La Syrie et les limites de la diplomatie

A qui en douterait, le massacre de Houla, dans lequel l’ONU voit la responsabilité de l’armée syrienne et des milices pro-Bachar Al-Assad, a rappelé une évidence. Le pouvoir bunkérisé à Damas ne reculera devant rien pour se maintenir en place. Ainsi, l’ONU a précisé que la plupart des quelque cent personnes tuées, le 25 mai, dans cette région du nord de la Syrie, notamment les enfants, ont été assassinées d’une balle dans la tête.

Ecraser ou être écrasé : le logiciel syrien ne semble pas comporter d’autre option. Cette vision des enjeux laisse peu de prise aux outils classiques de la diplomatie.

Il est donc bien improbable que la vague d’expulsions d’ambassadeurs et de chargés d’affaires syriens, aux Etats-Unis, en France, en Allemagne ou au Royaume-Uni, entre autres, ébranle si peu que ce soit un régime rompu aux quarantaines diplomatiques et qui a encaissé sans ciller quinze vagues successives de sanctions européennes.

Que la France ait été la première à déclarer persona non grata la très orthodoxe – selon les canons damascènes – représentante syrienne, Lamia Chakkour, ne gomme pas le relatif aveu d’impuissance que constitue ce geste. La fermeture de l’ambassade de France à Damas, le 2 mars, n’a guère eu d’incidences, sinon de priver les opposants encore tolérés d’un utile soutien sur place. Dans ce registre, il ne restera bientôt plus que le " feu nucléaire " de la rupture des relations diplomatiques.

Quant à l’éventualité d’une intervention militaire, évoquée mardi 29 mai par François Hollande, elle est nuancée par un codicille de taille : un feu vert du Conseil de sécurité de l’ONU. Or celui-ci n’est toujours pas parvenu, malgré la multiplication des tueries, à s’entendre ne serait-ce que sur une résolution condamnant avec un peu de fermeté la répression barbare en Syrie.

Pour symbolique qu’il apparaisse, le renvoi des diplomates syriens traduit pourtant une inflexion. En effet, le dernier précédent concernait les représentants libyens, quelques mois avant la chute du régime de Mouammar Kadhafi. Cette inflexion est d’ailleurs confirmée par la décision française d’organiser sur son sol la prochaine réunion du groupe des Amis de la Syrie, censé appuyer une opposition erratique et désespérante, et préparer avec les pays voisins un éventuel " jour d’après ".

Personne ne doute cependant que c’est à Moscou, plus encore qu’à Pékin, que se jouera le sort du régime syrien. Jusqu’à présent, Vladimir Poutine, qui sera de passage à Paris vendredi, s’obstine à résumer le conflit syrien comme une attaque sournoise des Occidentaux contre son pré carré ou considéré comme tel.

L’enjeu consiste donc à persuader la Russie que son influence sera mieux préservée si elle lâche une carte qui ne cesse de perdre de la valeur. Et que la poursuite des troubles servira en définitive l’extrémisme islamiste qu’elle entend endiguer par Bachar Al-Assad interposé. Compte tenu des dispositions manifestées par le président russe, il ne peut s’agir que d’un sacré pari.

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite