Le ministre malien des Affaires étrangères: « Le soutien et l’aide du Maroc au Mali sont déterminants pour nous »

De passage à Paris, le ministre malien des Affaires étrangères, Tiéman Coulibaly, a rencontré Atlasinfo.fr et a accordé à notre site une interview dans laquelle il se félicité de l’aide internationale apportée au Mali dont celle du Maroc qui, a-t-il dit, « a été présent à nos côtés dès les premières heures de la crise ».

Le ministre malien des Affaires étrangères:
Le Mali entretient de fortes et anciennes relations avec le Maroc. Comment ce pays peut-il vous aider dans la grave crise que traverse le Mali?

Nous comptons sur l’aide et le soutien du Maroc qui est un pays frère avec lequel nous avons des relations historiques. Le Maroc a été présent à nos côtés dès les premières heures de la crise. Il a été le premier pays dont nous avons reçu une aide humanitaire, avec l’envoi de plusieurs cargos. Aujourd’hui, malgré notre situation très difficile, le Maroc n’a pas changé sa coopération avec le Mali. Il continue de recevoir nos étudiants. Il nous a accordé deux fois plus de bourses pour nos étudiants que les années précédentes et a continué à accueillir nos officiers dans ses écoles et académies militaires. Le Maroc a toujours soutenu et continue de soutenir le Mali et son intégrité territoriale. Nous comptons fortement sur ce soutien et sur la coopération avec le Maroc pour venir à bout de cette menace terroriste.
A la Conférence des donateurs à Addis-Abeba, le Maroc a octroyé une aide financière au Mali. Mais cette somme n’est rien à côté de tout ce que fait le Maroc pour le Mali. Son soutien et son aide sont déterminants pour nous.

Cette aide englobe-t-elle également des échanges de renseignements ?

Nous avons des échanges entre nos services de renseignements, une coopération militaire et aussi un appui diplomatique du Maroc. N’oublions pas que la résolution 2085 pour permettre à notre pays de recouvrer son intégrité territoriale a été votée sous la présidence marocaine du Conseil de Sécurité.

Vous avez évoqué la présence de 5 500 à 7 000 djihadistes au nord Mali, y compris des jeunes Sahraouis des camps de Tindouf ?

Ils n’étaient que 500 dijihadistes au départ. Aujourd’hui, ils sont entre 5 500 et 7 000 hommes. Ces groupes djihadistes ont été rejoints par des jeunes sans perspectives y compris par des jeunes sahraouis des camps.

La France intervient militairement au Mali avec le soutien de l’Europe et des Etats-Unis. Le soutien de l’Europe est-il dicté par la crainte d’une menace sur son propre territoire ?

Nous nous réjouissons de la présence de la France au Mali dans la situation actuelle de notre pays. Nous avons une reconnaissance profonde et une gratitude sincère pour l’aide apportée par la France. Mais il ne faut pas oublier que dans cette zone du Mali se joue la stabilité et la paix dans le monde. Et si nous n’arrivons pas à stabiliser toute cette partie de la bande sahélo-saharienne, c’est le monde qui va en pâtir y compris la France et l’Europe. Une grande partie de la défense et de la sécurité de l’Europe est en train de se jouer chez nous, en Afrique. Les ennemis de leur système politique et civilisationnel sont chez nous. Ils sont aussi nos ennemis, parce qu’ils sont contre la liberté et la democratie. C’est pour cela que ce combat est un combat commun. La lutte contre le grand banditisme et contre le grand terrorisme qui s’appuie sur le trafic de drogue est un combat que nous partageons tous ensemble.
A ce propos, les autorités marocaines ont à plusieurs reprises appelé l’attention de la communauté internationale sur cette grave menace, mais à l’époque les gens n’écoutaient pas beaucoup. Il a fallu ce risque de destruction totale de notre Etat pour que la communauté internationale se rende compte de la gravité du danger.

La ville de Kidal est-elle sous contrôle?

Kidal a fait l’objet de frappes aériennes. Il faut détruire tout le dispositif logistique de ces groupes terroristes pour permettre à nos troupes d’avancer. Kidal est au Mali, c’est le territoire malien. Il est hors de question qu’une partie de notre territoire échappe à la reconquête de notre souveraineté. Sinon, cela n’aura aucun sens.

La violence et le djihadisme ne sont pas dans la tradition du Mali. Les confréries maliennes ont toujours véhiculé un islam tolérant?

L’islam malien est un islam essentiellement de confréries. Nous avons des confréries, telle que la Tidjania ou la Qadirrya, qui entretiennent des relations anciennes avec les confréries marocaines. Malheureusement, la faiblesse de l’Etat et la mauvaise gouvernance, ainsi que l’alliance entre le salafisme et le grand trafic de drogue nous ont conduits à cette situation là. Notre islam n’a rien à voir avec cette violence et ce djihadisme terroriste. Au-delà d’être un "islam" violent, c’est un "islam" menteur. Ce n’est pas cela l’islam. Les vrais ennemis de l’islam sont les djihadistes et les premières victimes sont les vrais musulmans qui suivent le chemin du prophète Muhammed, Paix sur lui. Les Maliens croient que les hommes, malgré leurs différences, peuvent et doivent vivre ensemble. Voilà le sens de notre islam. Nous n’avons pas besoin de ces djihadistes pour nous donner des leçons. Tombouctou a abrité la première université islamique dans cette partie du monde et nous en savons plus qu’eux en matière d’islam. Nous sommes un pays pacifique et pacifiste.

Le Haut Conseil Islamique du Mali est dirigé par Mahmoud Dicko, considéré comme un wahhabite. Faut-il s’attendre à des changements de ce côté-là ?

Je pense que les musulmans maliens prendront le moment venu les décisions pertinentes qui s’imposent pour la conduite des affaires de l’islam au Mali. En tout cas, il y a eu un jeu dangereux de la part des uns et des autres qui a risqué de plonger le Mali dans les ténèbres.

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