Le Conseil d’Etat écarte une interdiction totale de la burqa en France

Une interdiction totale du port de la burqa en France présenterait de « sérieux risques » constitutionnels et ne « pourrait trouver aucun fondement juridique incontestable », estime le Conseil d’Etat.

L’instance a remis mardi au Premier ministre, François Fillon, son rapport sur la viabilité d’une loi contre le port du voile intégral. Nicolas Sarkozy et son Premier ministre entendent légiférer au printemps sur ce sujet délicat, qui met notamment en cause la liberté de conscience.

François Fillon a déclaré lundi aux parlementaires UMP qu’il irait "le plus loin possible sur la voie d’une interdiction général du voile intégral dans le respect des principes généraux du droit".

Les Sages, qui avaient été sollicités pour avis par le chef du gouvernement le 29 janvier, estiment qu’"une interdiction générale du port du voile intégral en tant que telle, ou de tout mode de dissimulation du visage dans l’ensemble de l’espace public serait exposée à de sérieux risques".

S’ils excluent une prohibition sur la voie publique, les sages suggèrent de "sécuriser" les nombreux textes épars qui interdisent déjà "la dissimulation du visage", d’étendre les possibilités d’interdiction "dans des circonstances particulières de temps et de lieux" et, surtout, de recourir à une loi pour rendre cette interdiction permanente "dans les services publics qui nécessitent des vérifications relatives à l’identité ou à l’âge". "Il faut qu’on sorte du clair-obscur", estime-t-on au Conseil d’Etat.

Une grande marge de manœuvre est toutefois laissée au législateur, en ce qui concerne l’un des aspects les plus épineux de ce dossier, à savoir la définition des lieux où, au-delà des services publics, s’appliquerait l’interdiction : les transports, les commerces et les lieux privés accueillant du public. L’ampleur de cette liste donnera le degré de prohibition que les pouvoirs publics souhaitent donner à cette pratique.

En termes de sanction, les sages ont préféré une nouvelle peine, "l’injonction de médiation sociale", à la seule fixation d’une amende. "Une question d’efficacité et de pédagogie", souligne-t-on, au Conseil d’Etat où l’on se montre soucieux de "ne pas provoquer de réactions disproportionnées par rapport au phénomène que l’on souhaite résorber".

"Les mesures préconisées auront une forte portée dissuasive car elles rendront la vie quotidienne de ces femmes plus difficiles. L’idée est d’arriver à un processus d’extinction du phénomène, comme cela s’est produit dans les établissements scolaires avec la loi de 2004", qui y interdit le port du foulard islamique.

Le porte-parole de l’UMP, Frédéric Lefebvre, a souhaité que le gouvernement et la majorité prennent en compte l’avis du Conseil d’Etat pour trouver "un point d’équilibre".

Le chef de file des députés UMP, Jean-François Copé, qui a déjà déposé une proposition de loi et milite pour une interdiction la plus large possible, a laissé entendre pour sa part que cet avis ne serait pas déterminant. "Si les avis sont importants, si l’Etat de la règle de droit est essentiel, ne perdons pas de vue que ce que nous voulons c’est répondre à des impératifs de sécurité publique, que la question du voile intégral c’est aussi la question du vivre ensemble", a-t-il dit devant les parlementaires UMP.

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