Les adieux de François Hollande

Même si lors de son discours de renoncement à un second mandat, François Hollande avait affirmé son intention de rester président de la république jusqu’à la fin effective de son mandat, les vœux pour la nouvelle année qu’il s’apprête à livrer aux Français auront une étrange allure de discours d’adieux et de déclaration testamentaire. Et même si cet instant manquera de la gravité qu’avait prise la posture d’un François Mitterrand affaibli par la maladie, évoquant « les forces de l’esprit », celui de François Hollande marquera à sa manière cette séquence politique incertaine que la France est en train de vivre.

Par Mustapha Tossa

Deux grands titres sont accolés par les observateurs à cette dernière grande sortie de François Hollande. Le premier est son irrésistible tentation de dénoncer les dangers de l’extrême droite qui voit les vents du populisme, les mêmes qui ont provoqué le Brexit et amené Donald Trump à la Maison Blanche, gonfler ses ailles et lui autoriser tous les fantasmes, y compris celui de rêver trôner à l’Elysée. Le second est d’attaquer de front le projet politique de François Fillon, nouvelle icône de la droite, dont les propositions sociales et économiques sont considérées par la gauche comme autant des dangers mortels pour le modèle social français.

Cibler ces deux dangers de la droite et de l’extrême droite sera à en pas douter la ligne conductrice d’un président qui s’entête à rester dans le coup jusqu’à la dernière minute de son mandat. D’ailleurs, pour parer à toutes les tentations de l’enterrer, François Hollande s’est arrangé pour faire savoir qu’il avait décidé de renoncer à un second mandat et non à quitter définitivement la vie politique comme son aîné le socialiste Lionel Jospin l’avait fait sous le coup de l’émotion de la défaite. Une posture qui en dit long sur sa volonté à continuer à peser sur la vie politique ou du moins partisane française.

Par ailleurs, il est certain que le président de la république aura à cœur de défendre avec becs et ongles son bilan. Il aura d’autant plus d’enthousiasme à le faire que les bons résultats de la lutte contre le chômage et la possible inversion de sa courbe telle que promise sont là pour renforcer sa conviction et sa détermination. Et autant dans son discours de renoncement était enveloppé par un halo d’abattement et d’échec, autant celui des vœux aura des chances de faire transpirer une sensation de regrets d’avoir pris hâtivement sa décision de jeter l’éponge.

Et François Hollande aura toutes les raisons de regretter son geste. L’homme qui ambitionne de prendre son relais, de perdurer son héritage, de défendre son bilan, Manuel Valls, n’a pas réussi jusqu’à présent à créer cette étincelle qui pave les destinés présidentiels. Il paraît englué dans sa campagne des primaires, pris dans le piège de devoir à la fois défendre le bilan et prendre la distance nécessaire pour proposer autre chose qui donne envie à ceux qui n’étaient pas convaincu de la prestation du gouvernement qu’il dirigeait. La tâche paraît rude.

Officiellement, François Hollande avait promis de ne pas se mêler des jeux de la primaire socialiste qui doit designer le champion de la gauche pour cette présidentielle de 2017. Mais dans la réalité, il ne peut rester indifférent aux batailles et aux bisbilles liées à sa succession. La logique politique voudrait qu’il fasse campagne pour son ex-premier ministre Manuel Valls s’il est légitimé par l’appareil socialiste. Mais la réalité des humeurs politiques peut en décider autrement. Ces humeurs sont généralement décidées par la manière des ruptures et de séparation.

François Hollande et ses amis auront à se positionner entre ce qui est considéré comme une trahison froide d’Emmanuel Macron et ce qui a été décrit comme un lâchage en rase compagne de Manuel Valls. D’ailleurs certains ont vu dans la soudaine apparition de la candidature d’un Vincent Peillon aux primaires socialistes une manifestation de mauvaise humeur des amis du président de la république et un début de renvoi d’ascenseur face à ces ruptures mal digérées. Cette situation a poussé certain observateurs à évoquer l’hypothèse que la gauche est entrée dans une irrésistible dynamique de la division qui met en scène une formidable machine à perdre.

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