La « charge mentale » des femmes, épuisées de tout gérer, une notion qui parle à beaucoup

Prendre rendez-vous chez le pédiatre, dresser la liste des courses, lancer le lave-linge… En dessinant son quotidien, une illustratrice française a voulu mettre en lumière la « charge mentale » qui pèse sur les femmes, souvent gestionnaires du foyer, une notion floue mais qui parle à beaucoup.

Au-delà de la répartition, toujours inégale, des tâches domestiques entre les femmes et les hommes, il est une tâche supplémentaire, invisible: l’organisation de la vie du foyer et l’anticipation de ce qui pourrait la perturber.

Dans la BD "Fallait demander", publiée récemment sur Facebook, l’illustratrice Emma met en scène sa vie de mère, de femme et de salariée avec "un partenaire qui attend qu’elle lui demande de faire des choses", la voyant "comme la responsable en titre du travail domestique".

"Cette charge mentale je la vis, comme beaucoup de femmes, et j’avais envie d’en parler. C’est sorti tout seul", explique à l’AFP cette ingénieure en informatique de 36 ans, qui dessine sur son temps libre.

Plus de 200.000 partages plus tard, une traduction en anglais ("You should’ve asked") et des milliers de commentaires, souvent féminins, saluant "la justesse" du propos, la féministe se réjouit d’avoir aidé à une "libération de la parole" et "un éveil des consciences".

La charge mentale est "difficile à définir mais se perçoit dans le vécu quotidien", explique à l’AFP François Fatoux, ancien membre du Haut conseil français à l’égalité entre les femmes et les hommes.

Pour ce juriste, cette "charge" se définit par "la gestion, l’organisation et l’anticipation" de la vie quotidienne, autant d’actions qui peuvent apporter du stress et empiéter sur le travail et les loisirs.

"Cette BD en est un bon support pédagogique, analyse-t-il. Le ton de l’humour, sans culpabilisation, permet une prise de conscience plus légère".

"Je me suis tout à fait retrouvée", témoigne Pauline, mariée et mère de quatre enfants. "C’est vrai qu’on est agacée d’avoir à faire les choses ou d’avoir à demander aux hommes de les faire. C’est ce sentiment d’en faire plus qui crée le conflit".

Cette femme de 36 ans, qui travaille dans l’audiovisuel, estime que son mari "fait plus le ménage" mais elle gère "le reste": des repas à l’organisation des vacances, en passant par la tenue de sport des enfants.

"Pour la fête des mères (dimanche en France, ndr), il ira peut-être faire les courses pour me faire plaisir. Cela évitera que je les fasse sur internet au travail", sourit-t-elle.

Selon l’Institut national de la statistique, les Françaises consacrent quatre heures par jour aux tâches ménagères et parentales, contre 2H13 pour les hommes.

Parmi les 29 pays de l’OCDE, ce sont les Mexicaines qui arrivent en tête avec 373 minutes (soit plus de six heures) quotidiennement consacrées à ces activités, suivies par les Australiennes (311 minutes), selon des chiffres publiés en 2014 par l’Organisation de coopération et de développement économiques.

Penser aux vaccins des enfants, prévoir le menu quand on reçoit des amis, faire les valises avant les vacances serait alors exclusivement féminin? "Assurément non, soutient M. Fatoux. Des hommes gèrent très bien cela et dans les familles monoparentales la question ne se pose pas. Néanmoins, dans un couple, la répartition des tâches a tendance à se sexualiser".

Deux raisons à cela: "l’incompétence, inconsciente ou assumée, des hommes -qui fait que les femmes prennent les devants- et l’idée persistante d’un modèle féminin au foyer -qui fait que les hommes les laissent faire", poursuit-il.

"Pour bien faire, il faudrait laisser tomber sur des petites choses et assumer de déléguer", préconise Emma.

Et François Fatoux d’avancer: "tant que les hommes n’auront pas une part plus présente au foyer, ne resteront pas seul avec l’enfant, ils n’auront pas de charge mentale", dit-il, plaidant pour un congé paternité obligatoire et plus long.

afp

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