Le nouveau scandale qui secoue l’Elysée

François Fillon a-t-il sollicité l’exécutif pour accélérer les procédures judiciaires visant Nicolas Sarkozy? Les révélations de journalistes du Monde mettent dans l’embarras l’ex-Premier ministre, qui crie au « complot », et surtout Jean-Pierre Jouyet, secrétaire général de l’Élysée.

"Je ne peux pas ne pas voir dans ces attaques invraisemblables une forme de déstabilisation et de complot", dénonce l’ex-Premier ministre dans le Journal du dimanche. Il dément une nouvelle fois être intervenu auprès de Jean-Pierre Jouyet, secrétaire général de l’Elysée, et porte plainte en diffamation contre les journalistes du Monde et le quotidien.

Ce sont en effet les révélations des deux enquêteurs Gérard Davet et Fabrice Lhomme dans leur livre "Sarko s’est tuer" (Stock) qui ont mis le feu aux poudres et plongé dans l’embarras l’Elysée comme M. Fillon.

Tapez vite

Au cours d’un déjeuner dans un restaurant proche de l’Elysée le 24 juin, M. Fillon aurait dénoncé auprès de M. Jouyet le remboursement par l’UMP des pénalités liées au dépassement du plafond des dépenses de campagne de Nicolas Sarkozy en 2012. "Tapez vite, tapez vite! Jean-Pierre, tu as bien conscience que si vous ne tapez pas vite, vous allez le laisser revenir. Alors agissez!", aurait lancé M. Fillon, accusant l’ex-président d’"abus de bien social", "de faute personnelle".

L’ex-chef du gouvernement, qui entretient des relations notoirement exécrables avec l’ancien chef de l’État, est aujourd’hui entré dans une concurrence féroce avec lui pour la présidentielle de 2017. MM. Fillon et Jouyet ont démenti avoir tenu de tels propos, de même qu’Antoine Gosset-Grainville, ancien directeur adjoint de cabinet de M. Fillon, lui aussi présent à ce déjeuner.

Stop aux boules puantes

"J’ai toujours respecté mes adversaires politiques et, a fortiori, les membres de ma propre famille politique. Je n’éprouve que du dégoût devant de tels procédés qui discréditent notre démocratie", fustige M. Fillon, qui dit "Stop aux boules puantes !". "Inimaginable", avait quant à lui rétorqué M. Jouyet. Mais les deux journalistes maintiennent leur version avec à l’appui une interview du numéro 2 de l’Élysée le 20 septembre au palais présidentiel, enregistrée avec l’assentiment de l’intéressé, et publiée en partie dans le Monde paru samedi.

D’après les deux journalistes, M. Jouyet avait bien donné son accord pour que son récit soit restitué dans leur livre à la condition que ses propos ne soient pas cités entre guillemets, ce que MM. Davet et Lhomme ont respecté. "En démentant en bloc, il porte atteinte à notre crédibilité professionnelle", a expliqué à l’AFP Gérard Davet. "C’est donc pour cela que nous avons choisi dans Le Monde de décrypter ses propos pour que les gens comprennent bien que nous n’avons absolument rien inventé".

Une gravité exceptionnelle

Un proche de M. Fillon, le député UMP Jérôme Chartier, a demandé aux journalistes de "faire entendre" leur enregistrement. Dans l’entourage de M. Sarkozy, seul le porte-parole, Gérald Darmanin, a pour l’instant réagi en glissant dans le JDD que si M. Fillon est bel et bien intervenu auprès de M. Jouyet, "ce serait d’une gravité exceptionnelle".

Cette affaire peut-elle éclabousser le chef de l’État? L’Élysée, sollicité samedi par l’AFP, est resté silencieux. Mais un proche du président souligne que François Hollande s’est toujours tenu scrupuleusement au respect de l’indépendance de la justice et "n’est jamais sorti de cette ligne", "il est inattaquable, inflexible", a-t-il assuré à l’AFP.

Dans l’article du Monde, le chef de l’Etat n’est d’ailleurs pas mis en cause. Selon les propos rapportés de M. Jouyet, il a opposé un non catégorique à toute intervention. "Quand Fillon m’a dit ça, j’ai dit: ‘Tiens, oui, on pourrait simplement signaler le machin…’ Mais François (Hollande) m’a dit: ‘Non, non, on ne s’en occupe pas’", relate le quotidien.

Du pain bénit pour Sarkozy
En tout cas, conclut un proche du chef de l’Etat, "c’est du pain bénit pour Nicolas Sarkozy" ."C’est très grave", estime pour sa part un membre de l’exécutif assurant que nombre de ministres voient en Jean-Pierre Jouyet "un personnage intrigant" qui "manipule tout le monde". Ils reprochent à cet ami intime de François Hollande, qui l’a propulsé le 16 avril secrétaire général de l’Élysée, un poste charnière, d’entretenir des relations "troubles" avec la droite.

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