L’Arabie veut redorer le blason de sa diplomatie au Moyen-Orient en mutation

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L’Arabie saoudite a nommé cette semaine un diplomate de carrière à la tête de ses services de renseignement dans l’espoir de dynamiser sa diplomatie pour jouer un plus grand rô le au Moyen-Orient, une région en pleine mutation, selon des analystes.

Le prince Bandar Ben Sultan, 63 ans, ambassadeur saoudien à Washington pendant 22 ans (de 1983 à 2005), a été nommé jeudi par décret royal chef des services de renseignement.

Abdallah Chammari, un expert des relations internationales, estime que "le prince Bandar a la capacité" de "saisir l’occasion qui s’offre au royaume de reprendre sa place" sur l’échiquier régional à la faveur "des mutations géostratégiques que connaît le monde arabe, qui vont conduire à de nouveaux rô les pour l’Arabie saoudite, la Turquie et l’Iran".

Selon M. Chammari, l’Arabie saoudite doit "réévaluer les méthodes de travail de sa diplomatie", dont "le rô le s’est éclipsé, au profit de l’Iran et de la Turquie, après les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis et l’invasion de l’Irak en 2003".

"La conjoncture actuelle nécessite une plus grande coordination régionale et internationale", indique Abdel Aziz Ben Saqr, président du Gulf Research Center, en évoquant la frustration de Ryad face au blocage par Moscou et Pékin des efforts internationaux pour un règlement de la crise syrienne.

Les responsables saoudiens, très critiques du régime du président Bachar al-Assad depuis le début des violences en Syrie, sont partisans de la fourniture d’armes à la rébellion, une option totalement exclue par la Russie et la Chine.

Le royaume, qui avait opéré ces dernières années un rapprochement avec ces deux pays dans un effort de rééquilibrage de ses relations, traditionnellement axées sur l’Occident, "a établi de bonnes relations avec la Russie et échangé des visites au plus haut niveau. Mais la position russe n’a pas été bonne sur la question syrienne", ajoute M. Saqr.

"La situation nécessite un diplomate habitué au jeu des intérêts" des puissances internationales, souligne l’analyste.

Il rappelle que le prince Bandar "a à son actif plusieurs succès" dont la conclusion avec la Chine en 1987 du premier contrat d’achat de missiles balistiques, et l’influence exercée auprès de la Russie pour la convaincre de ne pas s’opposer aux résolutions de l’Onu visant à bouter les troupes de Saddam Hussein hors du Koweït après l’invasion irakienne en 1990.

Le prince Bandar va mettre sa longue expérience de la diplomatie et ses relations au service des renseignements saoudiens, qui pourront devenir ainsi un outil diplomatique.

Le nouveau chef du renseignement est également secrétaire général du Conseil saoudien de sécurité nationale, qu’il dirige depuis sa création en 2005 en pleine campagne de lutte antiterroriste dans le royaume, secoué alors par une série d’attentats d’Al-Qaïda.

Fils du prince héritier décédé en 2011 Sultan Ben Abdel Aziz, le prince Bandar a participé à des missions diplomatiques de médiation notamment dans la crise syro-libanaise après l’assassinat en 2005 de l’ancien Premier ministre libanais Rafic Hariri.

Fort de son expérience, il est "le mieux placé pour comprendre les enjeux diplomatiques et la politique (moyen-orientale) des Etats-Unis", estime Anwar Eshki, président du Centre du Moyen-Orient pour les Etudes stratégiques.

M. Eshki, qui a connu de près le prince Bandar pour avoir été l’un de ses collaborateurs à Washington, estime que le nouveau chef du renseignement saoudien "sera en mesure de favoriser une entente entre Américains et Arabes", dont les rapports sont souvent empreints de méfiance.

En outre, "le prince Bandar a de bonnes relations avec la Chine où il avait joué un rô le déterminant dans le contrat sur les missiles balistiques, qui a marqué un succès stratégique pour l’Arabie saoudite", a poursuivi M. Eshki.

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