La justice climatique dans le débat de la COP22

La réflexion sur les mécanismes et les moyens à même d’intégrer la justice climatique dans le débat de la COP22, a été au centre d’un Forum international, organisé jeudi à Rabat, autour du thème « Le rôle des Conseils économiques et sociaux et Institutions similaires, dans la transition écologique équitable ».

Lors de ce colloque, les membres des différents Conseils économiques, sociaux et environnementaux (CESE) ont plaidé pour la mobilisation des expertises et la conjugaison des efforts afin de réfléchir sur les mécanismes et les moyens permettant de se référer aux principes de justice climatique pour que les parties puissent entamer la mise en œuvre effective, à Marrakech, de ce que les accords de Paris ont défini comme "la responsabilité commune mais différenciée" dans la lutte contre le dérèglement climatique.

"Cette rencontre, qui s’inscrit dans le cadre des travaux menés par le CESE du Maroc sur la justice climatique, constitue une occasion pour débattre avec les différentes institutions œuvrant dans le domaine des possibilités d’inclure la justice climatique au centre du débat de la COP22", a déclaré à la MAP le président du CESE du Maroc, Nizar Baraka, en sa qualité de président de l’Union des Conseils économiques et sociaux et Institutions similaires des Etats et gouvernements membres de la Francophonie (UCESIF).

Il s’agit également d’une opportunité pour les différentes institutions de s’arrêter sur les moyens à même d’intégrer la justice climatique dans les politiques publiques, en tant qu’outil de gouvernance pour la lutte contre les changements climatiques, de consolider le rôle de la société civile en tant que porte-voix de ce concept, de renforcer la reconnaissance du droit de chacun à un environnement sain et d’améliorer l’accès des citoyens aux droits environnementaux.

Également, président du Comité scientifique de la COP22, M. Baraka a précisé que la justice climatique constitue un levier important dans la réduction de "la fracture climatique", c’est à dire les inégalités des chances des pays et des citoyens de saisir les opportunités de développement économique et de progrès social générés grâce à la lutte contre les changements climatiques, soulignant l’impératif d’étudier les différentes politiques internationales mises en place en vue de protéger les populations vulnérables et les états insulaires qui risquent de disparaitre.

A cet égard, il a relevé que l’intégration de la justice climatique dans les politiques publiques, à l’instar de l’ensemble des dispositifs nécessaires à la lutte contre les changements climatiques, ne peut être dissociée des objectifs de développement durable. "Cette nouvelle lecture du droit et du développement interpelle chacun de nos pays sur la nécessité d’élaborer une stratégie intégrée de développement durable élaborée selon une approche participative, construite à partir des territoires et incluant une réglementation adéquate, la formation des décideurs publics, l’identification, la priorisation et la budgétisation des actions nécessaires", a-t-il signalé.

Le président du CESE du Maroc a rappelé, à cette occasion, que la justice climatique a fait l’objet d’un avis du Conseil en tant que focus du rapport annuel pour l’année 2015, appelant l’ensemble des Parties à évaluer et à analyser l’impact de l’utilisation de la justice climatique sur les différentes contributions nationales, tout en lançant un débat sur la possibilité d’envisager un cadre normatif international pour le suivi de l’intégration de ce concept.

Transition écologique équitable

Il a, par ailleurs, mis en exergue le rôle des institutions pour veiller à favoriser une transition écologique équitable et à inciter les décideurs publics notamment, à réorienter les efforts fournis par les parties dans la lutte contre les effets du dérèglement climatique vers l’adaptation, à mettre en place des mécanismes pour une allocation équitable et inclusive des ressources dans le cadre d’un effort solidaire au niveau spatial, et à renforcer la résilience des territoires et des villes en intégrant les enjeux climatiques au niveau de toutes les politiques d’aménagement du territoire.

M. Baraka a fait observer que "seulement 16 % des moyens financiers qui ont été mobilisés pour le climat sont dédiés à l’adaptation, de telle sorte que les pays les moins développés sont ceux qui bénéficient de peu de moyens pour faire face aux problématiques climatiques", ajoutant qu’une véritable justice climatique pourrait rééquilibrer la donne et profitera aux populations vulnérables.
Il s’est, aussi, dit convaincu que "ces travaux et débats contribueront fortement à alimenter la réflexion commune pour faire de la COP22 de Marrakech, la COP de l’action et de la mise en œuvre d’une transition écologique effective, équitable et inclusive".

Pour sa part, Driss El Yazami, Président du Conseil national des droits de l’Homme du Maroc et responsable du pôle société civile de la COP22 a mis l’accent sur "le rôle que joue les CESE au côté de l’institution nationale des droits de l’Homme en tant qu’acteurs essentiels de médiation entre les sociétés et les pouvoirs effectifs et qui se distinguent de plus en plus, notamment au Maroc, par leur capacités de diagnostic des problématiques de chaque société".

Il s’est aussi attardé sur "la gravité de la situation et l’état d’urgence planétaire permanent dans lequel se trouve l’Homme aujourd’hui et qui demande, à l’évidence, un sursaut de l’humanité toute entière", rappelant que la communauté internationale s’est dotée, l’année dernière de deux feuilles de routes visant à affronter cette situation de manière globale, il s’agit de l’accord de Paris et de la définition des Objectifs du développement durable (ODD).

"Il faut réfléchir à la cohérence nécessaire entre la mise en œuvre des ODD et de l’accord de Paris. Cela suppose une réflexion sur la gouvernance aux niveaux national et international et une implication des citoyens", a dit M. El Yazami.

Le président du Conseil économique, social et culturel du Mali, Boulkassou Haidara, a, quant à lui, exposé les tendances globales observées dans son pays, liées aux impacts des changements climatiques sur l’environnement et les sociétés humaines, faisant savoir que le Conseil du Mali, dans le cadre de l’accomplissement de ses missions constitutionnelles, sillonne chaque année le pays pour s’enquérir des préoccupations majeures des populations dans toutes les régions.

Il a, à cet égard, appelé les membres des Conseils présents, à "penser à orienter les gouvernements dans leurs prises de position vers une politique énergétique conséquente".

De son côté, le vice-président du CESE du Sénégal, Cheikh Ngaido BA, a relevé que les Conseils sont des organes consultatifs et jouent un rôle prépondérant dans la sensibilisation, notant qu’après les décisions qui ont été prises lors de la COP21 à Paris, il est temps pour la COP22 d’agir sur l’application et la mise en œuvre de ces résolutions.

Au programme de cette manifestation figurent une conférence inaugurale sous le signe "Concept de la Justice climatique: entre urgence de l’accès aux droits économiques sociaux, culturels et environnementaux et les décisions de l’Accord de Paris", des tables rondes autour des thèmes "Quels mécanismes pour l’intégration de la justice climatique dans la mise en œuvre des politiques publiques, des INDC et des ODD ?" et "Quels sont les rôles attendus des CESE dans la mobilisation de la société civile, et le renforcement de la solidarité régionale pour une justice climatique en perspective de la COP22 ?".

Ces travaux se sont déroulés en présence notamment, des présidents des CESE de l’Algérie, du Bénin, de la présidente de l’Observatoire du développement durable du Comité Économique et Social européen, du directeur du Cabinet de la présidence du CES d’Espagne, des secrétaires généraux du ministère délégué auprès du ministère de l’environnement et du CESE du Maroc et des membres du corps diplomatique accrédité au Maroc.

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