Le football tricolore au révélateur qatari

Au nom de l’exigence de perfection, le Paris-SG, qui rencontre l’OM dimanche à Marseille, se débarrasse progressivement de ses joueurs français.

Le football tricolore au révélateur qatari
L’attaquant parisien Jérémy Ménez ne devrait pas fouler la pelouse du Stade-Vélodrome de Marseille, dimanche, où une équipe de la capitale en pleine bourre disputera le clásico pour le compte de la 9e journée de Ligue 1. Mercredi, lors de la deuxième mi-temps du match de Ligue des champions contre Benfica (3-0), l’international tricolore a compris au troisième remplacement parisien qu’il ne rentrerait pas en jeu alors qu’il s’échauffait : il a balancé sa chasuble et quitté le Parc des princes. Ça lui vaudra une mise à pied et le statut peu enviable de symbole : à la notable exception d’un Blaise Matuidi qui a progressé de manière spectaculaire la saison passée, les joueurs français n’ont pas leur place dans le projet qatari. Ce qui est un peu (beaucoup) de leur responsabilité.

Ménez et le sens de l’histoire

L’entraîneur parisien, Laurent Blanc, a sobrement commenté la théâtrale sortie de l’attaquant : «Il a certainement été déçu parce qu’il pensait rentrer. J’ai choisi une autre option. Point.» Depuis, Ménez a comme de coutume ramassé les leçons de morale à la pelle. On peut tout de même se demander si, par hasard, le joueur – qui revient d’une longue blessure, hernie discale – n’aurait pas eu l’assurance de rentrer en cours de match, auquel cas l’histoire n’est pas tout à fait la même. Depuis des mois, Ménez est fragilisé au sein du groupe : un coup il est sorti de l’équipe parce qu’il faut faire de la place à David Beckham pour des raisons marketing, un coup on fait jouer à sa place un Brésilien (Lucas Moura) qui ne touche pas un caramel (un but en neuf mois) mais qu’on a acheté 40 millions, un coup encore il fait les frais seul d’un rééquilibrage tactique…

Ménez est, certes, un cas : une enfance dans un contexte familial fracassé, un talent surnaturel, des embrouilles de vestiaire à répétition – le genre de choses qui arrivent quand on fait un usage immodéré de l’expression «fils de pute» – avant un exil en Italie à l’AS Rome au goût de rédemption ; sauf que le comportement constamment limite de Ménez lors de l’Euro ukrainien de 2012 aura concouru à fragiliser son sélectionneur d’alors, Laurent Blanc, contraint de passer la main pour s’être laissé déborder par des trublions dans son genre.

Si la récurrence des sorties de route du joueur doit être lassante pour son coach, tout le monde sait aussi que Ménez est facile à faire déplomber et que le projet qatari l’a laissé depuis longtemps sur le bord de la route – trop fragile, imprévisible et sauvage. Blanc a le même agent que Ménez. Raison de plus pour montrer son indépendance d’esprit à une direction qui l’attend forcément un peu au tournant sur la question.

Sakho et la french touch

Le défenseur des Bleus a signé à Liverpool en bout de mercato pour une vingtaine de millions d’euros comme on lâche la rampe : il a pris acte du fait qu’il était de trop. Le président parisien, Nasser al-Khelaïfi, a alors déclaré : «Mamadou est un bébé du club [Sakho a été formé au PSG, ndlr], je voulais le garder.» N’importe quoi : et Marquinhos, stoppeur (comme Sakho) de 19 ans sans expérience internationale acheté 35 millions d’euros cet été, il est là pour faire le compte à l’entraînement ? Marquinhos, c’est un coup de Leonardo, l’ancien directeur sportif du club.

Qui, comme d’autres avant lui, avait constaté l’étrange fragilité du joueur les jours de haute pression : une première titularisation en bleu (1-1 en Biélorussie, juin 2011) complètement foirée, un premier match sous les yeux de l’ex-entraîneur du PSG Carlo Ancelotti (2-1 à Lorient devant Locminé) manqué aussi ; l’impression qu’il manquera toujours l’imperméabilité mentale et la détermination au long cours qui fait le champion. Des travers que Leonardo a souvent accolés aux joueurs français, bien au-delà du cas Sakho. Un jour de clásico, l’entraîneur adverse – un certain Didier Deschamps – avait exhorté ses joueurs à éviter de jouer sur Sakho : «Il est en train de vous massacrer», avait-il lancé aux attaquants marseillais. Arrive pourtant un moment où la puissance ne fait pas tout.

Jallet et la loi du vestiaire

Le latéral droit a été titularisé lors des deux premières journées de championnat à Montpellier (1-1 le 9 août) et au Parc contre l’AC Ajaccio (1-1 le 18 août). S’il a parfois trouvé des espaces libres sur son aile, il n’a pas vu arriver la moindre passe de ses coéquipiers : son concurrent au poste, Gregory Van der Wiel, ayant lors des matchs suivants été abreuvé de ballons, il fallait comprendre que le niveau de Christophe Jallet (29 ans) était jugé insuffisant par les Thiago Motta, Thiago Silva, Zlatan Ibrahimovic et consorts.

Ce genre de verdict se respecte : il vient non seulement du terrain, mais de quelques-uns des meilleurs joueurs du monde, du genre à savoir ce qui est bon pour l’équipe – fût-ce à moyen terme. Blanc en a pris acte. Il n’est pas là pour ramer contre le courant. Et puis il n’a pas le choix.

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