Macron renoue avec la tradition en invitant la presse à l’Elysée

Une longue conférence de presse à l’Elysée, à l’ancienne, comme François Hollande ou Nicolas Sarkozy: Emmanuel Macron se livrera pour la toute première fois jeudi à cet exercice typique de la Ve République pour sortir de la crise des "gilets jaunes".

A 18H00 dans la salle des fêtes de l’Elysée, plusieurs centaines de journalistes se retrouveront face au chef de l’Etat en présence de nombreux ministres. Après une introduction, il se prêtera au jeu des questions-réponses sur ses mesures destinées à répondre à la crise des "gilets jaunes" qui ébranle l’exécutif depuis cinq mois.

Sur le ton de la boutade, Daniel Cohn-Bendit a averti lundi sur LCI les journalistes: "Amenez vos sandwiches parce que ca va durer longtemps". La conférence de presse devrait en effet dépasser les deux heures, retransmise en direct à la télévision.

En acceptant un échange direct avec les journalistes, "c’est une rupture assez forte, une revanche de l’ancien monde", estime un conseiller proche de l’exécutif. C’est aussi, selon lui, "une main tendue à la presse" après un début de quinquennat marqué par des relations tendues avec le 4e pouvoir.

En poussant la porte de l’Elysée au printemps 2017, Emmanuel Macron avait en effet voulu tourner le dos à une présidence Hollande jugée trop bavarde et proche des journalistes. Son credo: contourner les médias pour parler directement aux Français via les réseaux sociaux, comme le prônaient son conseiller spécial Ismaël Emelien et sa conseillère presse Sibeth Ndiaye, tous deux partis aujourd’hui.

Ni conférence de presse donc, ni même d’interview au JT de 20 heures. Emmanuel Macron a annulé dès son arrivée la traditionnelle interview télé du 14 juillet.

A l’étranger, il n’a pu échapper aux points de presse avec les chefs d’Etat étrangers ni aux conférences de presse post-sommets. Mais il a immédiatement averti qu’il refuserait de répondre aux questions sur la politique française. Il est vrai que François Hollande, interrogé sur sa vie privée jusque dans ses déplacements, s’y était laissé piéger. Au final, Emmanuel Macron a suivi à son gré cette règle auto-proclamée, selon la question posée.

"En rupture"

Mais il a été loin de rester muet. Il s’est exprimé énormément par des canaux différents: entretiens dans des journaux choisis comme l’hebdomadaire Le Point à qui il parle longuement en 2017, allocutions, vidéos officielles ou de coulisses, tweets, médias peu conventionnels (BFMTV et Mediapart ensemble, Brut, Konbini). Il a cependant accepté le très populaire JT de 13 heures de TF1.

C’est surtout à l’occasion de ses nombreux bains de foule, filmés en direct, qu’il a parlé librement, en répondant aux Français qui l’interpellaient par des petites phrases parfois cassantes qui ont fait le buzz et forgé son image clivante.

Le grand débat lui a offert une nouvelle scène pour défendre ses choix pendant des dizaines d’heures. Mais sans faire d’annonces ayant marqué les mémoires.

Après le départ d’Ismaël Emelien et de Sibeth Ndiaye de l’Elysée, le chef de l’Etat, actuellement sans conseiller en communication officiel, a choisi un retour à la tradition des conférences de presse dans la salle des fêtes de l’Elysée.

Celles de Charles de Gaulle ou de François Mitterrand sont restées fameuses. Nicolas Sarkozy en donnait une par an environ. La dernière en date, donnée par François Hollande en 2015, avait tourné à son désavantage et il avait renoncé à celle de 2016 pour éviter des questions sur la primaire à gauche ou sa candidature.

"Chaque nouveau président adopte une communication en rupture avec le précédent et finit par faire exactement la même chose", commente l’expert en communication politique Philippe Moreau-Chevrolet. "Il voulait tenir la presse à distance et la réinvite à l’Elysée. Chassez la cinquième République, elle revient au galop."

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