Islam : l’Institut français de civilisation musulmane enfin sur pied à Lyon, 25 ans après la mosquée

A l’origine, l’Institut français de civilisation musulmane devait être bâti en même temps que la grande mosquée de Lyon, mais le projet a dû attendre un quart de siècle, et une vague d’attentats sans précédent, pour enfin se matérialiser.

L’imposante bâtisse de 5 niveaux et 2.700 mètres carrés, qui jouxte désormais la mosquée dans le 8e arrondissement, "n’est pas un ghetto culturel, mais plutôt comme une institution ouverte à tous les Lyonnais, quelles que soient leur religion, leur culture", souligne Kamel Kabtane, recteur de la mosquée de Lyon et président fondateur de l’IFCM.

Le pendant culturel de la mosquée aurait dû s’élever avec celle-ci, mais le gouvernement de François Mitterrand, refroidi par le tollé des opposants au projet, avait tempéré les ambitions de M. Kabtane.

"Après 1981, on m’a dit: +écoutez, séparez les projets. On va commencer à construire la mosquée de Lyon, et ensuite, nous construirons l’IFCM+", se rappelle ce dernier pour l’AFP.

La mosquée, pourvue d’un minaret de 25 mètres et d’une capacité d’accueil de 7.000 fidèles, fut finalement inaugurée en 1994 par le ministre de l’Intérieur et des Cultes de l’époque Charles Pasqua. Jeudi, c’est son lointain successeur Christophe Castaner qui dévoilera officiellement l’IFCM.

"25 ans ont passé, mais les gens ont compris que construire l’institut était plutôt positif pour le quartier. Je pense que ça va donner un peu plus de vie. Lyon va maintenant avoir aussi son mot à dire sur la culture et la civilisation musulmane", se réjouit M. Kabtane.

– Le tournant de 2015 –

Pour lui, le point de basculement est intervenu en 2015 avec une série d’attentats qui a précipité une prise de conscience de l’Etat.

"C’est là où effectivement, on a compris qu’il fallait faire quelque chose, parce qu’il faut aussi lutter par le savoir et la connaissance. Bernard Cazeneuve a compris que ce projet allait apporter quelque chose aux musulmans et aux non musulmans", soutient le recteur de la mosquée de Lyon.

En posant la première pierre de l’édifice en 2016, le ministre de l’Intérieur socialiste avait indiqué que l’Etat voulait ainsi "se battre pour faire naître un islam de France, qui, en conformité avec les valeurs de la République (…) permet à des imams formés de développer un islam de tolérance et de respect".

Car l’IFCM proposera un enseignement universitaire destiné "aux cadres religieux et associatifs", sous l’autorité de l’université Lyon 3 et l’Université catholique de Lyon. Il permettra la délivrance d’un certificat de "Connaissance de la laïcité".

"Il y a une telle carence dans l’offre (…) en France que tous les instituts qui concourent à la connaissance des civilisations, de la culture liée à l’Islam sont les bienvenus", salue le directeur de la Fondation de l’Islam de France Ghaleb Bencheikh.

"Plus on multiplie ces lieux, plus la culture et les langues seront connues. Et plus on aura d’imams bien formés", estime-t-il.

– La région réticente –

L’Institut proposera également des cours de civilisation musulmane, de langue pour adultes et enfants, notamment de français et arabe, des colloques, débats et conférences sur les cultures de l’Islam ainsi qu’une programmation artistique et culturelle.

Le bâtiment flambant neuf mêlant béton brut, verre et bois comporte une salle de conférence de 240 places, un espace d’exposition de 200 mètres carrés, huit salles de classe, deux laboratoires de langues, une médiathèque,
 deux salles polyvalentes pour séminaires et un salon de thé-restaurant.

En 2016, une polémique était née du refus du président de la région Auvergne-Rhône-Alpes Laurent Wauquiez de financer le projet à hauteur de 1 million d’euros. Selon lui, des pays étrangers investisseurs étaient susceptibles de s’immiscer dans le fonctionnement futur de l’institut.

Les bailleurs pointés du doigt étaient l’Arabie Saoudite et l’Algérie, mais seule l’Arabie Saoudite, via la Ligue islamique mondiale, a finalement mis la main au portefeuille à hauteur de 1,5 million d’euros sur un budget total de 11 millions.

Pour rassurer les élus, M. Kabtane a consenti à modifier les statuts de l’IFCM, mettant en place un conseil d’administration associant pouvoirs publics, représentants de la communauté musulmane et personnalités qualifiées.

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