Kim ouvre la porte à une présence diplomatique américaine en Corée du Nord

Kim Jong Un a évoqué jeudi à Hanoï la perspective d’une représentation permanente des Etats-Unis en Corée du Nord, Donald Trump tempérant pour sa part les espoirs de percée à court terme sur l’épineux dossier de la dénucléarisation du pays reclus.

Des questions se posaient néanmoins sur le déroulement des entretiens, la Maison Blanche ayant avancé la conférence de presse de Donald Trump à l’heure où était prévue une "cérémonie de signature d’un accord conjoint" après les discussions au Sofitel Legend Metropole, luxueux établissement situé en plein coeur de Hanoï.

Un bureau de liaison américain à Pyongyang serait le bienvenu, a lancé le dirigeant nord-coréen, qui répondait pour la première fois à des questions de journalistes étrangers entre deux séances de discussions avec le président américain.

Ce type de représentation n’est pas du même niveau qu’une ambassade mais il s’agirait d’une première étape dans la normalisation diplomatique entre deux pays qui étaient dans des camps opposés durant la guerre de Corée (1950-53). Donald Trump a jugé que c’était "une bonne idée".

Au cours de leur premier sommet, en juin à Singapour, les deux dirigeants avaient écrit une page d’histoire mais signé une déclaration commune "sur la dénucléarisation de la péninsule" sans véritables engagements concrets. Huit mois après, des avancées sont attendues, au-delà des paroles chaleureuses.

"Je ne suis pas pressé" de parvenir à un accord qui verrait la Corée du Nord mettre au rebut son arsenal nucléaire, a répété Donald Trump. "La vitesse n’est pas si importante que ça pour moi", a-t-il insisté.

Donald Trump assure régulièrement qu’il n’y a nul besoin de se précipiter pour convaincre le Nord de désarmer, tant que celui-ci s’abstiendra, comme il le fait depuis plus d’un an, de procéder à des tirs de missiles et des essais nucléaires.

Kim Jong Un a expliqué quant à lui qu’il ne serait pas présent à Hanoï s’il n’était pas prêt à la dénucléarisation mais est resté évasif sur d’éventuelles mesures concrètes.

"C’est ce que nous sommes en train de discuter".

"Mon ami Kim Jong Un"

Le locataire de la Maison Blanche est sous pression dans ce dossier où ses prédécesseurs ont échoué. Une percée diplomatique lui permettrait de détourner l’attention de ce qui se passe à Washington, où son ex-avocat Michael Cohen a livré devant le Congrès un témoignage aussi explosif qu’accablant.

Donald Trump a une nouvelle fois fait miroiter à son "ami Kim Jong Un" un spectaculaire développement économique si la Corée du Nord acceptait enfin de renoncer à son arsenal nucléaire.

"A plus long terme, je sais que nous aurons une réussite fantastique" avec la Corée du Nord, a lancé Donald Trump. "Cela va être une puissance économique. Avec un peu d’aide au bon endroit, je crois que cela va être quelque chose de très spécial".

Depuis son arrivée au Vietnam, Donald Trump n’a eu de cesse de mettre en avant l’exemple de ce pays communiste qui a embrassé l’économie de marché et tourné la page de la confrontation avec les Etats-Unis.

"Le Vietnam se développe comme peu d’autres endroits au monde. La Corée du Nord ferait la même chose – et très rapidement – si elle décidait de dénucléariser", avait tweeté le président américain.

Depuis des mois, le président américain manie la carotte et le bâton envers la Corée du Nord, mettant en exergue son potentiel économique tout en refusant l’allègement des sanctions.

Les Etats-Unis ont maintes fois réclamé que Pyongyang se débarrasse de ses armes nucléaires de manière complète, vérifiable et irréversible.

Mais, pour la Corée du Nord, la dénucléarisation est plus large. Elle veut la levée des sanctions internationales qui l’étranglent et la fin de ce qu’elle perçoit comme les menaces américaines, à savoir une présence militaire en Corée du Sud et dans la région en général.

Les contempteurs de Donald Trump craignent qu’il ne soit prêt à faire trop de concessions, y compris aux dépens des alliés sud-coréen et japonais, pour proclamer une victoire et détourner l’attention de ses soucis aux Etats-Unis.

Démantèlement d’un réacteur ?

A Singapour, M. Trump avait pris ses propres collaborateurs par surprise en annonçant la suspension des manoeuvres militaires conjointes avec la Corée du Sud, une revendication majeure du Nord qui les considérait comme la répétition d’une invasion de son territoire.

Les deux dirigeants, qui sont passés en quelques mois des insultes personnelles et menaces apocalyptiques à des déclarations "d’amour" de la part de Donald Trump, devront aller plus loin que pendant leur premier sommet, qualifié de pure représentation théâtrale par nombre d’analystes.

Pour faire taire ses détracteurs, Donald Trump pourrait essayer d’arracher une annonce à "Chairman Kim", par exemple la promesse du démantèlement du réacteur de Yongbyon, le principal complexe atomique nord-coréen.

Les Etats-Unis pourraient de leur côté accepter des gestes chargés en symboles, comme l’ouverture d’un bureau de liaison ou une déclaration pour mettre officiellement fin à la guerre de Corée, qui s’est achevée en 1953 par un simple armistice.

Quoi qu’il en soit, "la fenêtre de tir pour des progrès diplomatiques avec la Corée du Nord ne restera pas ouverte indéfiniment", met en garde Kelsey Davenport, de l’Arms Control Association.

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