France : Nicolas Sarkozy gère le remord tunisien

Nicolas Sarkozy pousse sa logique de ne pas avoir épousé les événements de Tunisie avec précipitation jusqu’à revendiquer une «certaine réserve» naturelle que lui dictent l’histoire et la géographie.

France : Nicolas Sarkozy gère le remord tunisien
Alors que l’ambition officielle de son intervention était de détailler l’agenda et les enjeux de la présidence française du G20, une seule question était sur toutes les lèvres : comment Nicolas Sarkozy allait-il justifier le retard à l’allumage, voire les faux pas diplomatiques de son gouvernement sur la révolution tunisienne ? Allait-il s’enfermer dans un reniement têtu de ceux qui affirment avoir raison malgré l’éclatante évidence des faits ? Ou allait-il faire son mea culpa et reconnaître avoir raté le tournant ?

Sans prendre cette attitude contrite de ceux qui se flagellent en public pour mieux expier leurs erreurs, Nicolas Sarkozy avait reconnu qu’il n’avait pas pris à sa juste mesure la désespérance et la souffrance des Tunisiens. Un argument déjà développé presque en catimini par le ministre de la Défense Alain Juppé lorsqu’il est apparu que la diplomatie française était sinon à contre-courant du moins en stagnation devant la dynamique qui agite la société tunisienne.

Nicolas Sarkozy invoque, pour expliquer cette mauvaise captation, l’argument de la proximité historique et géographique : «Quand on est si proches, quand les destinées individuelles et collectives sont tellement imbriquées, on n’a pas toujours le recul nécessaire pour comprendre les sentiments de l’autre, bien mesurer ses frustrations, et sans doute ses angoisses». Les détracteurs de Nicolas Sarkozy peuvent facilement lui renvoyer cet argument en affirmant que parce que la proximité était totale que toute cécité était interdite. Signes particuliers de cette crise, ses détracteurs ne peuplent pas les rangs de l’opposition socialiste victime elle aussi, malgré ses dénégations d’un retard à la compréhension et à l’allumage.

Nicolas Sarkozy pousse sa logique de ne pas avoir épousé les événements de Tunisie avec précipitation jusqu’à revendiquer une «certaine réserve» naturelle que lui dictent l’histoire et la géographie «spécialement l’Algérie», avec cette phrase qui fera date et polémique : «Le président de la République française doit tenir compte du poids de l’histoire dans le jugement qu’il porte sur l’évolution de chacun de ces pays». Poussé dans cette logique, Nicolas Sarkozy fut incapable, sinon par une pirouette, de répondre à la question de savoir s’il pouvait offrir refuge au président algérien Abdelaziz Bouteflika s’il connaissait le sort du président tunisien déchu. Une fois installées cette reconnaissance et cette justification, Nicolas Sarkozy est passé à la série de mesures que prendra la France pour accompagner et aider la jeune démocratie tunisienne.

Outre les mesures économiques demandées au gouvernement de François Fillon, la France veillera à aider la Tunisie à obtenir le statut de partenaire avancé de l’Union européenne que lui interdisaient les mauvaises pratiques de l’ère Ben Ali. Dans son élan, Nicolas Sarkozy dû rappeler à une audience suspicieuse que la meilleure preuve que la France avait beaucoup aidé les Tunisiens et qu’elle fut un des rares pays à offrir refuge et protection à l’opposition démocratique tunisienne. Son couplet sur la protection de cette opposition fut déclamé avec une telle passion que les mots semblaient provenir d’une greffe de circonstance à usage ponctuel dans la bouche présidentielle.

(ALM)

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite