La diplomatie française aux fourneaux pour conserver la réputation de sa cuisine

Pour prouver la vitalité et la diversité du repas gastronomique français, inscrit au patrimoine de l’Unesco en 2010, le ministère lance le 19 mars 2015 avec un des chefs français les plus connus, Alain Ducasse, une opération planétaire à la manière des « dîners d’Epicure » organisés au début du XXe siècle par le légendaire chef Auguste Escoffier, « cuisinier des rois et roi des cuisiniers » qui avait donné à la fin du XIXe siècle ses lettres de noblesse à la cuisine française.

Face à la menace d’une perte d’influence de sa légendaire gastronomie sur la scène internationale, la diplomatie française enfile son tablier pour faire rayonner ses tables, dans un contexte de concurrence étrangère croissante.

Le palmarès du Michelin annoncé au quai d’Orsay, siège du ministère des affaires étrangères, des repas français servis dans les ambassades et un millier de restaurants du monde entier: le ministère multiplie les initiatives. L’enjeu est d’importance pour la France, première destination touristique mondiale (84,7 millions de touristes étrangers en 2013) puisque la gastronomie est une motivation majeure des visiteurs.

"Les grandes tables, il faut les faire rayonner", explique à l’AFP l’ambassadeur Philippe Faure.

"Et puis il faut améliorer aussi tout ce qui est bistrots et petits restaurants, c’est pas souvent très bon, et très souvent c’est cher", juge le président délégué du Conseil de promotion du tourisme mis en place par le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius.

Pour prouver la vitalité et la diversité du repas gastronomique français, inscrit au patrimoine de l’Unesco en 2010, le ministère lance le 19 mars 2015 avec un des chefs français les plus connus, Alain Ducasse, une opération planétaire à la manière des "dîners d’Epicure" organisés au début du XXe siècle par le légendaire chef Auguste Escoffier, "cuisinier des rois et roi des cuisiniers" qui avait donné à la fin du XIXe siècle ses lettres de noblesse à la cuisine française.

Mille chefs de différentes nationalités sur les cinq continents, dûment sélectionnés, proposeront ce jour-là un "menu à la française": apéritif au champagne ou au cognac, entrée froide, entrée chaude, poisson ou crustacés, viande ou volaille, fromages français, dessert au chocolat, le tout accompagné de vins français.

Il ne s’agit pas uniquement de haute gastronomie, précise Alain Ducasse à l’AFP, des petites tables seront parties prenantes de l’opération, intitulée "Goût de France/Good France". Ces repas seront également servis dans les résidences des ambassades de France. Tous doivent mettre en avant les légumes, les produits de saison, éviter trop de gras, de sucre et de sel, détaille le chef, dont trois restaurants, à Paris, Monaco et Londres, ont chacun trois étoiles au Guide Michelin.

"Ma simple ambition, c’est que la cuisine française réinfluence le monde!", résume Alain Ducasse, qui parraine d’autre part avec un autre chef célèbre Joël Robuchon "Taste of Paris", festival culinaire dont la première édition est prévue en mai, et qui existe à Londres depuis 2004.

Autre signal fort, c’est cette année dans les salons du Quai d’Orsay que sera dévoilée le 2 février la sélection du guide Michelin France, en présence de Laurent Fabius.

– Pas en voie d’extinction –

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La notoriété légendaire de la cuisine française est menacée, avec l’émergence d’autres pays (Espagne, Scandinavie, Pérou…) et l’influence de guides comme les "50 Meilleurs restaurants", classement de la revue britannique "Restaurant" très décrié dans l’Hexagone, qui ne place que 5 tables françaises dans sa dernière édition. Elle est aussi régulièrement la cible d’attaques dans la presse anglo-saxonne.

"Il y a de la part des Anglo-Saxons l’idée de nous détrôner, de dire, la France, ça a été bien mais ce n’est plus ça", estime Philippe Faure, qui a été ambassadeur au Mexique, au Maroc, au Japon, et ancien président du guide Gault&Millau. "Nous ne disons pas que nous sommes le seul lieu où ça se passe mais nous ne sommes pas en voie d’extinction!"

"Une forme de la gastronomie française s’est détériorée", reconnaît-il toutefois à propos de la restauration de moyenne gamme. "On prend certaines claques qu’on mérite", poursuit-il, citant les pôles touristiques que sont le Mont Saint-Michel et les quais de Seine à Paris.

Pour améliorer cette offre, Alain Ducasse et Guy Savoy, auteurs d’un rapport d’étape du Conseil de promotion du tourisme –qui doit remettre son rapport final au printemps — font entre autres recommandations de réduire à trois le nombre d’entrées et de plats, d’utiliser des produits locaux et frais, non industriels.

Tous deux font partie des 15 chefs fondateurs du "Collège culinaire de France", qui a mis en place ses propres appellations: quelque 800 établissements ont été classés "restaurant de qualité" depuis 2013 et 125 "producteurs artisans de qualité" viennent également d’être distingués par cette association.

Reste la question financière: contrairement à la France, "beaucoup de pays ont mis de gros budgets" pour soutenir leur gastronomie, souligne Philippe Faure. Mais les financements, publics et privés, "viennent quand les idées sont claires", assure-t-il.

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