Le gouvernement français défend son budget à l’Assemblée

Plus de 1 000 amendements ont été déposés et les débats s’annoncent agités. La réforme de l’ISF est notamment très contestée à gauche.

Mardi, le gouvernement défend à l’Assemblée nationale son premier budget avec de longues passes d’armes en vue autour de la réforme de l’ISF défendue mordicus par le chef de l’État, vivement critiquée par toute la gauche et par son prédécesseur, et suscite les questions d’élus Modem. Plus de 1 000 amendements sont au menu pour ce premier volet du projet de loi de finances pour 2018 consacré aux «  ressources  », débattu depuis 16 heures, et ce, jusqu’à la fin de la semaine. L’exécutif souligne que la France, dernier pays de la zone euro en procédure de déficit excessif avec l’Espagne, doit sortir du viseur européen pour retrouver de la «  crédibilité  » au moment où elle propose de réformer profondément l’Union européenne. Après un retour juste sous le seuil des 3 % du PIB de déficit en 2017, il prévoit 2,6 % en 2018 et un quasi-retour à l’équilibre en 2022, à la faveur d’une croissance annuelle du PIB de 1,7 à 1,8 %, et d’une très faible progression de la dépense. Autant d’éléments de la loi de programmation des finances publiques jusqu’en 2022, également au menu de l’Assemblée.

Le Premier ministre Édouard Philippe (issu de LR) est allé défendre cette trajectoire lundi à Bruxelles. «  Je crois que la France sortira de cette situation inconfortable [de déficit excessif, NDLR] pendant l’exercice 2018  », a affirmé le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, estimant que ces perspectives vont «  dans la bonne direction  ». Pour y arriver, le gouvernement a prévu en 2018 de faire près de 15 milliards d’euros d’économies : sept pour l’État, avec des coupes controversées dans les aides au logement et contrats aidés notamment, cinq pour la Sécurité sociale, trois pour les collectivités locales. Cela passe d’autant plus mal à gauche que ce budget transforme l’ISF en impôt sur la seule «  fortune immobilière  » (IFI) qui, conjugué à l’introduction d’une «  flat tax  » de 30 % sur les revenus du capital, va priver l’État de 4,5 milliards d’euros. Là où la majorité défend l’objectif d’orienter l’épargne des Français aisés vers «  l’économie productive  », dont les PME, la gauche, unanime, dénonce un «  cadeau aux plus riches  ». Pour le communiste Pierre Dharréville, cette réforme va pénaliser les «  premiers de corvée  », allusion à la métaphore des «  premiers de cordée  » employée par Emmanuel Macron dimanche. «  Je ne crois pas à la jalousie française qui consiste à dire : Il y a des riches, taxons-les, nous nous porterons mieux », avait argumenté sur TF1 le président, selon qui l’ISF a fait «  perdre beaucoup de talents  ». Une analyse contestée par François Hollande, sorti de sa réserve pour mettre en garde, de Séoul, son successeur contre «  une fiscalité allégée pour les riches et alourdie pour les plus modestes ou les classes moyennes  ».

Attention aux lobbies

Des doutes se sont également exprimés dans une partie de la majorité. Le MoDem de François Bayrou souhaite ainsi maintenir «  un impôt sur la fortune des particuliers  », sortant du périmètre de l’ISF la seule détention de titres (parts ou actions) dans les entreprises. «  Nous avons le même objectif que le gouvernement, favoriser l’investissement productif, mais avec un dispositif plus simple et moins coûteux  », a expliqué le président du deuxième groupe de la majorité, Marc Fesneau. Le ministre de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire a déjà objecté que cette proposition n’est «  pas constitutionnelle  ». LREM compte seulement surtaxer des «  signes extérieurs de richesse  » (yachts, voitures de sport et métaux précieux) pour éviter «  des effets d’aubaine  », avec un rendement de moins de 50 millions d’euros. «  Cache-sexe  », pour la porte-parole des députés PS Ericka Bareigts, reprenant une formule de l’ancien ministre Michel Sapin. Le patron des députés LREM Richard Ferrand a, lui, appelé mardi ses troupes, qui ont déposé des dizaines d’amendements, à «  faire les choses en bon ordre  », avertissant notamment contre les lobbies. «  Il n’y aura pas de fronde dans le groupe  », a prédit un élu LREM. Hostile de longue date à l’ISF, le groupe LR, qui pourrait avoir des échanges tendus avec deux ministres venus de ses rangs (Bruno Le Maire et Gérald Darmanin), votera néanmoins contre un «  budget de toutes les injustices  », selon son président Christian Jacob. LR se veut notamment le défenseur des «  retraités, familles, ruraux et collectivités territoriales  » face à la fin progressive de la taxe d’habitation et la hausse de la CSG. Cette dernière mesure, contestée aussi à gauche, figure dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), dont l’examen commence mardi en commission. Le gouvernement assure qu’elle sera compensée pour beaucoup par la mesure sur la taxe d’habitation. (avec afp)

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