La France fait la synthèse du « grand débat national », avant les difficiles décisions

Dix mille réunions, 16.000 cahiers de doléances, des centaines de milliers de propositions: le gouvernement français fait lundi la synthèse du "grand débat national", lancé pour tenter d’apaiser la colère des "gilets jaunes", avant le délicat choix des mesures concrètes.

Le Premier ministre Edouard Philippe organise une "restitution" qui réunira 500 personnes pendant trois heures à partir de 09h00 (07h00 GMT): près de la moitié du gouvernement, les cinq personnalités "garantes" de l’indépendance du débat, de simples citoyens, des représentants des associations et corps intermédiaires, des maires… Ainsi qu’une centaine de directeurs d’administration, "car ils seront amenés à mettre en oeuvre les décisions issues du grand débat", selon un conseiller de l’exécutif.

Le compte rendu se fera sur la base d’une synthèse de quelque 1.500 pages qui résumera les doléances des Français recueillies pendant plus de deux mois.

Le "grand débat national" ("GDN") avait été lancé par Emmanuel Macron afin de dénouer la pire crise survenue depuis son accession au pouvoir en 2017, celle des "gilets jaunes", ces Français qui protestent depuis près de cinq mois contre la politique fiscale et sociale du président.

La mobilisation s’est largement essoufflée. Ils n’étaient plus qu’environ 22.000 samedi dernier, selon des chiffres du ministère de l’Intérieur contestés par les "gilets jaunes", à manifester à travers la France, contre 282.000 le 17 novembre, leur premier samedi d’action.

Mais le mouvement perdure malgré tout, nombre de "gilets" jugeant que le GDN n’est qu’un tour de passe-passe destiné à les étouffer.

La porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, a cependant promis dimanche que "rien ne sera comme avant" à l’issue du grand débat. "Les gens ont besoin d’être beaucoup plus associés aux décisions. Il y a aussi un sentiment d’injustice, en matière fiscale, notamment, et il faudra aussi qu’on y réponde", a-t-elle déclaré.

Pour l’heure, on ne connaît du GDN que quelques réponses "fermées" des questionnaires disponibles sur le site internet du grand débat, où le oui l’a quasi systématiquement emporté, par exemple pour la prise en compte du vote blanc (82%), moins d’élus hors parlementaires (71%), ou encore l’extension du référendum d’initiative partagée (66%), selon les données exploitées par l’AFP.

Mardi et mercredi, deux débats sans vote seront organisés au Parlement en présence d’Edouard Philippe.

"Nous allons commencer à dire ce que nous retenons de ce qui a été dit. Et comment nous envisageons le travail" avant qu’Emmanuel Macron n’annonce "l’essentiel de ce que le gouvernement fera ensuite pour répondre aux attentes des Français", a résumé Edouard Philippe vendredi.

La présidence a confirmé que le chef de l’Etat annoncerait de premières mesures à la mi-avril, probablement avant Pâques. Puis, selon son entourage, il pourrait égrener des décisions jusqu’à l’été, enjambant les élections européennes du 26 mai.

Il devra affronter le scepticisme de l’opinion: selon un sondage Elabe publié jeudi, 68% des Français estiment que les points de vue exprimés ne seront pas pris en compte, et 79% pensent que le grand débat ne résoudra pas la crise politique actuelle.

Si le GDN a permis à M. Macron de lui donner une bouffée d’air, sans pour autant éteindre la fronde des "gilets jaunes", il fait dorénavant face à un exercice périlleux: "les Français ont pu tout dire. Le président ne pourra pas tout faire", résume le quotidien de droite Le Figaro, pour qui M. Macron a "un devoir d’inventer et de surprendre".

Le président a tout récemment averti qu’il ne pourrait pas donner "66 millions de réponses", soit autant que le nombre de Français, soulignant l’individualisme des demandes citoyennes, souvent contradictoires et difficiles à synthétiser.

"La sortie du grand débat a des allures de mission impossible", en conclut Le Figaro.

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