Flambée de violences à Paris pour le premier anniversaire des « gilets jaunes »

Des flambées de violence à Paris et un retour sur les ronds-points de France: le premier anniversaire des "gilets jaunes", qui ambitionnaient de donner un second souffle à leur mouvement de contestation sociale, a été marqué samedi par le retour du chaos dans certains quartiers de la capitale.

Durant deux heures en début d’après-midi, la situation est restée confuse Place d’Italie, sur la rive gauche de la Seine, où les forces de l’ordre ont tenté un moment en vain de disperser de petits groupes de casseurs, alternant charges brèves et déluge de lacrymogènes.

"Au vu des violences et des exactions", la préfecture de police a demandé l’annulation de la manifestation qui devait s’élancer de cette place à partir de 14H00.

Voitures renversées, engin de chantier et poubelles incendiées, abribus saccagés: en une demi-heure, les assauts sporadiques de petits groupes se sont transformés en flambée de violences, ont constaté des journalistes de l’AFP, qui ont vu des manifestants blessés -dont un journaliste indépendant-, et des pompiers empêchés d’intervenir. Au centre de la place, un monument en mémoire du maréchal Juin a été en partie dégradé.

La manifestation Place d’Italie "rassemblait des individus qui ne défendaient pas une cause, mais procédaient à des destructions" et "à des attaques systématiques contre les forces de sécurité et contre les pompiers", a déclaré le préfet de police Didier Lallement lors d’une conférence de presse.

Le centre commercial d’Italie 2, sur la place, avait fermé dès les premiers incidents. Vers 13H00, ses portes d’entrée et les vitrines d’une résidence hôtelière voisine ont été attaquées à coup de pavés par plusieurs dizaines de personnes cagoulées et vêtues de noir.

Régulièrement, ces petits groupes revenaient à la charge et étaient provisoirement repoussés par les force de l’ordre, qui ont utilisé à plusieurs reprises un canon à eau.

"C’est pitoyable, c’est minable que la manifestation ait été interdite. Manifester c’est un droit et on me le refuse. La colère est provoquée par l’Etat", s’emporte Catherine Van Puymbroeck, 49 ans, venue avec son fils d’Eure-et-Loire pour la première fois.

Le calme est revenu en milieu d’après-midi une fois la place, parfois noyée sous un nuage de gaz lacrymogène, évacuée par les forces de l’ordre. "Les pompiers, venez éteindre les bougies", a lancé un "gilet jaune" en quittant les lieux.

A 19H00 la préfecture de police a fait état d’un total de 129 personnes interpellées à Paris, et selon le parquet de Paris, 78 personnes étaient placées en garde à vue à 18H30.

La situation a été également un moment tendue place de la Bastille, où une première marche autorisée arrivée de la porte de Champerret a été bloquée par les forces de l’ordre, a constaté une journaliste de l’AFP.

En début de soirée, des petits groupes de manifestants ont rejoint les alentours du centre commercial du Forum des Halles, au coeur de Paris, très fréquenté à cette heure. Les forces de l’ordre ont fait usage de gaz lacrymogène pour les disperser et procédé à quelques interpellations.

Pour cet anniversaire du mouvement, né le 17 novembre dernier de la contestation d’une taxe sur les carburants, plusieurs milliers de personnes étaient attendues à Paris, où les autorités redoutaient l’intervention de "200 à 300 ultra-jaunes et 100 à 200 militants d’ultragauche".

Epicentre de plusieurs samedis violents, les Champs-Elysées, cadenassés et interdits à toute manifestation, ont été épargnés.

Les "gilets jaunes", qui avaient rassemblé 282.000 manifestants lors du samedi inaugural, cherchaient pour cet "acte 53" à redonner un souffle à la "révolte des ronds-points" qui avait ébranlé le mandat d’Emmanuel Macron mais ne rassemblait plus que quelques milliers de personnes ces derniers mois.

Un an après, en dépit de concessions du gouvernement – primes d’activité, heures supplémentaires défiscalisées, organisation d’un grand débat national -, les multiples revendications de cette vaste contestation demeurent: baisse de la TVA sur les produits de première nécessité, retour de l’ISF, référendum d’initiative citoyenne.

Plus de 270 actions étaient annoncées tout le week-end, partout en France.

En régions, les premières manifestations ont démarré dans la matinée et se sont déroulées globalement sans incidents. Dans le sud-est, les "gilets jaunes" ont réinvesti certains ronds-points, distribuant tracts aux automobilistes, sans dégradation ni importante perturbation. Ils étaient une centaine à Albi (Tarn), quelques poignées à Auch, dans le Gers.

Des ronds-points ont aussi été réinvestis en Normandie, à Caen et Rouen, et en Bretagne, notamment à Vannes. Ils étaient 700 à Lille pour demander plus de "justice sociale, justice fiscale, justice climatique".

La situation était en revanche plus tendue à Nantes, où des heurts ont éclaté vers 16H00 dans le centre-ville entre les forces de l’ordre et près d’un millier de manifestants, selon la préfecture.

"Si le mouvement disparaît, j’ai peur que la société se déshumanise, ce sera la fin du service public et le règne de l’argent roi", a lancé Vanessa, 47 ans à Nantes.

A Montpellier, la permanence du député La République en Marche Patrick Vignal a été la cible des manifestants samedi après-midi, avec une vitre cassée et plusieurs inscriptions anarchistes taguées sur le bâtiment, a constaté l’AFP sur place.

A Lyon, des tirs de lacrymogène ont été lancés dans une zone très fréquentée du centre-ville. A Bordeaux, ils étaient 600 à manifester et plusieurs centaines à Toulouse, où gaz lacrymogène et canon à eau ont été utilisés contre les manifestants.

Environ 700 personnes ont défilé à Lille derrière une banderole "Les jeunes dans la galère, les vieux dans la misère, changeons le système. Justice sociale, justice fiscale, justice climatique".

A Grenoble, la manifestation unitaire contre la politique du président Macron qui réunissait "gilets jaunes", syndicats (GCT, FSU, Solidaires, Unsa, CNT) et des associations a mobilisé plusieurs centaines de personnes dans le calme. Les organisateurs y voient une "préparation au 5 décembre", date d’une grève interprofessionnelle redoutée par l’exécutif.

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