Conduire ou dormir, il faut choisir

Conduire ou dormir, il faut choisir
Sur l’autoroute, la somnolence est à l’origine d’un accident mortel sur trois. Une expérience menée par la revue l’Argus donne à voir des résultats édifiants : sur un trajet de 900 km, un conducteur peut dormir jusqu’à 11 minutes cumulées.

Les accidents routiers riment souvent avec excès de vitesse ou prise d’alcool. Pourtant, la première cause mortalité sur l’autoroute, aussi surprenante soit-elle, provient d’un acte naturel difficilement évitable : le sommeil. Il est à l’origine d’un tiers des accidents mortels sur l’autoroute, contre un sur six pour l’alcool et un sur dix pour la vitesse.

La revue l’Argus a souhaité donner la mesure du phénomène à travers une expérience menée sur un trajet entre Paris et Nice. La veille du départ, le journaliste cobaye se met en conditions. Pendant près d’une heure, Christophe Bourgeois est placé entre les mains de l’équipe médicale du centre veille-sommeil, dans le XVIIe arrondissement de Paris. Affublé d’électrodes sur la tête, autour des yeux et sur la jambe droite, il passe une première nuit paisible, d’une qualité de l’ordre de 93%, lui précise-t-on.

En conditions physiques optimales, il prend la route le lendemain, dès 8 heures. Soucieux de déjeuner léger, il émaille son parcours de 930 km de plusieurs pauses. Malgré les précautions prises, les résultats de l’expérience publiés mercredi sont sans appel : le conducteur a dormi pendant 11 minutes cumulées. Sa phase de somnolence la plus longue est intervenue peu avant le déjeuner, quatre heures après avoir quitté Paris. Les électrodes qui enregistrent l’activité électrique du cerveau du conducteur relèvent alors un court endormissement de 2 minutes 30. «Je n’en ai aucun souvenir», s’étonne Christophe Bourgeois. Pis, le journaliste estime que les accès de fatigue qu’il a ressentis ne correspondent pas aux phases de somnolence enregistrées par le calculateur.

Des conseils simples à respecter

Imperceptibles pour les automobilistes, les phases de micro sommeil au volant ne sont pas sans conséquences. La capacité de réflexe étant diminuée, le temps de réaction du conducteur augmente de 650 millisecondes, soit 23 mètres à une vitesse de 130 km/heure. Pendant son voyage, Christophe Bourgeois a éprouvé huit phases distinctes de somnolence. La voiture a roulé «sans conducteur à son bord pendant 24 km. Cela fait froid dans le dos», commente l’ Argus.

Aujourd’hui encore, le sommeil au volant reste le parent pauvre du débat public sur la sécurité routière. Il existe certes une législation en date de 2005, précise la neurophysiologiste Annie-Laure Frenkel du centre veille-sommeil. Le texte prévoit une visite médicale annuelle pour les professionnels de la route, excluant de fait les conducteurs lambda. De plus, la législation n’est pas très suivie dans les faits, remarque la spécialiste.

Pour pallier ce manque, les constructeurs automobiles ont mis au point quelques innovations technologiques censées prévenir le conducteur en cas de somnolence. Mercedes a par exemple développé des capteurs qui émettent un signal au conducteur lorsqu’une perte de trajectoire est enregistrée. Quelques véhicules estampillés Volkswagen ou PSA sont également dotés d’avertisseurs de franchissement de lignes.

Le respect de quelques conseils simples formulés par l’équipe médicale du centre veille-sommeil peuvent aussi réduire les risques de somnolence : ne pas partir après une journée de travail, ne pas hésiter à s’octroyer 20 minutes de sieste sur une aire de repos si des signes de fatigue surviennent, éviter les repas riches et ne pas lutter contre la fatigue en ingurgitant des boissons caféinées ou énergisantes qui revigorent «le conducteur une ou deux heures, avant que la fatigue ne reparte de plus belle», conclut la spécialiste du sommeil.

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