Des prélats redoutent l’émergence « d’un anti-islamisme catholique »

Des prélats redoutent l
Occultées par l’omniprésence médiatique du mariage homosexuel, les relations entre catholiques et musulmans figuraient à l’agenda de l’Assemblée des évêques à Lourdes où certains ont exprimé leur inquiétude face à "l’émergence d’un anti-islamisme catholique".
L’évêque d’Angoulême Claude Dagens s’est dit "préoccupé face à l’émergence d’un anti-islamisme catholique", et qui "fait peur aux musulmans de France", lors d’un entretien avec l’AFP, en marge de l’Assemblée plénière des Evêques qui s’est tenue du 3 au 8 novembre.
"Les musulmans de France ont peur", a affirmé l’évêque et académicien. "Nous vivons dans une société qui a peur, où la peur se distille de tous les côtés. C’est vrai du côté des musulmans, mais aussi des catholiques", a-t-il observé.
Le prélat explique avoir constaté cela à Rome "lorsque le cardinal ghanéen Peter Turkson a fait projeter, lors du synode d’octobre, une vidéo au ton alarmiste, intitulée "Muslim demographics", annonçant une domination à terme de l’islam en Europe".
Une diffusion qui avait valu des critiques au cardinal ghanéen et pour laquelle il a présenté des excuses, mais qui a reçu le soutien de quelques évêques.
La violence islamiste et les peurs d’une domination musulmane étaient d’ailleurs revenues de manière lancinante tout au long du synode des évêques catholiques qui s’est achevé le 30 octobre au Vatican.
"Il y a sans aucun doute une tendance au durcissement d’un certain nombre de mouvements islamistes dans des pays arabes, des situations terribles au Moyen-Orient et le fait qu’un certain nombre de chrétiens sont pris dans un engrenage très difficile. Mais", a poursuivi Claude Dagens, "on transpose ces rapports politiques chez nous, alors que cela ne se passe pas de la même manière".
"Aussi, est-ce avec beaucoup de peine que je vois l’émergence d’un anti-islamisme catholique, de la même façon qu’il y a eu un antisémitisme catholique pendant des siècles. Et je le vois chez des gens dont je n’attendais pas cela", a-t-il confié.
L’évêque d’Evry (Essonne), Mgr Michel Dubost, président du Conseil pour les relations interreligieuses, renchérit. "Pour nous, évêques c’est un terrain très difficile".
"Une grande partie des problèmes entre musulmans et catholiques en France n’a rien à voir avec les questions religieuses et on ne peut accuser les premiers de la sécularisation des catholiques, dont la pratique religieuse a fortement chuté", remarque-t-il.
"On nous reproche d’être naïfs, voire niais", poursuit-il, "mais le dialogue avec les musulmans n’exclut ni la franchise, ni le courage. C’est à nous de nous montrer à l’aise dans notre foi, sans crainte de l’afficher et sans hostilité".
Sans vouloir "nier les problèmes" ni l’existence de "groupes dangereux", Mgr Dubost, souligne que la "responsabilité" des catholiques en tant que "médiateur". "Nous devons donner aux jeunes une idée de l’islam qui ne repose pas seulement sur les cinq piliers visibles, mais sur ceux, fondamentaux, du coeur, de la charité, du partage, de la fraternité".
Un point de vue partagé par Mgr Georges Pontier, archevêque de Marseille, qui reconnaît "deux positionnements du côté catholique".
"L’un concerne des gens habités par un sentiment de peur, lié au contexte international et mondial, et qui développent une thématique qui contribue de fait à durcir le positionnement des chrétiens face aux musulmans".
"De l’autre côté, il y a ceux qui vont au contact et disent que la situation est différente en Europe et en France. A la limite, ceux qui tiennent le langage de la peur sont ceux qui rencontrent le moins de musulmans".
"Et les plus sereins sont ceux qui vivent avec, même s’ils ne sont pas naïfs et notent qu’il y a eu des durcissements survenus dans la communauté musulmane", a conclu Mgr Pontier.

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