Egypte: le gouvernement revoit un article d’un projet de loi antiterroriste controversé

Le gouvernement égyptien a accepté mercredi de réviser l’article d’un projet de loi antiterroriste controversé qui prévoyait la prison pour les journalistes contredisant les communiqués officiels, remplaçant cette disposition par une amende très lourde, a rapporté l’agence de presse officielle Mena.

Le gouvernement avait approuvé ce projet de loi le 1er juillet, mais le syndicat des journalistes avait par la suite dénoncé l’article 33 du texte qui préconise deux ans de prison au minimum pour publication "de fausses informations sur des attaques terroristes qui contredisent les communiqués officiels".

"Le conseil des ministres s’est mis d’accord (…) pour supprimer la peine de prison prévue par l’article 33 et la remplacer en durcissant l’amende, qui pourra aller de 200.000 à 500.000 livres égyptiennes (entre 23.000 et 58.000 euros) en cas de diffusion ou publication de fausses informations liées à l’armée, la police ou les appareils de sécurité", a annoncé la Mena, citant le porte-parole du gouvernement, Hossam al-Qawish.

Un responsable du syndicat des journalistes, Khaled al-Balchi, a estimé que la révision de l’article ne faisait qu’introduire "une autre forme d’emprisonnement", puisque le montant exorbitant de l’amende "dépasse les capacités financières des journalistes."

M. al-Balchi a également dénoncé "la logique totalitaire de la loi, qui vise à faire taire toutes les voix d’opposition à l’intérieur du pays."

Par le passé, le ministre de la Justice Ahmed Al-Zind avait expliqué que l’article 33 avait été adopté sous sa forme initiale en raison de la couverture médiatique d’attaques jihadistes ayant visé l’armée le 1er juillet dans la péninsule du Sinaï.

L’armée avait fait état de 21 soldats tués dans ces violences, mais les médias avaient publié des bilans bien plus lourds, citant des responsables de la sécurité.

Ces attaques ont été revendiquées par la branche égyptienne du groupe jihadiste Etat islamique (EI). Elles intervenaient deux jours après l’assassinat du procureur général dans un attentat au Caire.

Face au tollé soulevé par le projet de loi, M. Al-Zind avait reconnu le 9 juillet "qu’il aurait fallu prendre l’opinion du syndicat au sujet de cette loi".

Depuis que l’ex-chef de l’armée et actuel président, Abdel Fatah al-Sissi, a destitué l’islamiste Mohamed Morsi en juillet 2013, les groupes jihadistes ont multiplié les attentats visant les forces de sécurité.

Les attaques ont tué des centaines de policiers et de soldats, tandis que plus de 1.400 personnes, en majorité des pro-Morsi, ont été tuées dans la répression des manifestations de l’opposition.

Le projet de loi supprime pour les affaires de terrorisme une des deux procédures d’appel successives devant la Cour de cassation prévues dans le droit égyptien, pour n’en maintenir qu’une seule.

Le texte préconise la peine de mort pour les personnes coupables d’avoir créé, dirigé ou financé une organisation terroriste. Une peine de cinq ans de prison est prévue pour quiconque utilise les réseaux sociaux ou internet pour promouvoir le terrorisme.

Amnesty International a qualifié mercredi le projet de loi "d’attaque flagrante contre les droits à la liberté d’expression et d’association", estimant dans un communiqué que le texte "affaiblit les garanties d’un procès équitable".

L’organisation internationale estime que si la loi venait à être promulguée, "elle pourrait devenir un outil de plus pour les autorités pour écraser toute forme d’opposition".

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