Essai clinique de Rennes : le laboratoire Biotrial mis en cause

« Trois manquements majeurs » de la part du laboratoire Biotrial ont été relevés par l’Inspection générale des affaires sociales dans un rapport préliminaire.

"Trois manquements majeurs » ont été constatés par l’Igas, la police sanitaire, dans la gestion de l’essai clinique mené par le laboratoire Biotrial qui a fait un mort en janvier à Rennes, mais les causes exactes de cet accident rarissime n’ont pas encore été identifiées. "S’agissant de la conduite de l’étude et de la gestion de la crise, les inspecteurs ont relevé trois manquements majeurs", a annoncé jeudi la ministre de la Santé Marisol Touraine, en présentant les conclusions d’un rapport préliminaire de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas). Ce rapport n’a toutefois pas permis "d’identifier les causes exactes de l’accident.

L’essai mené à Rennes a conduit au décès d’un homme de 49 ans et occasionné l’hospitalisation de 5 patients. Ces derniers ont tous pu depuis rentrer chez eux. Leur état de santé sera réévalué fin février, a précisé Marisol Touraine. Les médecins jugent "prématuré" de se prononcer sur leur guérison définitive.

Le rapport de la police sanitaire pointe d’abord que Biotrial "ne s’est pas tenu suffisamment informé de l’état de santé du premier volontaire hospitalisé" dimanche 10 janvier et qu’il a de nouveau administré la molécule du laboratoire portugais Bial aux volontaires le lundi 11. L’Igas "conclut donc que le laboratoire ne s’est pas donné les moyens qui lui auraient permis de décider de la poursuite ou non de l’essai clinique".

La "procédure a été intégralement respectée"

Deuxième manquement : "le laboratoire n’a pas formellement informé les autres volontaires" de l’incident survenu la veille. Ceux-ci n’ont donc pas pu "de manière éclairée" donner leur consentement à la poursuite de l’essai. Enfin, l’Igas relève que Biotrial a tardé à signaler l’accident aux autorités. "Le laboratoire n’a procédé à une déclaration formelle que le jeudi 14 janvier, soit quatre jours après l’hospitalisation (…) et trois jours après la décision d’interrompre l’essai", a rappelé Marisol Touraine.

Pour autant, la "procédure a été intégralement respectée" lors de cet essai et le protocole suivi par le laboratoire respecte la réglementation actuelle, estime l’Igas. Elle suggère toutefois d’améliorer "la transparence des données disponibles préalablement à l’autorisation d’un essai sur l’homme".

L’Igas remarque par ailleurs que certaines des questions posées aux volontaires avant l’essai auraient pu être approfondies, comme celle portant sur la consommation de substances psychoactives, susceptibles d’interférer avec la molécule testée. Interrogée sur l’éventuelle consommation de telles substances par le volontaire décédé, Marisol Touraine a répondu : "c’est possible", précisant que des analyses étaient en cours. L’Igas ne considère cependant pas que les manquements de Biotrial justifient "la suspension à titre conservatoire de l’autorisation de conduire les essais accordée au laboratoire".

Son rapport définitif sera remis à la ministre avant la fin mars. Parallèlement, une enquête a été ouverte au parquet de Paris. Le 29 janvier, le directeur général de Biotrial avait assuré qu’aucune faute n’avait été identifiée lors de l’essai. "Pour l’instant, nous n’avons pas identifié de faute (…). Nous n’avons observé aucun comportement qui ait pu être la cause de ce qui s’est produit", avait déclaré François Peaucelle.

Fleuron national

L’essai clinique avait débuté le 9 juillet 2015 sur une série d’autres volontaires, sans incident signalé, selon l’agence du médicament (ANSM). Après le drame de Rennes, 90 personnes ayant participé à l’étude ont été contactées. 75 d’entre elles ont subi des contrôles, les examens se poursuivent pour les autres. À ce stade, aucune anomalie clinique et neurologique n’a été retrouvée chez aucune d’entre elles, selon Marisol Touraine.

Sans attendre les conclusions des enquêtes, Marisol Touraine a demandé aux responsables d’essais cliniques sur volontaires sains de déclarer immédiatement toute hospitalisation et de suspendre l’essai dans la foulée, "jusqu’à ce que soit garantie la sécurité" des participants. Implanté près de Porto, le groupe familial Bial est considéré comme un fleuron national au Portugal.

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