Libye : discours martial de Haftar, offensive diplomatique du gouvernement

Offensive diplomatique contre offensive militaire en Libye: le chef du gouvernement reconnu par la communauté internationale a annoncé lundi une tournée des capitales européennes, au lendemain de l’appel de son rival, le maréchal Khalifa Haftar, à redoubler d’efforts pour conquérir la capitale Tripoli.

Le Premier ministre du gouvernement d’union nationale (GNA), Fayez al-Sarraj, rencontrera successivement le chef du gouvernement italien Giuseppe Conte mardi matin, la chancelière allemande Angela Merkel à Berlin dans la soirée, puis le président français Emmanuel Macron mercredi à Paris, détaille un communiqué du porte-parole du ministère des Affaires étrangères du GNA.

Une visite en Grande-Bretagne est également envisagée dans le cadre de cette tournée qui vise à "réunir des soutiens contre l’agression" du maréchal Haftar, est-il précisé dans le communiqué.

Le pays, en proie à l’instabilité depuis la chute de Mouammar Kadhafi en 2011, a de nouveau basculé dans une spirale de violences avec le lancement par l’homme fort de l’est du pays, le maréchal Haftar, d’une offensive militaire sur Tripoli, siège du GNA, le 4 avril.

Après une progression rapide, ses troupes de l’autoproclamée Armée nationale libyenne (ANL) piétinent depuis un mois aux portes de Tripoli, barrées par les forces loyales au GNA, dont des groupes armés de la ville de Misrata. Des combats se déroulent dans la banlieue sud de la capitale, ainsi qu’au sud de la ville.

La visite de M. Sarraj à Paris revêt une importance particulière pour le GNA qui a, à plusieurs reprises, accusé la France de soutenir, au moins politiquement, le maréchal Haftar.

Les autorités françaises ont toujours démenti ces accusations, affirmant leur opposition à une opération militaire et leur attachement à "un processus politique sous l’égide de l’ONU".

"Un mois de jihad"

Depuis le 4 avril, les affrontements et les bombardements ont fait au moins 432 morts, 2.069 blessés et plus de 55.000 déplacés, selon l’ONU, qui a multiplié les appels à cesser les hostilités.

Dimanche, la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (Manul) avait une nouvelle fois exhorté les belligérants à "une trêve humanitaire d’une semaine renouvelable", à l’occasion du début du ramadan lundi.

Mais quelques heures plus tard, le maréchal Haftar a au contraire appelé ses troupes à "infliger une leçon plus dure encore" aux forces qui défendent la capitale libyenne et le GNA.

"Je vous appelle à infliger à l’ennemi, avec votre force et votre détermination, une leçon plus dure et plus grande encore que les précédentes (…) jusqu’à ce que vous le déraciniez de notre pays bien-aimé", a-t-il déclaré dans un message lu par un porte-parole de l’ANL, le général Ahmad al-Mesmari.

Avec l’entrée lundi dans le "mois béni du ramadan, le mois du jihad", la guerre sainte, le maréchal Haftar a demandé à ses troupes de se montrer "braves et impitoyables" pour éradiquer "le terrorisme".

L’homme fort de la Cyrénaïque avait justifié son offensive par la volonté de "purger l’ouest" libyen "des terroristes et des mercenaires" qui composent, selon lui, les différents groupes armés de la région.

"Dans le cas du retrait de l’ennemi, il faut que les forces le pourchassent avec force et rapidité, qu’elles ne lui permettent pas de s’enfuir et l’anéantissent", a-t-il affirmé dans son message.

Parlement divisé

Sur le plan politique, le Parlement libyen a fait un pas dimanche vers une scission durable, avec la désignation par 42 députés dissidents d’un président "provisoire" du Parlement, en alternative au président actuel, Aguila Salah, soutien du maréchal Haftar.

Le Parlement, composé de 188 députés élus en 2014, siège dans l’est du pays, où il a fui après la prise de Tripoli par une coalition de milices. D’abord installé à Tobrouk, il a déménagé le 13 avril à Benghazi, fief du maréchal Haftar.

Après le lancement de l’offensive, 42 députés ont décidé de boycotter les travaux de l’assemblée pour dénoncer l’opération militaire en cours.

Lors de leur deuxième réunion dimanche, ils ont nommé un président "provisoire" du Parlement, leur doyen Sadeq al-Keheli, "pour une durée de 45 jours".

Cette décision symbolique "a pour but de donner la possibilité à d’autres députés de nous rejoindre, certains n’ayant pas pu le faire à cause de la situation sécuritaire à Tripoli", a expliqué à l’AFP le député Soleiman al-Faqih.

Avec seulement 42 députés, cette assemblée n’a pas le quorum requis par la Déclaration constitutionnelle (soit la moitié plus un député, donc 95 députés) pour tenir légalement une session parlementaire.

La communauté internationale reconnaît le Parlement basé dans l’est, issu des élections de 2014, mais pas le gouvernement d’Abdallah al-Theni, qui en est issu et qui est également basé dans la région orientale.

Elle soutient depuis fin 2015 le GNA, issu d’un accord politique interlibyen parrainé par l’ONU et basé à Tripoli.

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