Macron nomme Sylvie Goulard, « Européenne convaincue », à la Commission

Deux ans après un bref passage au gouvernement, Sylvie Goulard a été choisie mercredi par Emmanuel Macron pour siéger à la Commission européenne, une consécration pour cette spécialiste de l’UE aux compétences reconnues, mais toujours liée à une affaire judiciaire en cours.

Cette ancienne eurodéputée de 54 ans est "une Européenne convaincue" dont "l’expérience et l’expertise sont reconnues à la fois en Europe et en France", a expliqué l’Elysée.

Dans "un moment crucial pour l’Europe", Sylvie Goulard "a la capacité de jouer un rôle majeur au sein de la prochaine Commission", qui entrera en action le 1er novembre à Bruxelles sous la présidence de l’Allemande Ursula Von der Leyen, a ajouté la présidence.

Emmanuel Macron affiche en effet une forte ambition pour "refonder" dans les prochaines années l’Union européenne, un objectif jusqu’à présent freiné par les négociations sur le Brexit et les problèmes politiques dans plusieurs pays, notamment l’Allemagne et l’Italie.

Le portefeuille qu’occupera Sylvie Goulard n’est pas encore déterminé, Ursula Von der Leyen ayant débuté cette semaine les entretiens avec les candidats proposés par les 27 capitales. Paris a affiché sa préférence pour un portefeuille centré sur l’économie, le commerce ou l’environnement.

A Bruxelles et Strasbourg

Née le 6 décembre 1964 à Marseille dans une famille d’origine italienne qui parlait français à la maison, Sylvie Goulard, brune aux cheveux courts, passe pour connaître parfaitement les arcanes européennes.

Cette énarque débute sa carrière en 1989 au Quai d’Orsay, dans l’équipe chargée du dossier de la réunification de l’Allemagne.

Elle rejoint ensuite Bruxelles, d’abord comme conseillère politique du président de la Commission européenne, l’Italien Romano Prodi, entre 2001 et 2004, et siège ensuite au Parlement européen de 2009 à 2017, élue sur la liste du MoDem.

Excellente germaniste, parlant aussi couramment l’anglais et l’italien, Mme Goulard a fait bénéficier Emmanuel Macron de ses réseaux lors de la campagne présidentielle de 2017.

Elle a ensuite été nommée ministre des Armées dans le premier gouvernement d’Édouard Philippe, en mai 2017. Elle est contrainte à la démission du gouvernement dans le cadre de l’affaire d’emplois fictifs présumés des assistants des eurodéputés MoDem -un parti qu’elle a quitté-, en même temps que François Bayrou et Marielle de Sarnez.

"Je souhaite être en mesure de démontrer librement ma bonne foi", avait-elle alors expliqué. Cette affaire a donné lieu depuis à l’ouverture d’une information judiciaire. Mme Goulard n’a jusqu’à présent pas été convoquée.

"Grosse gêne ! Ce qui l’empêche d’être ministre en France est négligeable à l’échelle européenne !", a réagi l’écologiste Yannick Jadot dans un tweet.

Son poste de "conseiller spécial" pour un think tank américain, pour une rémunération supérieure à 10.000 euros par mois, alors qu’elle était eurodéputée, avait par ailleurs suscité un début de polémique.

"Positions tranchées"

Après sa démission, Sylvie Goulard a été nommée en janvier 2018 à la direction de la Banque de France, au poste de sous-gouverneure.

Les amis, comme ses ennemis, de cette mère de trois enfants louent ses compétences ainsi que son carnet d’adresses européen bien fourni.

Au Parlement européen, elle était l’une des membres les plus en vue du groupe libéral ALDE, l’ancêtre du groupe "Renaissance" dominé aujourd’hui par les eurodéputés de La République en marche.

Mais à Strasbourg, Mme Goulard ne s’est pas fait que des amis. "Elle affiche des positions tranchées et individuelles, qui font parfois grincer des dents", assurait une source au Parlement en 2017.

Sa tentative – finalement avortée – de briguer en 2016 la présidence de l’hémicycle contre le patron du groupe centriste Guy Verhofstadt, en faisant alors valoir la nécessité d’une candidature féminine à ce poste clé, a notamment illustré son caractère réputé impétueux – voire "autoritaire" et parfois même "cassante", selon ses détracteurs – alors qu’elle aime à répéter qu’elle n’est pas "une potiche".

Cette ancienne enseignante au Collège d’Europe à Bruges (Belgique), matrice ultrasélective de la haute fonction publique européenne, est par ailleurs une proche de l’ancien Premier ministre italien Mario Monti, avec qui elle a cosigné un ouvrage plaidant notamment pour la renaissance d’une Europe politique.

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