’ira dans ce sens que si ses principales conditions sont respectées : une période transitoire ainsi que des élections locales sans les principaux partis ukrainiens."

Sur la Syrie comme sur l’Iran, Paris explique vouloir demander au président russe "d’user de son influence" sur ses alliés.

La France juge "très préoccupante" la situation dans la province syrienne d’Idleb, où le régime est à l’offensive avec l’aviation russe, "nous avons un message très simple aux Russes: +exercez votre influence auprès de Damas pour que cette opération cesse+", indique Paris. La France craint à la fois un exode massif et la dispersion de groupes jihadistes dangereux.

"Un nouveau sommet quadripartite (Russie-France-Allemagne-Turquie) sera peut-être évoqué" sur ce sujet, précise le Kremlin.

La France espère enfin un appui plus fort de la Russie pour sauver l’accord sur le nucléaire iranien (JCPOA). "Comme garant du JCPOA, Paris et Moscou doivent pouvoir travailler ensemble à la désescalade". "Si la Russie réaffirme que l’Iran doit respecter ses obligations du JCPOA, cela renforcera beaucoup notre position", souligne une source diplomatique française.

Emmanuel Macron critiquera-t-il la situation des droits humains en Russie, alors que le Kremlin arrête brutalement des centaines de manifestants ?

A Versailles, il n’avait pas hésité à critiquer publiquement les arrestations d’homosexuels en Tchétchénie. Il est intervenu en faveur du cinéaste Oleg Sentsov et à Saint-Pétersbourg, avait rencontré des opposants russes.

Ces dernières semaines, la France a critiqué les arrestations d’opposants et le recours excessif à la force. Moscou a rétorqué que la France n’avait pas à lui "donner de leçon" et l’a accusée d’avoir usé de "toutes les méthodes répressives" contre les "gilets jaunes".

"Il faut pouvoir assumer nos désaccords. C’est vrai pour la Russie de Poutine mais que dire des Etats-Unis de Trump, de la Chine de Xi ? Le rôle de la France est d’aller là ou autres ne vont pas. Si le président ne le fait pas, qui le fera"? fait valoir la présidence française.

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite